Été vers l'inconnu avec toi (Un) Vol.3 : Critiques

Kimi to Shiranai Natsu ni Naru

Critique du volume manga

Publiée le Lundi, 03 Mars 2025

Afin de pouvoir concrétiser son rêve de vivre sur l’île avec Haru, Hino doit se rendre à l’évidence : c’est uniquement avec son diplôme en poche qu’elle pourra trouver un travail, aussi elle décide de partir achever ses études. Surprenant l’appel de sa petite amie avec l’administration scolaire, Haru tombe de haut. Rien ne semble se dérouler comme prévu, la réalité rattrape les deux jeunes femmes, et seule leur combativité leur permettra d’exaucer leurs rêves…

Depuis sont premier volume, le récit de Keyyang abordait les impératifs rigoureux de la société en opposition avec les deux héroïnes, Haru et Hino, qui rêvent de liberté et ressentent le besoin de s’évader de cette société étouffante pour mieux vivre leur amour. Un plot de départ qui a permis un début de série agréable grâce au dépaysement qu’il procure en plus de son aspect feel good digne d’une fougue d’adolescentes (ou, ici, de jeunes adultes qui veulent croquer le grand amour). Il était donc intéressant de voir de quelle manière le mangaka comptait traiter cette thématique dans la conclusion de son œuvre, et force est de constater que le dernier opus qu’il nous propose est aussi déroutant que doux-amer.

Fini donc les jolies ballades pleines de bons sentiments et le charme estival de cette petite île. Ce tome final sonne comme un retour à la réalité fracassant pour les deux héroïnes, ce qui traduit un message particulièrement cynique de l’œuvre. Malheureusement, impossible d’échapper aux codes que nous impose la société, et les deux protagonistes en font les frais, quitte à voir voler leurs rêves en éclat. Plutôt que d’achever son manga comme une belle fable amoureuse, Keyyang choisit une forme de réalisme qui plaira ou non, mais qui a pour mérite d’être une prise de risque dans une œuvre romantique, et d’apporter une ambiance bien loin de celle qu’on imaginait au départ pour le fin mot de l’histoire.

Outre le message, le parti-pris de cet ultime tome amène une lecture douloureuse. Notre attachement envers Haru et Hino est déjà forgé, chose dont l’auteur avait peut-être conscience pour mieux nous infliger une désillusion à nous aussi. Ces derniers chapitres sont durs moralement tant ils entretiennent une infime lueur d’espoir jusqu’au bout, avant de mieux la balayer à chaque fois. Le portrait que dresse Keyyang de la société japonaise par le regard d’un couple de jeunes femmes, mais aussi de deux jeunes adultes qui cherchent tant bien que mal à s’intégrer et exister, et d’une amertume forte. Paradoxalement, c’est aussi ce qui fait le charme de cette fin, son absence de compromis et sa manière de briser totalement le rêve que plantait le premier tome.

Alors, que reste-t-il à Haru et Hino ? Leur amour, et leur corps. Pour Keyyang qui profitait surtout des quelques pages bonus des deux premiers tomes pour développer des moments plus intimes et érotiques, la conclusion est l’occasion d’insérer des scènes plus explicites au cœur même du récit. Une orientation qui a néanmoins un sens puisque c’est en s’abandonnant l’une à l’autre que les deux jeunes femmes trouvent le moyen de se raccrocher à la vie. Alors, le sexe ne devient pas forcément aguicheur, mais revêt une forme de catharsis pour pallier au cri de désespoir. Et ça, c’est une autre optique très bien vue de la part de l’artiste.

Déroutant, douloureux, amer, cynique… Les qualificatifs ne manquent pas pour cette fin qui n’était certainement pas celle à laquelle nous pensions en ouvrant le premier tome de la série, mais qui a pour mérite son audace, son ambiance mélancolique joliment maîtrisée, et le développement poignant de ses deux héroïnes. On espère clairement retrouver Keyyang dans nos librairies ultérieurement tant l’auteur a su prouver qu’il sait développer des romances avec une véritable optique d’écriture, quitte à prendre des risques et à déplaire à une part de son lectorat.


Critique 1 : L'avis du chroniqueur
Takato
16 20
Note de la rédaction
Note des lecteurs