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Heartless : Critiques

Heartless

Critique du volume manga

Publiée le Jeudi, 03 Octobre 2019

Quelque part dans notre monde contemporain vit, à l'écart de tout, en pleine forêt, un bien étrange couple. L'un, humain, se nomme Manuel, et semble éperdument amoureux et à la botte du deuxième dont il l'est l'amant. Le deuxième, justement, n'est autre qu'un démon, et plus précisément un magnifique succube, dont la beauté est telle qu'il n'a aucun mal à séduire ses proies humaines pour mieux leur ôter la vie et s'en nourrir. Pourtant, Manuel semble un cas à part pour lui, puisqu'il vit avec lui et ne le tue pas. C'est ainsi que ces deux êtres vivent au jour le jour, dans un quotidien plus ou moins paisible, entre passion, sexe et mort. Mais ce quotidien est voué à être brisé quand débarque une unité de chasseurs de démons, bien décidés à éliminer le succube et son amant pour des raisons peut-être encore plus compliquées que prévu, tout ceci étant voué à réveiller de vieilles et horribles vérités du passé...

Jusque-là extrêmement rare dans nos contrées, le boy's love horrifique s'est offert, coup sur coup, deux représentants de choix en langue française en juillet dernier. Tandis que les éditions Taifu Comics nous ont fait découvrir MADK, du côté de la collection Hana on a accueilli Hertless. Prépublié au Japon dans le magazine Opera des éditions Akaneshinsha en 2017-2018, ce récit en 6 chapitres et un peu plus de 210 pages a reçu le prix du 13ème meilleur scénario aux Chill Chill BL awards 2019. Il s'agit de la toute première oeuvre reliée de Masumi Nishin, une artiste qui a débuté en 2013 avec des histoires courtes souvent sombres et dans des registres différents (par exemple, son histoire "Host is Down" est un yaoi qui fait dans la science-fiction).

Sombre, Heartless l'est, justement, on le comprend assez vite avec la nature démoniaque du succube, sa façon d'arracher des coeurs humains dont il se délecte, sa relation étrange avec Manuel, l'irruption de chasseurs de démons qui ne font clairement pas dans la dentelle... Il convient donc de signaler que l'oeuvre est un poil gore par moments, en plus d'être totalement non-censurée dans les scènes de sexe parfois un peu brutales. Rien d'insurmontable, mais soyez bien prévenus: le récit et bel et bien déconseillé aux moins de 18 ans de par certaines images-chocs. Mais évidemment, tout ceci n'est pas gratuit, car l'autrice a à coeur de travailler une atmosphère sombre, à mi-chemin entre l'horrifique et le surnaturel, et bien souvent assez fascinante et immersive grâce à un gros travail visuel. Le succube a un design sublime et envoûtant, avec de grande ailes finement travaillées et une allure quelque peu androgyne qui a effectivement de quoi attirer les gens à lui. Mais les personnages humains, Manuel en tête, ne sont pas en reste et ont tous une allure recherchée et bien différente. Les décors sont souvent présents pour entretenir l'immersion et accentuer quelques visions d'horreur, les trames et l'encrage sont bien au rendez-vous quand il s'agit d'accentuer l'ambiance tantôt sombre tantôt fascinante... S'il faut chipoter, on peut souligner quelques rares raccourcis dans le découpage et des expressions qui peuvent parfois paraître trop lisses, mais concrètement c'est l'excellent travail, surtout pour une première série.

Côté histoire, on semble d'abord suivre un récit on ne peut plus classique de lutte entre le couple-vedette et les chasseurs de démons, mais plus on avance et plus Masumi Nishin saura révéler quelques surprises et, surtout, pas mal de nuances chez ses différents personnages. Cela concerne évidemment le succube et Manuel dont le lien perdure depuis finalement longtemps, mais aussi certains chasseurs, en particulier Patrick, qui a un lien avec Manuel et qui est amené à s'interroger toujours plus sur le bien fondé de sa mission en voyant à quel point son père, le leader des chasseurs, est peut-être un humain pire que le démon... Tandis que pas mal d'éléments du passé se dévoilent, chacun des deux camps a alors le mérite d'être assez nuancé ou, en tout cas, beaucoup plus ambigu que prévu. Quasiment personne n'est tout blanc ou tout noir dans ce récit un peu désespéré et cruel, sans doute est-ce là l'une des réussites de cette histoire.

Reste la fin un peu rapide, assez ouverte pour laisser imaginer une suite à ces aventures, mais concluant néanmoins juste ce qu'il faut pour ne pas trop frustrer. En revanche, dommage que la mangaka ne nous offre aucune postface, ce qui aurait pu être très intéressant dans le cas présent.

Servi dans une belle édition (papier épais, souple et sans transparence, bonne impression, premières pages en couleurs, traduction claire d'Aline Kukor...), Heartless se pose donc comme une réussite, dans un registre de boy's love que l'on a très peu l'habitude voir en France. Le pari est gagné pour la collection Hana !
  

Critique 1 : L'avis du chroniqueur
Koiwai
16.75 20
Note de la rédaction
Note des lecteurs