Kaijû Defense Force Vol.1 - Actualité manga
Kaijû Defense Force Vol.1 - Manga

Kaijû Defense Force Vol.1 : Critiques

Kaijû Jieitai

Critique du volume manga

Publiée le Mardi, 19 Septembre 2023

Découvert en France aux éditions Doki-Doki, dans la deuxième moitié des années 2000, avec le manga Otogi Matsuri qui nous a laissé un excellent souvenir avec son mélange d'action et de folklore porté par des designs de créatures travaillés et denses, Jun'ya Inoue est un auteur qui nous a ensuite un peu fait tomber de haut lors de son retour chez Glénat pour deux oeuvres: si sa brève série La Vie en Doll était assez sympathique mais surtout frustrante de par sa non-fin, Btooom!, son manga le plus connu, s'effondrait très vite sitôt les premiers tomes passés, la faute à un manque de renouvellement, à une sous-exploitation du concept, au comportement souvent débile de ses personnages, à des rebondissements ne collant pas avec le reste dans la dernière partie (on parle évidemment de Kaguya, la fillette à pouvoirs magiques qui n'avait rien à faire là), et surtout à de nombreux passages qui avaient de quoi faire hurler autour du personnage de Himiko, pauvre ado de 15 ans menacée de viol tous les deux tomes et n'ayant servi à rien. Autant dire que, pour notre part, le retour de cet auteur dans notre langue se fait dans un mélange de crainte et d'espoir. Alors, de quel côté penchera le premier tome de Kaijû Defense Force, qui vient juste de paraître aux éditions Mangetsu ? Eh bien, après lecture, les choses semblent partir dans le bon sens, globalement !

Série lancée au Japon en 2020 chez l'éditeur Shinchosha, dans le magazine Comic @ Bunch (où fut aussi proposé Btooom!), sous le nom Kaijuu Jieitai: Task Force for Paranormal Disaster Management, Kaijû Defense Force nous plonge en l'an X de l'ère Reiwa, où une avalanche sous-marine a provoqué un grand tsunami ayant ravagé la côte Pacifique. Commandant en chef de l'armement au sein des Forces d'Autodéfense Japonaises (les fameuses FJA ou JSDF), Yoshikazu Yamato a perdu toute sa famille dans cette tragédie, mais ne s'attendait sans doute pas à ce qu'une catastrophe encore plus grande ait lieu quelque temps après avec l'apparition inexpliquée d'un gigantesque monstre marin agressif et visiblement friand de chair humaine. Alors qu'il est sur un bateau militaire avec ses camarades, Yamato a la surprise et l'effroi de voir cette créature détruire le navire et tuer ses semblables, sans que quoi que ce soit ne puisse être fait: non seulement les FJA ont évidemment l'interdiction d'utiliser des armes, mais en plus, ces quelques hommes n'auraient sans aucun doute rien pu faire malgré tout, face à ce monstre qui les balaie avec une facilité déconcertante et terrifiante... Le pire étant que, bien sûr, cette attaque sera loin d'être la dernière.

Tel est le long prologue de la série. Un prologue qui, même s'il utilise de grosses ficelles (coucou Koike et ton désir bien martelé de revoir ta femme et ton fils, du coup on sait d'avance comment tu vas finir), a pour premier mérite d'imposer toute la puissance de l'animal géant, face à qui l'être humain semble insignifiant et tout juste bon à servir de repas, et dont les attaques auront à nouveau lieu ponctuellement sans qu'il puisse être saisi et abattu. C'est sur ces bases que, quelque temps plus tard, on fait la connaissance de Konoé Sakimori, jeune femme de 22 ans qui vient tout juste d'être recrutée parmi les FJA après avoir été diplômée de l'Académie de défense nationale. Pour fêter cela, elle navigue actuellement à bord d'un paquebot de luxe, le Fugaku, où elle a été invitée par sa grand-mère, ce qui est brièvement mais assez efficacement l'occasion d'exposer son petit background: le drame qu'elle a vécu lors du tsunami en ayant forgé son désir de devenir membre des FJA pour aider ses prochains et sauver des vies, la récente disparition de son grand-père qui était un fervent patriote et qui aurait été fier d'elle en la voyant entrer chez les FJA, les réticences de sa grand-mère qui considère toujours les FJA comme des militaires s'entraînant pour la guerre... Et dans ce contexte censé être paisible et festif avant de réellement commencer son travail, la jeune femme ne s'attendait sans doute pas à ce que le Fugaku soit, à son tour, pris pour cible par le monstre marin géant, ce dernier ayant sûrement envie de se faire un bon casse-dalle avec les 600 passagers !

Concrètement, le schéma est assez simple, mais sous le dessin d'Inoue il s'agit d'une introduction efficace: le mangaka assure facilement le divertissement à grand spectacle, à grand renfort d'angles de vue souvent bien choisis, de décors photoréalistes immersifs sur le bateau, et d'un travail réellement dense sur le design horrifiant du kaijû puisque l'artiste, rappelons-le, a longtemps oeuvré également sur des designs de créatures pour différentes boîtes de développement de jeux vidéo (même s'il n'atteint pas ici la folie du mangaka Shingo Honda sur Hakaiju, série qui brillait par ses designs de monstres géants dégoûtants, qui a été lâchement abandonnée par les éditions Delcourt/Tonkam il y a quelques années, et que l'on adorerait retrouver en France maintenant que ce genre de série est un peu plus à la mode).

Mais limiter la lecture à ce simple constat serait un peu réducteur, car Kaihû Defense Force semble bien parti pour avoir au moins deux autres atouts dans sa manche.
D'un côté, il y a Konoé qui, derrière son physique mince et son côté idéaliste sur la protection des siens, affiche à la fois une vraie force de caractère et une réelle force physique, faisant qu'elle ne lâchera sans doute rien dans le combat qu'elle commence à opérer, en tant que seule militaire sur ce paquebot de luxe semblant voué à un inévitable triste sort. Mine de rien, ils 'agit donc d'une héroïne forte, qui nous change beaucoup de Himiko de Btooom!.
Et de l'autre, il y a une approche du sujet qui se veut foncièrement réaliste: que se passerait-il, pour les FJA et le Japon en particulier, si une attaque de kaijû avait vraiment lieu ? Cela poserait effectivement pas mal de soucis collatéraux, entre les possibles mésententes diplomatiques sur le plan international (l'exemple pris dans le manga est celui des îles Senkaku au large desquelles le monstre attaque, or ces îles japonaises sont également revendiquées par la Chine et Taïwan), les réunions gouvernementales, ou encore le simple fait de savoir si les FJA pourraient ou non briser les interdits en décidant d'utiliser des armes dans ce genre de cas. On sent un certain souci de réalisme sur ces aspects-là, Inoue étant d'ailleurs aidé pour cet aspect par Seiichi Shirato , un spécialiste ayant notamment travaillé dans ce registre sur certains jeux vidéo et sur plusieurs animes (Les héros de la Galaxie, Jormungand, Gundam The Witch from Mercury...).

A l'arrivée, on a alors un premier volume qui accomplit sa mission: poser les bases de l'histoire et du concept (aborder l'attaque kaijû avec un certain réalisme) tout en assurant déjà pas mal le spectacle. Kaijû Defense Force part sur des bases assez prometteuses dans sa catégorie, et fait particulièrement bien monter le parfum de désespoir et d'enfer dans les toutes dernières pages. Il n'y a plus qu'à attendre de voir comment décolleront les choses par la suite !

Concernant l'édition, en guise de bémol, on notera juste le choix de Mangetsu de proposer la série dans sa collection shônen, alors que celle-ci est publiée dans un magazine estampillé seinen au Japon. Glénat avait fait le même choix pour Btooom!, et s'en était peut-être mordu les doigts par la suite au vu du contenu parfois proposé par la série sur la longueur (nudité, viol de cadavre et autres tentatives de viol hypersexualisées), donc espérons qu'Inoue évitera ces écueils pour sa nouvelle série. A part ça, la traduction de Marina Bonzi se veut naturelle et vivante en collant donc bien à un divertissement de ce type, le lettrage du Coffre à Pixels est très propre, le papier souple et opaque permet une bonne qualité d'impression, et la jaquette, bien que différent de l'originale japonaise, a un côté p^échu et explosif collant bien au récit, en plus de bénéficier d'un logo-titre métallisé et bien pensé par Tom "spAde" Bertrand (mention spéciale à l'aspect griffé du mot "Kaijû").


Critique 1 : L'avis du chroniqueur
Koiwai
14.5 20
Note de la rédaction
Note des lecteurs