Critique du volume manga
Publiée le Jeudi, 08 Décembre 2022
Alors qu'Isao Shinomiya, le directeur des Forces anti-kaiju et père de Kikoru, semblait avoir pris le dessus sur le kaiju N°9, la redoutable et intelligente créature a levé le voile sur sur ses réelles capacités et, surtout, sur son véritable objectif: les pouvoir du kaiju n°2 sont ainsi absorbés par ses soins, en scellant visiblement le sort du directeur. C'est à ce moment précis que débarquent Kafka, Narumi et Kikoru, déterminés à arrêter l'ennemi et à sauver Isao... mais est-ce seulement encore possible ?
Dire que Naoya Matsumoto nous a offert un 6e volume dantesque côté action est un euphémisme, tant le mangaka avait su capter notre intérêt jusqu'à une fin de tome aussi capitale que potentiellement tragique. Cette part tragique, elle n'offre pas foncièrement de surprise ici, tant cela semblait être une étape nécessaire pour relancer de plus belle la machine et forger encore un peu plus la détermination de nos héros à éradiquer un ennemi dont on a désormais conscience de toute a puissance et de toute l'intelligence. Pourtant, tout en offrant encore quelques pages intenses côté action, l'auteur prend surtout soin, le temps de quelques pages de faire ressortir l'état d'esprit des combattants face à la situation: le désir de Narumi d'être digne de celui qui lui a appris tant de choses et qui a posé ses espoirs en lui, la détresse d'une Kikoru qui reste néanmoins sacrément forte de caractère en affirmant sa volonté de devenir encore plus forte, et le souhait de notre héros Kafka d'être apte à soutenir ses camarades et à protéger des personnes en qui il tient désormais.
Ce sont ces trois volontés fortes que le mangaka continue d'exposer dans la suite du volume, chacun des trois personnages affirmant certains choix, entre la nouvelle place prise par Narumi, les entraînement de Kikoru pour atteindre au moins son niveau, et l'avenir de Kafka avec un choix important vis-à-vis de Narumi, malgré les possibles complications que pourraient engendrer sa nature de kaiju n°8: rien ne dit qu'il pourra éternellement rester humain... Mais Matsumoto ne s'arrête heureusement pas à ces trois-là, bien sûr. On pense à Hoshina qui prend certains paris concernant le kaiju n°10 retenu prisonnier et qui apprend un fait surprenant sur sa création, à la place nouvelle que risque de prendre un personnage en particulier dans les dernières pages du tome, au rôle nouveau de Keiji Itami, et plus généralement à la mobilisation générale des unités tokyoïtes des Forces anti-kaiju qui comprennent bien qu'elles doivent unir leurs forces face au kaiju n°9, sans quoi le pays sera fichu. Dans les faits, cela amène aussi quelques découvertes sur les conflits internes/rivalités entre unités, ce qui n'est pas forcément de plus intéressants dans un contexte aussi grave mais amène un peu d'animation en plus voire de brèves notes d'humour.
Après les événements intenses du tome 6 qui a marqué un tournant ainsi qu'une prise de conscience de l'extrême dangerosité du kaiju n°9, on a en quelque sorte ici un volume de transition qui s'applique à relancer de plus belle la machine, tout le talent de l'auteur état de parvenir à maintenir un rythme soutenu et toujours clair où l'on ressent bien les enjeux généraux mais aussi personnels. Qui plus est, le présent volume peut se targuer de s'ouvrir sur une illustration en couleurs prenant place à Paris, et qui fut une demande de feu Kazé Manga pour remercier l'implication de l'éditeur français dans la mise en avant de la série. C'est un peu classe, même si Kazé a désormais cédé sa place à Crunchyroll.
Et justement, c'est du côté de Crunchyroll que les choses deviennent tout de suite moins classes, avec ce 7e tome qui marque officiellement le passage de KAIJU N°8 sous la bannière du nouvel éditeur. Ainsi, à l'instar de toutes les autres séries de feu Kazé, et même si l'intérieur reste dans la même veine qualitative que ce que faisait Kazé (il n'y a aucune changement de ce côté-là), l'oeuvre de Naoya Matsumoto se retrouve avec une toute nouvelle charte graphique pour sa jaquette, et autant dire qu'absolument rien ne va, comme pour les autres mangas ayant précédemment connu le même massacre. Le changement de logo est certes assez compréhensible (Kazé n'existant plus, avoir Crunchyroll à la place est logique), et ne choque pas forcément trop puisque le logo de Kazé sur cette série était déjà de couleur orange. En revanche, les personnes ayant eu l'idée de modifier l'agencement des dos des tomes, plus particulièrement en y inversant le sens des textes (le logo-titre et le nom de l'auteur) devraient sérieusement penser à changer de métier, tant c'est de l'incompétence. Ce n'est rien de profondément dramatique, mais comment ont-ils pu se dire que les fans ne s'énerveraient pas face à un choix qui dépareille aussi fortement la série ? Et ce n'est pas l'idée absurde d'envoyer aux lectrices et lecteurs des "nouvelles" jaquettes avec la nouvelle charte graphique pour les précédents tomes qui va calmer la colère, parce que bon, vive l'écologie et le gâchis de papier en pleine pénurie. Le plus critique dans tout ça, c'est que l'éditeur, à force de ne pas répondre, de botter en touche ou de répondre à côté de la plaque à la colère des fans sur les réseaux sociaux, ne semble même pas avoir conscience qu'il fait n'importe quoi, et voit grandir toujours plus la haine à son égard, tant chaque réaction de sa part, si ce n'est pas de la maladresse, semble être un doigt d'honneur au lectorat.
Et histoire d'enfoncer le clou, parlons, enfin, de l'édition limitée proposée pour ce tome 7. Après celle du tome 11 de Mashle qui fut vivement critiquée pour la qualité exécrable de ses stand-up acryliques, l'éditeur était attendu au tournant ici, mais le résultat n'est malheureusement pas du tout à la hauteur par rapport au prix de vente. Sont donc au programme, en plus du tome, et dans un petit étui en carton souple qui s'abîme facilement et qui n'a rien de classieux, trois petits suppléments de pacotille. Le premier est un marque-page en métal à l'effigie de Kafka transformé, certes très joli, mais qui passe un peu mal quand on se rappelle que Kazé Manga a proposé le même genre d'objet dans ses collectors de The Promised Neverland (dont les coffrets étaient infiniment plus beaux) sans la moindre augmentation de prix par rapport au tomes unitaires. Quant aux autres bonus, il s'agit d'un petit ex libris au format du manga et imprimé sur un papier un peu trop souple, et de deux planches stickers, soit le genre de choses que les éditeurs ont plutôt l'habitude d'offrir en cadeaux lors d'opérations commerciales. Si encore cette édition spéciale était proposée à 2 voire 3€ de plus que l'édition simple, à la limite ça pourrait passer. Mais là, on parle d'un truc vendu 12,99€. Non, à un moment il faut arrêter: 6€ de plus (quasiment le double du prix du tome simple) pour quelques autocollants, une illustration en petit format et un étui de moyenne qualité, c'est de l'arnaque.
Précision, toutefois: la note ne tient pas compte de cette édition limitée, mais bien uniquement de la lecture, histoire de ne pas plomber un manga qui, lui, reste de qualité.