Critique du volume manga
Publiée le Mardi, 27 Avril 2021
Un virus mortel est à l'origine de l'extinction d'une grande partie de l'humanité. Son origine demeure floue, et des survivants poursuivent toujours leurs recherches à leur sujet. Mais loin de ces fragments de civilisation qui subsistent vivent Enoa et Hannah, deux adolescents qui profitent de leur existence dans leur coin de paradis, leur « eden », en compagnie de Lane, un chercheur de plus en plus rongé par la maladie. Immunisés de naissance contre le virus, les deux adolescents ne craignent pas celui-ci, ce qui ne leur enlève pas leur infaillibilité humaine. Leur tranquille train de vie prend fin le jour où l'une des factions restantes retrouve leur trace, des retrouvailles qui symboliseront la fin de la tranquillité des deux jeunes gens...
Mangaka apprécié chez nous, Hiroki Endô fut représenté la dernière fois avec Soft Metal Vampire aux éditions Casterman. Malheureusement, le reste de son œuvre n'était plus disponible, du moins jusqu'à avril 2021. Car auparavant, chez Panini, ses recueils de nouvelles furent passés en arrêt de commercialisation, All Rounder Meguru stoppé après trois tomes, et Eden évincé lui aussi, bien que sa parution fut initialement menée à terme. Néanmoins, ce dernier titre est remis en avant, et de belle manière via une réédition en grand format et en tomes doubles. Initialement paru chez l'éditeur entre 2003 et 2009 sous son format classique de 18 volumes, Eden profite d'une seconde jeunesse avec cette « perfect edition », prévue sur 9 volumes et dont la forme correspond à celle de la nouvelle mouture de Banana Fish. Un beau programme pour un titre dont le retour était demandé, et dont les débuts s'avèrent passionnants.
La parution originale d'Eden remonte à la fin des années 90. Le titre est lancé en 1998 dans la revue Afternoon de l'éditeur Kôdansha, et s'arrête en 2008 avec son dernier tome. A ce jour, il n'existe pas d'édition dite « kanzenban » (l'équivalent du terme deluxe chez nous), faisant de cette version un grand format inédit à nos contrées.
Sur une découverte actuelle, Eden ne séduit pas forcément sur son contexte. Un virus a mené à un monde délabré (le timing de la réédition étant alors assez ironique), aussi le climat post-apo n'est plus une nouveauté en 2021. Pourtant, quelque chose se dégage immédiatement du titre : Sa patte visuelle. De son avoeu, Hiroki Endô est un artiste largement influencé par l'oeuvre de Katsuhiro Otomo, ce qui se ressent d'emblée dans un premier volume qui croque merveilleusement ce monde détruit où les environnements abandonnés s'opposent à nombre d'éléments urbains et mécaniques, tandis que l'action explosive croissante renvoit aussi à Akira, notamment. Sur le plan visuel pur, il ne faut pas plus de quelques pages pour que le début d'Eden nous convainc, aussi les planches colorisées apportent d'entrée de jeu un spectacle contemplatif saisissant... mais aussi paradoxal étant donné que la suite de l’œuvre s'éloigne de cette atmosphère posée et mélancolique.
Véritable amorce, le premier chapitre d'Eden est cible du synopsis évoqué plus haut, tandis que la suite de l'histoire opère une véritable rupture. Un épisode initial qui pourrait presque se suffir en tant qu'histoire courte tant elle propose un certain nombre de rebondissements et une sorte de conclusion, ce qui nous pousse rapidement à nous questionner sur « l'après » de ces événements. La véritable aventure commencera des années plus tard, dans un cadre tellement différent qu'on assimile encore difficilement les liens entre le premier chapitre et la suite si ce n'est quelques liaisons de personnages, et les destins d'Enoa et Hannah qui pourraient prendre plus d'envergure par la suite.
La véritable intrigue semble être celle de ce garçon dont l'identité constituera une certaine source de curiosité. Il n'est pas n'importe qui, notamment parce qu'il est accompagné par le robot Cherubim présenté dans le chapitre amorce, et la vérité à son sujet se décantera au même rythme que ses pérégrinations et ses rencontres qui le propulseront dans un véritable conflit entre survivants du monde. Le récit s'enrichit dès lors d'une belle poignée de personnages, chacun ayant quelque chose à dire en terme de thématiques, ou un traitement narratif qui le concernera tôt ou tard. Les propos d'Eden sont multiples, mais il y a bien un qui prend une place très importantes dans ce double opus : L'humain, et son rapport à la religion. A ce titre, Hiroki Endô ne prend aucune pincette, remettant les différentes croyances souvent en question pour mieux dénoncer les actions de l'Homme, ce qui entre alors en résonance avec l'état de cet univers fictif. Les échanges à ce sujet sont souvent pessimistes, mais contrastent avec des personnages porteurs de lueurs d'espoir, tandis que tous ne condamnent pas fermement la Religion et nuancent le discours de l'auteur. On sent que l'auteur a énormément de choses à dire à ce sujet, ce que confirme la postface du volume, aussi brute qu'instructive quant aux intentions de l'artiste.
Eden nous le montre sur ce tome premier : La série phare de Hiroki Endô dégage quelque chose et fait office de balances entre influences marquées et œuvre personnelle d'un mangaka qui a clairement un discours à dépeindre, une aventure à narrer et des personnages à décortiquer. Un début immersif donc, qui va bien plus loin que le simple récit d'action en terre post-apocalyptique.
Côté édition, Panini offre une formule devenue standard pour l'éditeur : Un format grand et double pour donner lieu à une « perfect » inédite à nos contrées, à la manière de Banana Fish ou de la version double de 20th Century Fox, publiée quelques années avant la Deluxe. Par la fabrication souple via son papier fin mais proposant quelques planches couleur et une maquette soignée, l'éditeur propose un agréable objet pour le retour de la série. Signée Arnaud Takahashi, la traduction semble sans bémol tant elle retranscrit un propos cohérent, et donne une vie aux personnages de cet univers.
Mangaka apprécié chez nous, Hiroki Endô fut représenté la dernière fois avec Soft Metal Vampire aux éditions Casterman. Malheureusement, le reste de son œuvre n'était plus disponible, du moins jusqu'à avril 2021. Car auparavant, chez Panini, ses recueils de nouvelles furent passés en arrêt de commercialisation, All Rounder Meguru stoppé après trois tomes, et Eden évincé lui aussi, bien que sa parution fut initialement menée à terme. Néanmoins, ce dernier titre est remis en avant, et de belle manière via une réédition en grand format et en tomes doubles. Initialement paru chez l'éditeur entre 2003 et 2009 sous son format classique de 18 volumes, Eden profite d'une seconde jeunesse avec cette « perfect edition », prévue sur 9 volumes et dont la forme correspond à celle de la nouvelle mouture de Banana Fish. Un beau programme pour un titre dont le retour était demandé, et dont les débuts s'avèrent passionnants.
La parution originale d'Eden remonte à la fin des années 90. Le titre est lancé en 1998 dans la revue Afternoon de l'éditeur Kôdansha, et s'arrête en 2008 avec son dernier tome. A ce jour, il n'existe pas d'édition dite « kanzenban » (l'équivalent du terme deluxe chez nous), faisant de cette version un grand format inédit à nos contrées.
Sur une découverte actuelle, Eden ne séduit pas forcément sur son contexte. Un virus a mené à un monde délabré (le timing de la réédition étant alors assez ironique), aussi le climat post-apo n'est plus une nouveauté en 2021. Pourtant, quelque chose se dégage immédiatement du titre : Sa patte visuelle. De son avoeu, Hiroki Endô est un artiste largement influencé par l'oeuvre de Katsuhiro Otomo, ce qui se ressent d'emblée dans un premier volume qui croque merveilleusement ce monde détruit où les environnements abandonnés s'opposent à nombre d'éléments urbains et mécaniques, tandis que l'action explosive croissante renvoit aussi à Akira, notamment. Sur le plan visuel pur, il ne faut pas plus de quelques pages pour que le début d'Eden nous convainc, aussi les planches colorisées apportent d'entrée de jeu un spectacle contemplatif saisissant... mais aussi paradoxal étant donné que la suite de l’œuvre s'éloigne de cette atmosphère posée et mélancolique.
Véritable amorce, le premier chapitre d'Eden est cible du synopsis évoqué plus haut, tandis que la suite de l'histoire opère une véritable rupture. Un épisode initial qui pourrait presque se suffir en tant qu'histoire courte tant elle propose un certain nombre de rebondissements et une sorte de conclusion, ce qui nous pousse rapidement à nous questionner sur « l'après » de ces événements. La véritable aventure commencera des années plus tard, dans un cadre tellement différent qu'on assimile encore difficilement les liens entre le premier chapitre et la suite si ce n'est quelques liaisons de personnages, et les destins d'Enoa et Hannah qui pourraient prendre plus d'envergure par la suite.
La véritable intrigue semble être celle de ce garçon dont l'identité constituera une certaine source de curiosité. Il n'est pas n'importe qui, notamment parce qu'il est accompagné par le robot Cherubim présenté dans le chapitre amorce, et la vérité à son sujet se décantera au même rythme que ses pérégrinations et ses rencontres qui le propulseront dans un véritable conflit entre survivants du monde. Le récit s'enrichit dès lors d'une belle poignée de personnages, chacun ayant quelque chose à dire en terme de thématiques, ou un traitement narratif qui le concernera tôt ou tard. Les propos d'Eden sont multiples, mais il y a bien un qui prend une place très importantes dans ce double opus : L'humain, et son rapport à la religion. A ce titre, Hiroki Endô ne prend aucune pincette, remettant les différentes croyances souvent en question pour mieux dénoncer les actions de l'Homme, ce qui entre alors en résonance avec l'état de cet univers fictif. Les échanges à ce sujet sont souvent pessimistes, mais contrastent avec des personnages porteurs de lueurs d'espoir, tandis que tous ne condamnent pas fermement la Religion et nuancent le discours de l'auteur. On sent que l'auteur a énormément de choses à dire à ce sujet, ce que confirme la postface du volume, aussi brute qu'instructive quant aux intentions de l'artiste.
Eden nous le montre sur ce tome premier : La série phare de Hiroki Endô dégage quelque chose et fait office de balances entre influences marquées et œuvre personnelle d'un mangaka qui a clairement un discours à dépeindre, une aventure à narrer et des personnages à décortiquer. Un début immersif donc, qui va bien plus loin que le simple récit d'action en terre post-apocalyptique.
Côté édition, Panini offre une formule devenue standard pour l'éditeur : Un format grand et double pour donner lieu à une « perfect » inédite à nos contrées, à la manière de Banana Fish ou de la version double de 20th Century Fox, publiée quelques années avant la Deluxe. Par la fabrication souple via son papier fin mais proposant quelques planches couleur et une maquette soignée, l'éditeur propose un agréable objet pour le retour de la série. Signée Arnaud Takahashi, la traduction semble sans bémol tant elle retranscrit un propos cohérent, et donne une vie aux personnages de cet univers.