Hitman - Les Coulisses du Manga Vol.12 : Critiques

En à peine quelques mois, Jeanne-Louise Michel, la nouvelle poulaine française de Kenzaki, s'est imposée en tête du Shônen Magazine grâce à sa série "La Pucelle d'Orléans", ce qui est forcément une première pour une artiste étrangère. Et tandis que les interviews et les chapitres s'enchaînent, Kenzaki prend bien conscience qu'il doit également permettre à la jeune mangaka-phénomène de souffler un peu, et c'est bien ce qu'il lui propose dans un tout début de volume assez léger, permettant d'enfin voir Jeanne-Louise sourire en plus de profiter de quelques-uns des plaisirs du pays qu'elle aime tant, pour un résultat la rendant un peu plus attachante... mais ce n'est pas pour autant que la jeune femme va mettre de côté ses rêves d'autrice, et la suite du tome va se charger de nous le rappeler !

En effet, voici que, suite à une demande de Pika Edition qui édite Jeanne-Louise et Tsubasa en France (ou quand, une nouvelle fois, la réalité croise la fiction), les deux autrices sont invitées en France pour la grande messe européenne de la culture nippone, Japan Expo, qui plus est accompagnées de Wakaba et de Furutaka en tant que seiyûs sur l'anime de Love Letter, et évidemment de leurs responsables. Et les réactions face à cette invitation sont bien différentes, entre une Jeanne-Louise ravie et ayant le sentiment de vivre un rêve éveillé en étant invité en tant que mangaka au salon qui a bercé sa jeunesse, et une Hikari qui, en n'étant pas encore aussi populaire qu'elle et en n'étant même pas le premier choix lors de l'invitation, a surtout le sentiment de n'être qu'un faire-valoir et stresse comme pas possible à l'idée de faire face à un vaste public. Concrètement, même s'il y a quelques petits détails lors de cette incursion dans Japan Expo (la place du salon en Europe, le petit côté "coulisses" d'événements comme les dédicaces et les conférences, ou même le fait que des auteurs hyper populaires au Japon - comme Katsuragi - ne le soient pas forcément dans d'autres pays) et qu'il y a toujours de quoi s'amuser envoyant Kouji Seo dessiner Mehdi Benrabah (le directeur éditorial de Pika Edition, pour rappel), il ne faut pas forcément s'attendre à une analyse très pointue: après 12 tomes, on a un peu renoncé à un côté "coulisses" vraiment détaillé, et il faut plutôt se dire que le mangaka exploite les grandes lignes de ces coulisses pour le bien de son histoire.

Reste que l'ensemble fonctionne assez bien ici, car au-delà des quelques pseudo rivalités amoureuses dont on se contrefiche tant elles n'ont aucune portée (tu es bien mignonne Wakaba, mais bon) et des petites notes d'humour tantôt sympathiques (le retour de bâton sur la pauvre "Détective Furutaka" est assez amusant, l'auteur n'en faisant pas trop dessus cette fois) tantôt moins inspirées, quelque chose s'enclenche bel et bien entre Jeanne-Louise et Tsubasa, comme une sorte de rivalité pour savoir qui arrivera à réellement détrôner LE grand rival: Masato Katsuragi, le père de notre héroïne et numéro du magazine depuis 20 ans. Il faut dire que, pour accentuer cette rivalité, Kouji Seo joue assez bien son coup, les deux jeunes femmes se stimulant clairement à leur manière, et l'auteur présentant efficacement leurs traits de caractère, entre une Jeanne-Louise qui s'affirme en voyant Tsubasa déterminée, et une Tsubasa justement plus déterminée que jamais en se remémorant toute la souffrance due à son père dans son enfance, lui qui délaissait totalement sa famille au profit de son travail. Mais précisément, jusqu'où pourra aller cette détermination ?

C'est la question qui est posée dans la dernière partie du volume, suite à un rebondissement potentiellement tragique qui, derrière son premier abord totalement cliché au point que cela aurait pu exaspérer, révèlera en réalité une pirouette parodique sympathique de la part de Kouji Seo. Les enjeux face à cet événement sont importants pour les jeunes mangakas: que faire face à celui-ci ? Faut-il continuer de prioriser leur manga avant tout au risque de paraître inhumaine ? Voire y a-t-il possibilité d'exploiter ces événements pour rendre leur oeuvre encore plus intense ? Même si une nouvelle fois l'auteur reste en surface, il a au moins le mérite d'aborder un peu cette possibilité qu'ont les artistes d'utiliser des moments de leur vie. Alors que fera Tsubasa ? Par passion et désir d'intensité, suivra-t-elle une voie qu'elle a tant aïe chez son père, lui qui a autrefois mis en scène la maladie de son épouse dans un manga ? Et d'ailleurs, en faisant ça, que pouvait réellement ressentir Katsuragi ? Enfin, les conséquences de ce passage sont également assez sympathiques dans la consolidation du couple phare de la série, Kenzaki et Takanashi s'étant décidément bien trouvés.

Difficile de croire que Hitman - Les coulisses du manga s'achèvera dans seulement un petit tome, et pourtant ce sera le cas. En attendant de découvrir ça, Kouji Seo nous propose un volume sympathique dans l'ensemble, toujours un peu trop lisse sur l'aspect "coulisses du manga", mais globalement bien rythmé et assez fort dans ses enjeux principaux.