Critique du volume manga
Publiée le Mardi, 22 Août 2023
En acceptant d'aider Kiwa à retrouver la trace de la dénommée Keiko Segawa que le mangaka sur le déclin Tomita considère comme sa déesse de la chance, Mahiro, après plusieurs pistes infructueuses, a finalement trouvé, de manière tout à fait hasardeuse, un lien entre cette soi-disant "déesse" et Yuri Kawashina. C'est sur ce dernier événement bien trop prévisible que s'achevait le tome 2 de Joker of Destiny. Mais ici, dès les premières pages, c'est un fait on ne peut plus étrange qui se produit, dès lors que, le lendemain, Mahiro se réveille sur un banc de la gare, visiblement ivre morte, avec son téléphone portable volé et un ongle cassé, et avec des trous de mémoire. Dans le fond, presque tout va bien pour elle, il n'y a rien eu de grave, à ceci près qu'elle a mal au crâne dès qu'on veut lui parler de Keiko Segawa et de Tomita, au point qu'elle a oublié de qui il s'agit. C'est un peu comme si un dieu avait provoqué cette perte de mémoire, sur la demande de quelqu'un...
Suite et fin de Joker of Destiny dans un troisième tome dont la première partie n'a rien de bien surprenant dans son côté "enquête/thriller": étant donné que le lectorat connaît déjà l'implication de Yuri dans l'affaire et son lien avec Keiko et Tomita, les quelques révélations là-dessus ne révèlent absolument rien d'étonnant, s'étirent donc pur pas grand chose dans cette premier partie de volume, et se permettent même quelques petites facilités, par exemple dans la façon dont Kiwa retrouve l'ongle de Mahiro et le banc.
Là où le récit se fait bien plus intéressant, en revanche, c'est dans l'abord du fameux facteur chance et de ses contreparties exigées par les dieux, tant cette soi-disant chance a peut-être, finalement, entraîné bien plus de malheurs qu'autre chose, entre Tomita qui pense que tout repose sur Keiko, comme s'il ne pouvait pas provoquer lui-même sa chance, Yuri qui est restée coincée dans sa quête de vengeance, et Kiwa qui, à terme, ne sait plus où il en est vis-à-vis de ce qu'il a acquis par l'intermédiaire de son dieu. Entre l'envie de satisfaire ses propres désirs avant tout, ces désirs qui nous consument, et la tentation de ne plus se reposer que sur ça sans chercher à atteindre le bonheur réellement par soi-même, Michiharu Kusunoki évoque plutôt bien le poison que peut devenir la chance, quitte à assombrir encore son récit au vu de certains événements, et même si la toute dernière page semble vraiment de trop avec son espèce de climax cruel n'apportant rien de spécial.
La dessinatrice Mizu Sahara, elle, confirme globalement que son talent peut s'étendre aussi à des récits moins doux que ce qu'elle fait généralement, chose que l'on avait déjà bien remarqué à travers son excellent recueil d'histoires courtes "Une autre moi" paru récemment en France chez Noeve Grafx. Entre autres, elle joue plutôt bien sur les mortelles ombres divines apparaissant auprès des personnages en n'augurant rien de bon.
A l'arrivée, il y a certes des facilités scénaristiques et des choses bien trop prévisibles dans l'aspect "thriller/suspense"de Joker of Destiny, néanmoins la thématique de la chance et de ses contreparties s'avère suffisamment bien abordée pour que l'oeuvre mérite un coup d'oeil.