Critique du volume manga
Publiée le Mercredi, 29 Mars 2023
Petite-fille de la directrice de l'académie, élevée dans un véritable cocon afin de devenir un modèle pour toutes les élèves, Hoshimiya s'est extirpée de son étouffante condition en commettant ce qui semblait impensable pour nombre des adolescentes de l'école: couper sa logue chevelure, avant de disparaître. Une scène bouleversante pour ses camarades, et peut-être plus encore pour Hana Saeki avec qui Hoshimiya avait fait la promesse de s'enfuir ensemble...
Si les deux premiers volumes étaient particulièrement ravissants dans la fine peinture des héroïnes et dans l'élégance folle du style visuel de Yuriko Hara, ils nous faisaient également sentir bien souvent à quel point l'académie Hoshimiya pouvait être étouffante pour celle ne parvenant pas à rentrer totalement dans son moule, à accepter ses traditions. C'est en particulier Hoshimiya elle-même qui, avec son aura de mystère (rappelons que l'on n'a jamais vu son visage dans la série pour l'instant) et son côté rebelle, intriguait beaucoup. Et c'est donc forcément par son intermédiaire que le quotidien et les faux semblants de l'académie se retrouvent troublées, dès lors que cette fille disparaît après s'être coupé les cheveux, ces cheveux censés être le bien le plus précieux des élèves.
Il va donc de soi qu'il s'agit d'un bouleversement important dans le petit univers à-part de l'académie, qui voit ses fondements remis en cause par un acte, jusqu'à peut-être enfin réveiller ce qui restait enfoui chez certaines adolescentes, à commencer par Hana. Face à la fuite de celle qui représentait tant pour elle, de celle avec qui elle devait partir selon leur promesse, celle-ci s'absente de l'école, fait enfin le point sur le rôle qu'elle joue depuis toujours et qui ne lui convient finalement pas: celui du "prince charmant" par excellence. Ce rôle qu'elle se contente de jouer parce que tout le monde veut la voir ainsi, alors qu'elle-même ne voulait être le prince charmant que d'une seule personne. Et par la force des choses, c'est ensuite Yôko qui, en voyant celle qu'elle admire tant s'éloigner d'elle et de l'académie, fait à son tour le point sur son sentiment d'avoir échoué à Hoshimiya au point de s'effacer, de n'avoir jamais su bien se faire comprendre dans ses relations avec les autres (l'occasion de ressasser le souvenir d'une amitié du collège). Osera-t-elle alors enfin changer de ton, affirmer ce qu'elle souhaite ?
On suit ce troisième volume avec beaucoup d'intérêt, tant il est important pour l'émancipation de nos héroïnes, une émancipation longtemps mise à mal par l'image que les autres se font d'elles et par les traditions de l'académie auxquelles elle ne se sont, dans le fond, jamais faites, en préférant alors jouer un rôle ou s'effacer. Et pour accompagner cet enivrant récit, on peut toujours compter sur les nombreuses symboliques proposées par la mangaka autour des cheveux et des liens (liens qui unissent, ou liens qui retiennent prisonnière), ainsi que sur son travail visuel d'une élégance rare entre les silhouettes fines, les longues chevelures ondoyantes, les nombreux jeux d'ombre et de lumière, les plans millimétrés (à l'image de la page où Yôko téléphone à Hana avec, dehors, la vue sur la fenêtre de Hoshimiya qui domine la situation, pour bien faire sentir que, même quand elle n'est plus là, la petite-fille rebelle de la directrice continue d'exercer une emprise), les diagonales calculées (comme lors de cette double-page où Yôko se relève seule dans sa fuite alors que deux filles venaient l'aider, une scène où les trois silhouettes féminines sont finement alignées de bas en haut)... Un régal visuel de chaque instant, tout simplement.