Liens du sang (les) Vol.15 - Actualité manga
Liens du sang (les) Vol.15 - Manga

Liens du sang (les) Vol.15 : Critiques

Chi no Wadachi

Critique du volume manga

Publiée le Jeudi, 18 Avril 2024

Deux mois se sont écoulés depuis que Seiichi a retrouvé sur sa route Seiko, s'est énervé sur elle et s'est résigné à payer son loyer pour ne pas avoir à la loger chez lui. Depuis, il ne l'a pas revue, mais quelque chose bout encore en lui, et le fantôme de Shigeru est toujours là pour lui suggérer l'inévitable marche à suivre: il le sait, il ne peut pas fuir, et se doit d'aller voir cette femme aujourd'hui vieille, cette mère qui a eu tant d'impact sur son existence vide de sens, avec tout ce que ça implique de doutes. Que va-t-il faire en la revoyant, lui qui avait déjà failli commettre l'irréparable deux mois auparavant ? Quelle sera la réaction de Seiko ? Qu'a-t-elle fait pendant toutes ces années passées seule ? N'a-t-elle vraiment aucun souvenir de ce qui s'est passé ou fait-elle semblant ? Ne reconnaît-elle vraiment pas son propre fils, dont elle semble désormais renvoyer l'image sur un chat qu'elle a recueilli et qu'elle affectionne ? Prenant sur lui face à la situation, Seiichi finit même par accepter de rester dormir chez elle. Et c'est en plein milieu de la nuit, dans une atmosphère propice aux confidences, qu'elle lui montre un album-photos qu'elle a toujours conservé et qui, soudainement, lui rappellent nombre de souvenirs...

"Est-ce que je serais capable de me mettre à nu ?"

La jaquette de ce tome nous le fait parfaitement sentir, avec cette illustration de la jeune Seiko gravée dans la rétine de Seiichi: notre héros s'est, depuis longtemps, fait son image de Seiko, et ce n'est sans doute pas pour rien que Shuzo Oshimi la dessine encore tantôt jeune tantôt vieille sous l'oeil de son personnage principal. Mais cette fois-ci, l'heure est peut-être venue pour Seiichi de découvrir sa mère telle qu'elle est réellement, et non telle qu'il l'imagine, ce qui passe par une sorte de long flashback revenant sur toute la vie de Seiko, le tout raconté par la principale concernée, au fil des souvenirs qui lui reviennent.

Pour cela, Oshimi varie encore son style visuel pour, ici, dépeindre visuellement ce long passage de manière parfaite, en jouant sur un style proche du crayonné, de l'esquisse ou du croquis, dont les différents niveaux de précision (allant du très relâché/flou au très net) reflète le niveau de clarté des souvenirs de Seiko, en nous offrant alors une expérience visuelle peu commune et magnétique pour dépeindre la jeunesse tortueuse de cette femme. Et cette jeunesse, on la découvre de façon immersive, captivante mais aussi très troublante, au fil de nombre d'étapes allant de la plus tendre enfance de Seiko jusqu'aux premières années de vie de Seiichi, en passant par son adolescence quasiment solitaire ou encore sa rencontre et son rapprochement avec Ichiro. On voit alors, parmi les moments les plus forts et impactants, à quel point ses propres parents ont sûrement eu une influence terrible sur elle (puisqu'ils la traitaient sans le moindre amour, en lui faisant sentir qu'elle était de trop), comment elle a traversé une partie de sa vie en se sentant loin de tout comme si rien ne la concernait (par exemple, elle fut incapable de pleurer le décès de sa petite soeur), quel salut elle avait trouvé en la naissance de Seiichi... Tout comme on ressort très marqués de certains passages de ce passé: le désir qu'avaient les parents de Seiichi de le cajoler assez pour le rendre heureux, l'affirmation par la jeune mère de sa volonté de toujours être là pour son enfant afin qu'il ne soit jamais seul (on voit ce que ça a donné), ou encore des scènes de jeux heureuses et insouciantes entre les jeunes Seiichi et Shige, qui semblaient alors si bien s'entendre, loin de la tragédie qui surviendra quelques années plus tard. Enfin, dans la mesure où tout ceci est raconté par une Seiko qui semble certes très lucide dans sa façon de parler mais qui se base sur ses souvenirs peut-être déformés (enjolivés ou diabolisés), on peut toujours se demander où se trouve la frontière entre la réalité de ce passé et les déformations, ce qui ajoute toujours à l'oeuvre cette part de doute assez typique et la rendant toujours aussi déstabilisante.

Il est alors difficile de ressortir indemne de ce volume riche, important et en même temps si troublant, au fil duquel Shuzo Oshimi livre encore des prouesses aussi bien graphiques que narratives pour nous emporter au plus profond de la psyché incertaine de ses personnages. A désormais deux tomes de la fin après ce volume-ci, on a une énième confirmation que Les Liens du sang est une très grande oeuvre.


Critique 1 : L'avis du chroniqueur
Koiwai
17.75 20
Note de la rédaction