Critique du volume manga

Publiée le Mardi, 21 Octobre 2025

Au sein du CHUS, le Centre Hospitalier Universitaire Shukokan, l'Ichi collégienne tombe nez à nez sur la personne que l'Ichi trentenaire et Masaki cherchent à retrouver: Enami Edo, qui affirme auprès de la jeune fille de surprenantes choses: voici 15 années qu'elle serait recluse dans cet hôpital et qu'elle aurait perdu tout souvenir de sa scolarité, ce qui lui vaut de rester constamment sous surveillance. Et pourtant, discrètement, la jeune femme lance à l'adolescente ce qui ressemble à un appel à l'aide...

Pendant ce temps, l'Ichi adulte et Masaki ont enfin obtenu la certitude qu'Enami est retenue dans le fameux hôpital associé au groupe scolaire Shukokan, mais sont désormais face à un mur ? S'ils veulent la sauver, comment l'approcher, au vu de la surveillance stricte de l'établissement ? C'est là que notre héroïne va recevoir deux aides précieuses. Tout d'abord celle de Miyuki, l'amie si libre de l'Ichi adolescente au collège, qui affirme surtout vouloir assouvir là sa propre curiosité. Puis surtout celle de Taro Azuru, ancien partenaire de gene bride d'Enami et ex tortionnaire de Masaki à l'époque du collège, garçon de bonne famille autrefois "ennemi" de nos deux personnages principaux et qui, aujourd'hui, semble avoir totalement changé en tentant de percer en politique pour défendre l'égalité des genres et lutter contre le brouillard...

De fil en aiguille, les avancées d'Ichi et de Masaki pour atteindre la captive Enami se font suffisamment bien, jusqu'à même nous laisser sur un très fort suspense dans des dernières pages imprévisibles et suffocantes, au bout desquelles il est très difficile de prévoir quelle sera l'issue de cette histoire de science-fiction dystopique dans le quatrième et dernier volume. Mais si l'oeuvre reste, ainsi, déjà suffisamment addictive rien qu'avec ça, c'est pourtant à nouveau dans tous les à-côté que l'autrice développe que son manga continue de nous fasciner et, surtout, de nous remuer.

Ainsi, bien sûr, il est d'abord question de nouvelles révélations impactantes sur l'école Shukokan, sur ses ambitions, sur les élèves internes, sur la discrimination envers les élèves externes et sur le concept de "designer's baby", tous ces éléments ayant encore bien des aspects critiques à révéler sur le contrôle exercé sur ces vies et sur le sort réservé aux personne n'entrant pas dans le moule "parfait" voulu par le centre de recherches.

Mais c'est peut-être plus encore à travers l'écriture de ses personnages en eux-mêmes que Hitomi Takano brille, en particulier dans la place que Miyuki et Azuru vont prendre auprès du duo principal, et plus encore dans l'approfondissement personnel de ces deux figures qui véhiculent beaucoup de choses. Ainsi entrevoit-on l'effroyable climat familial malsain et toxique dans lequel évolue Miyuki, menacée par les agissements insidieux de Hayato sans pouvoir vraiment se raccrocher à la protection de sa mère et en expliquant sûrement beaucoup sa soif de liberté: tout ceci rappelle avec force que les agressions sexuelles, quelles que soient leurs formes, ne doivent jamais être minimisées et sont très loin de se limiter à l'acte physique direct. Quant à Azuru, dont la sincérité dans sa lutte politique pourrait être remise en cause au vu de son comportement quand il était adolescent, il se révèlera très intéressant dès lors que l'on découvrira, là aussi, son contexte familial délicat, la pression parentale qu'il a subie, la recherche de reconnaissance qui en a découlé avec toutes les erreurs possibles (le côté très hautain, les brimades envers Masaku, la trahison envers Enami)... Et s'il n'est évidemment pas question pour Ichi et Masaku de lui pardonner si facilement, sa quête de rédemption a de quoi être inspirante et véhicule des choses appréciables pour oser se sortir de la masculinité toxique.

A l'arrivée, Gene Bride reste décidément une lecture riche, forte et captivante, car sans avoir besoin de traîner en longueur, et à grand renfort d'une écriture très juste, l'autrice sait toujours exploiter son récit de science-fiction pour poser en réalité un regard avisé et acerbe sur nos sociétés contemporaines.


Critique 1 : L'avis du chroniqueur
Koiwai
16.5 20
Note de la rédaction