Journal d'une baleine - Actualité manga

Critique du volume manga

Publiée le Vendredi, 24 Septembre 2010

"C'est bien la première fois qu'on me félicite pour avoir baisé !"

Manboou est une jeune dessinatrice française qui ne cache pas ses influences. Ayant travaillé sur des magazines jeunesse (Okapi, Le Petit Léonard), elle est également l'auteure de séries au format manga, comme R (Delcourt) ou Comme ton ombre (Soleil). Avec ce Journal d'une baleine, paru chez le jeune éditeur Aqua Lumina, la mangaka nous présente le quotidien pas à pas d'une femme enceinte en s'inspirant de sa propre expérience, le tout sur quarante-six illustrations, du test de grossesse positif jusqu'à l'arrivée du bébé.

Nous suivons ainsi la vie d'une jeune femme, ses différentes angoisses, coups de gueules, et les aléas physiques de cette étape fondamentale dans une vie, mais également les espérances, notamment sur le sexe du bébé, et les avantages offerts par la situation. L'héroïne n'a pas de prénom, afin de laisser aux lectrices tout le plaisir de s'y identifier. Cette volonté se poursuit dans son caractère assez passe-partout : nous avons ici une femme moderne, dynamique (même s'il n'est jamais fait mention d'un quelconque travail), et qui n'hésite pas à exposer franchement ses problèmes. Certaines planches sont parfois assez directes, sans aller non plus dans la vulgarité, grand bien nous en fasse. Malgré certaines plainte, "elle" affirme un caractère assez positif et volontaire. Mais "elle" ne serait rien sans "lui" : le futur papa n'est pas oublié par Manboou ! S'il reste souvent en retrait, le jeune homme sait être aux soins de sa petite femme sans jamais le montrer ouvertement, et reste lui aussi dans les carcans de l'homme moderne, insouciant dans la sphère privée, pensant surtout à sa console de jeux, et rassurant sa femme autant que faire se peut.

Nous avons donc là un couple presque modèle, qui ne jure pas dans l'image du français et de la française moyenne... Mais c'est ici que le bât blesse : en se voulant assez proche des lecteurs, les caractères ne sont pas suffisamment intéressants pour que l'on s'y intéresse. De même, le témoignage des étapes de la grossesse tourne bien vite au consensuel et aux clichés. Les différentes illustrations se révèlent assez sympathiques et nous feront sourire, mais il n'y a pas suffisamment de surprise et d'éclat dans la caricature pour nous faire rire aux éclats. Le journal d'une baleine n'a donc que peu de choses pour se démarquer des différents récits de femme enceinte, si ce n'est une certaine modernité dans le caractère des futurs parents.

Le dessin de l'ouvrage est à l'image du récit : assez passe-partout. Il n'en reste pas moins plutôt maitrisé et réussi pour du manga "à la française". Mais peut-on vraiment parler de manga ici ? Le découpage de l'histoire, au rythme mécanique d'une page - une illustration - un gag, rappelle plutôt le rythme d'un blog BD. Les dessins sont tous en bichromie, en format carré, et le centre de l'action est enfermé dans une bulle sous fond mauve. Les personnages sont bien équilibrés au niveau des proportions, et leurs expressions réussies, sans tomber dans une caricature ou une reprise malhabile des codes mangas habituels. Un bon point !

Quant à Aqua Lumina, il fournit un ouvrage de bonne facture, bien que fragile du fait de sa finesse, avec des pages glacées. Mais le bémol viendra... du prix ! Payer huit euros pour un ouvrage, qui se parcourt en une dizaine de minutes grand maximum, aura de quoi rebuter à l'achat bon nombre de curieux. Voilà qui est dommage alors qu'on ne demande qu'à découvrir de nouveaux talents...

Au final, Le journal d'une baleine peut faire office d'un cadeau sympathique pour une (future) femme enceinte de votre entourage, si vous cherchez une idée en dernière minute. L'ouvrage n'a rien de choquant, mais rien de particulièrement attractif non plus. Si le format est adapté à une description épisodique, il ne parviendra pas à développer les caractères des deux personnages principaux. Malheureusement, et malgré tout son côté sympathique, ce journal sera aussi vite lu qu'oublié. Mais que cela ne décourage pas Manboou à aller vers d'autres histoires plus abouties afin de révéler son potentiel.


Critique 1 : L'avis du chroniqueur
Tianjun
11 20
Note de la rédaction