Critique du volume manga
Publiée le Mardi, 12 Septembre 2023
Chronique 2 :
Jojo's Bizarre Adventure est une institution depuis pas mal d'années, c'est devenue une référence pour nombre de lecteurs mais aussi pour nombre d'auteurs qui s'en inspirent, ou tentent de s'en inspirer!
Sans évoquer les jeux ou les adaptations animés, Jojo c'est un vaste univers étendue, qui comprend actuellement 9 générations sur plus de 130 tomes, des romans, des spin off centrés sur un personnage iconique dans lequel l'auteur lui même, Hirohiko Araki, se reconnaît, mais c'est aussi maintenant un spin en trois volumes qui nous narre la rencontre improbable de Hol Horse, un des antagonistes de la troisième partie avec Josuke Higashikata, le protagoniste de la quatrième partie.
Si Araki est bien évidemment crédité pour le titre, on ne connaît pas son degré d'implication (bien que je doute qu'il laisse totalement carte blanche à d'autres auteurs sans superviser même de loin). Il laisse donc Kouhei Kadono au scénario pendant que Tasaku Karusama s'occupe des dessins. Ce nom dit peut être quelque chose à certains d'entre vous puisque c'est l'auteur du très bon "No guns life".
Pour ma part, les suites plus ou moins officiels, les spin off laissés à d'autres auteurs, et ce quelque que soit les séries, je m'en méfie grandement, on tombe très souvent sur quelque chose d'assez douteux voire de carrément mauvais (et non je en pense pas uniquement à Boruto en disant ça)...j'étais donc partagé entre une grande curiosité de découvrir ce spin off (ça reste du Jojo) tout en étant assez inquiet! Et bien force est de constater que c'est très bon! J'ai pris un réel plaisir à découvrir cette histoire qui respecte autant l'univers que les personnages, qui repose en grande partie sur du fan service mais pas uniquement!
Plusieurs années après la défaite de Dio par le gang de Jotaro, certains de ses adeptes / serviteurs, ressassent encore le passé en Égypte, lieu où s'est déroulé l'affrontement final. C'est notamment le cas de Hol Horse, manieur pouvant matérialiser un pistolet et contrôler la direction de ses balles. Ce dernier, éternel loser, est encore hanté par ce qu'il a vécu, car contrairement à certains manieurs de stands qui ont suivi Dio, lui n'était pas contrôlé mentalement, il a agit tel un lâche, par peur.
Voulant faire amende honorable, il accepte la requête d'une vieille femme, de retrouver son perroquet disparu! Seulement ce perroquet n'est pas n'importe quel oiseau, il a le même dresseur que Pet Shop, le faucon servant Dio qui manier un Stand de glace...il est donc probable que ce perroquet possède lui aussi un Stand, raison de plus pour rapidement le retrouver.
Accompagné dans sa recherche par Boingo, cette recherche conduit Hol Horse à Morio au Japon, où il va très rapidement croisé la route de Josuke Higashikata, un manieur de Stand surpuissant... il va s'allier à lui tout en ignorant qu'il est le fils de son ancien ennemi.
D'autres personnages seront impliqués, comme la cousine de Kakyoin, lui aussi un ancien ennemi de Dio et de ses serviteurs.
Rien qu'avec ce résumé on peut deviner toutes les références qui pullulent dans ce tome, et ce n'est qu'un avant goût!
Avant toute chose il convient de situer l'action dans le temps: cette histoire se déroule donc plusieurs années après la mort de Dio mais avant le début de la quatrième partie! Ainsi cela nous permet de retrouver plusieurs manieurs de Stands de la troisième partie, en l’occurrence ceux qui étaient les ennemis de l'époque, et cela permet de mettre en scène Josuke tout en évitant les quiproquos sur sa filiation, puisqu'à ce stade, Josuke lui même ignore qui est son père, il ignore même que d'autres personnes que lui possèdent un Stand.
Au début du tome, les auteurs vont donc s'amuser à mettre en scène plusieurs adversaires du gang de Jotaro, Hol Horse bien sur, mais aussi Mariah, Boingo et même Kenny G, manieur qui n'était qu'une blague de mise en scène. Et tout comme dans Stardust Crusader, il sera présent, mais n’apparaîtra pas pour autant, il restera dissimulé. Rien que ça, c'est à mon sens un joli hommage. On va également faire référence à Pet Shop pour laisser sous entendre la menace de ce fameux perroquet. Et bien entendu l'ombre de Dio plane sur tout ce petit monde...ils sont encore hantés par sa puissance écrasante et par ce qu'ils ont accomplis à ses cotés à l'époque.
Boingo aura pour sa part un rôle plus important mais sera tout de même assez peu présent, la suite le confirmera ou non, mais on a le sentiment qu'il n'était là que comme prétexte, pour permettre une facilité...et ce n'est pas plus mal parce que le personnage en lui même est loin d'être intéressant!
Ce qui n'est pas le cas de Hol Horse, un loser glorieux, qui se voit plus fort et plus beau qu'il ne l'est réellement, qui possède un pouvoir fascinant mais qui rate tout ce qu'il entreprend, qui se veut arrogant tout en étant lâche...un personnage parfait pour une histoire telle que celle ci!
Josuke est tel qu'on l'a connu, à ceci près qu'il n'a pas encore toutes les connaissances qu'il va acquérir dans la quatrième partie, et qu'il ne connaît pas encore ceux qui seront ses alliés dans cette même partie...on peut en déduire que si les autres personnages de la quatrième partie apparaissent (après tout nous sommes à Morio) ce ne sera que sous forme de clins d’œils, car pour garder la cohérence avec l'histoire principale, Josuke ne doit pas les connaître lorsqu'il les rencontrera après coup.
Une étrange alliance va donc se former autour d'une menace tout aussi étrange, qu'on devine venir d'un manieur de Stand qui s'avère évidemment être le perroquet en question...mais bien entendu, il agit sous le contrôle de quelqu'un qui le manipule, une menace plus grande encore qu'on est curieux de découvrir, car on ne peut que supposer que cette dite menace réfère à quelqu'un de déjà connu dans l'univers de Jojo!
Et comme le passé de Hol Horse ne peut pas le rattraper via Josuke qui ignore tout de sa filiation, les auteurs introduisent un nouveau personnage, une jeune fille qui se trouve être la jeune cousine de Kakyoin. De son coté, elle n'a toujours pas ni accepté, ni compris, la mort de son cousin bien aimé, et continue de chercher des réponses, malgré les années...réponses qu'elle pourrait bien trouver auprès de Hol Hose, serviteur de l'assassin de son cousin!
Tout ce petit monde va donc de nouveau graviter dans la petite ville de Morio, théâtre de deux parties de la saga, et on a plus que hâte de découvrir tout ce qui nous attend.
L'histoire se veut assez pertinente et intrigante, le tout s’imbrique admirablement bien malgré certaines facilités et éléments traités un peu rapidement, et le mélange de différents éléments qui n'auraient pas du se rencontrer fonctionne à merveille!
Le trait de Karasuma, immédiatement reconnaissable, convient parfaitement à cet univers, il parvient à respecter l’œuvre de Araki sans se trahir pour autant, et rien que ça, c'est un tour de force!
Ce spin off s'avère donc être une excellente surprise, qui ne s'adresse qu'aux connaisseurs de Jojo, mais qui les ravira à n'en pas douter!
Chronique 1 :
Depuis son lancement en 1986, le monument "Jojo's Bizarre Adventure" de Hirohiko Araki n'avait jamais eu droit à un véritable spin-off sous forme de série. Il y a certes les aventures de Rohan Kishibe dépeinte dans la série antholigues au nom du personnage ainsi que 'ouvrage "Rohan au Louvre", mais ces oeuvres restent de l'ordre du sporadique, et sont signées par le maître en personne.
C'est en 2021, comme pour célébrer la conclusion de la 8e partie du manga qu’est "Jojolion", que d'autres auteurs ont le loisir de s'exprimer sur Jojo, à travers des mangas dérivés. Si on retient l'histoire courte "Fujko no Kimyô na Shoseijutsu: Whitesnake no Gosan" de Shô Aimoto, l'auteur de Kemono Incident, c'est davantage le projet mené par Tasuku Karasumu (auteur de "No Guns Life") et Kôhei Kadono qui fait parler de lui. Nommé "Jojo no Kimyô na Bôken: Crazy D no Akuryô-teki Shitsuren", le manga présente l'originalité de se placer entre les parties 3 et 4, et de faire se rencontrer deux personnages que les fans n'auraient sans doute jamais vus se côtoyer, Hol Horse et Josuke Higashikata. Mis parce que Jojo a presque toujours présenté le destin inaliénable de manieurs de Stand qui s'attirent mutuellement, cette rencontre s'ancre dans l'esprit de la saga de Hirohiko Araki.
Sans trop de surprise, puisque l'éditeur nous a déjà proposé les opus autour de Rohan Kishibe, le manga en trois tomes paraît dès cette rentrée 2023 chez Delcourt/Tonkam, soit un bon moyen de patienter entre Jojolion et The Jojolands, les parties 8 et 9. Chez nous, c'est le tite "Jojo's Bizarre Adventure : Crazy D - Demonic Heartbreak" qui est choisi.
Dans cette histoire, retour en 1999, soit près de 10 ans après la mort définitive de Dio suite à son combat contre Jotaro Kujo. Au Caire, les manieurs de Stand encore en vie profitent de la libération de l'influence de Dio, parfois non sans mal. Hol Horse est appelé à l'aide par la mère du défunt propriétaire de Pet Shop, et pour cause : plusieurs volatiles se sont échappés, et c'est en mémoire de son fils qu'elle veut les retrouver. Pour une telle mission, le cowboy de l'Égypte se tourne vers Boingo, dont le pouvoir lui donnera une première piste. Le duo se met ainsi en route vers la ville de Morio, au Japon, où vit un certain Josuke Higashikata !
Sur place se trouve Ryoko, cousine de Kakyôin, qui cherche à en savoir plus sur le décès de celui qu'elle aimait comme un frère...
Créer une histoire originale, basée sur des personnages connus de Jojo, sans l'implication de Hirohiko Araki, tel est le challenge de la courte série qu'est Crazy D ! D'emblée, pour le fan de la saga, l'idée de voir se rencontrer Hol Horse et Josuke est assez dingue, mais alléchante. Plus encore, le récit promet de revenir sur des personnages vus dans la partie 3, et par conséquent parler de leurs devenirs respectifs, tout en revenant sur le cas de Kakyôin, tristement mort lors du combat final contre Dio. La question est de savoir si Kôhei Kadono et Tasuku Karasuma ont su s'approprier l'univers d'Araki, tant dans l'écriture que dans le dessin, et ce premier volume laisse de quoi se forger une première opinion.
Malgré un découpage de l'action parfois un tantinet confus, ces premiers chapitres plantent une trame plaisante et prometteuse, tant elle s'appuie sur l'affect du fan pour la saga. Qu'il s'agisse du spectre de Dio (a priori directement relié à l'antagoniste), la lignée de Kakyôin ou ce cher Josuke qui ne supporte pas qu'on critique sa coupe de cheveux, sans parler de certains Stand qui font leur retour, tout est fait pour que l'amoureux de Stardust Crusaders et Diamond is Unbreakable soit caressé dans le sent du poil. Une proposition qui marche plutôt bien, et qui permet de retrouver un Morio un peu moins intimiste, de par les catastrophes que provoque l'ennemi pour contrer les manieurs de Stand qui lui font face.
Globalement, le tout se suit avec plaisir, surtout grâce aux interactions entre personnages qui ne manquent pas de piment. Le fringuant Josuke et le charmeur Hol Horse forment un duo efficace, sans que les auteurs aient besoin de forcer forcer sur leurs caractères. C'est plus en ce qui concerne quelques légers gimmicks, telle que la chevelure de Josuke, qu'on sent une pointe d'excès dans la volonté de parler au fan, mais rien de trop appuyé cependant. Le tout est donc prometteur, dans l'intrigue notamment, puisqu'il y a de quoi se questionner sur les ambitions scénaristiques, que ce soit ce nouveau méchant qui fait écho à Dio dans certains de ses agissements, ou dans la quête de Ryoko qui pourrait s'imposer comme la vraie héroïne de l'histoire, tant elle en a le potentiel.
Visuellement, il est agréable de voir que Tasuku Karasuma ne cherche jamais à singer le style de Hirohiko Araki. Certes, il reprend ses designs de personnage de manière si fidèle qu'aucun des manieurs de la partie 3 n'ait vraiment changé en dix ans, mais la densité de son trait comme sa narration restent libérés et différents de ce à quoi nous sommes habitués sur Jojo. Sur le plan artistique c'est sans doute le mieux à faire, car à quoi bon proposer à un autre mangaka de dessiner du Jojo si c'est pour obtenir un ersatz du style d'Araki ? Une approche visuellement différente, donc, mais pas dénuée de charme !
Alors, le premier tome de Crazy D: Demon Heartbreak offre une agréable entrée en matière, par une intrigue qui repose sur de grosses facilités, mais qui a le mérite d'équilibrer le fan-service et l'intrigue prometteuse. En attendant les romans de la saga et, surtout, The Jojolands, on restera curieux de voir ce que le spin-off a à nous proposer sur ses deux derniers opus.
On gardera néanmoins quelques réserves sur le travail global des éditions Delcourt/Tonkam et leurs collaborateurs. Rien à redire sur la fabrication en elle-même, mais quelques lacunes du texte sont à noter. Outre des maladresses quand Ryoko s'adresse à Kakyôin, tantôt grand-frère tantôt cousin, le choix d'onomatopées pour traduire le célèbre "Dorarara" de Josuke et son Crazy Diamond auront de quoi horripiler le fan fidèle aux fameux cris de guerre des personnages de la saga. Une erreur qui provient certainement du changement de traducteur, puisque Fabien Nabhan officie pour la première fois sur Jojo, et par le manque d'indication fournie pour le texte français. Dans un monument tel que Jojo, une bible des termes semble indispensable.