Freesia Vol.2 : Critiques

Alors que la rougeur laissée sur notre joue par la grosse claque que fut le premier tome de Freesia vient à peine de s'atténuer, voila le second volume prêt à en remettre une couche ! Ce dernier se veut dans la droite lignée de son prédécesseur, à savoir particulièrement glauque, sordide, et malsain.

On avait laissé Hiroshi dans une situation inattendue, et sa réaction face à Higuchi l'est d'ailleurs tout autant. Ensuite, voila qu'un scandale éclate et fait la une des journaux: L'exécution d'une vengeance a provoqué la mort d'une innocente jeune fille qui se trouvait au mauvais endroit au mauvais moment. Pendant ce temps, l'agence où travaille Hiroshi est chargée de mener à bien un contrat. Seulement, le protecteur de la cible n'est autre que le "fantôme", personnage énigmatique qui semble posséder les mêmes facultés que notre héros. Les voila engagés dans un duel à mort à l'issue plus incertaine que jamais !

Autant le préciser directement, si vous avez été rebuté par l'aspect dérangeant du titre, vous pouvez abandonner directement l'idée d'aller plus loin. Dès les premières pages, le ton est donné, et l'ambiance se veut toujours aussi insoutenable. Mais là où on aurait pu croire que l'auteur allait trop en faire et tomber dans le crasseux limite pervers gratuit, on se rend finalement compte qu'il s'arrête juste à temps pour se reconcentrer sur son récit et son scenario. Il en profite notamment pour développer tout au long du tome le "dispositif spécial". Celui-ci consiste à vider entièrement une zone donnée et à faire s'affronter les exécuteurs et la cible accompagné de ses protecteurs à l'intérieur de celle-ci, le tout étant supervisé par l'armée. Il se trouve que dans le cas présent c'est un village à l'abandon et une forêt qui seront les fers de lance du terrain de jeu. De quoi nous offrir un affrontement dantesque entre le fantôme et Hiroshi, mais nous y reviendront un peu plus tard.

Car avant ce duel, pas mal de choses se passent. Notamment chez Hiroshi. Même si il n'en laisse rien paraitre face à Higuchi, il est encore plus perturbé qu'en temps normal depuis qu'il sait qui elle est. Ses facultés sont diminuées, il est victime de davantage d'hallucinations,... Bref, il n'est plus la machine à tuer invincible qu'il était.
Et Matsumoto confirme dans le même temps qu'il peut se montrer très doué au niveau de la mise en scène. Que ce soit lors de la mort malheureuse de la collégienne durant une exécution, où lorsqu'il s'agit de rendre Higuchi plus flippante et intrigante que jamais. Tout est mis en place pour nous plonger de la meilleure des manières dans ce monde définitivement privé de la moindre lueur d'espoir, et certaines scènes pourraient bien vous glacer le sang. L'auteur continue de nous livrer un portrait détaillé et réaliste de la société qu'il a façonné, sans pour autant oublier d'émettre de nombreuses critiques envers celle-ci, que l'on peut bien évidemment transposer à notre société contemporaine.

Mais le point d'orgue de ce second volume se situe bien entendu au niveau de l'affrontement entre Hiroshi et le fantôme. Bien évidemment, le fait que cela se passe dans une forêt sombre, moite et épaisse nous donne déjà l'eau a la bouche. Mais quand en plus on a droit à un duel psychologique de haut vol entre ces deux personnages tout aussi dérangés l'un que l'autre, doublé d'une narration superbement maitrisée et d'un dessin qui convient plus que jamais aux évènements, il y a de quoi rêver. Même si le terme ne convient sans doute pas à une œuvre telle que Freesia. D'autant plus que si à d'autres moments la patte graphique de l'auteur se montre brouillonne, il n'en est rien ici. L'action est parfaitement claire et le trait précis. Et comme si ça ne suffisait pas, voila que Mizoguchi est bien décidé à ajouter son grain de sel au duel...

Série définitivement à part, Freesia s'impose en tout cas comme l'une des plus marquantes sorties de ces derniers mois. On aimera ou on détestera mais, une chose est sûre, le talent de Jiro Matsumoto est bien réel et la série gagne à la fois en intérêt et en profondeur avec ce second tome.

Shaedhen