Dai Dark Vol.1 - Manga

Dai Dark Vol.1 : Critiques

Dai Dark

Critique du volume manga

Publiée le Vendredi, 18 Mars 2022

Dès 2003, seulement un an après son lancement au Japon, l'éditeur Végétal, ancêtre de Soleil Manga, nous invitait à découvrir une mangaka hors du commun avec ce qui reste à ce jour son oeuvre emblématique, Dorohedoro. La série fut loin, voire même très loin d'être immédiatement un succès dans notre pays, si bien qu'elle a connu quelques galères dans son rythme de parution. Mais l'éditeur, devenu Soleil Manga par la suite, a tâché de la mener à son terme, en tâchant de coller plus ou moins au rythme de publication nippon, et quitte à devoir augmenter le prix des tomes et faire des concessions sur certains effets des jaquettes en cours de route. Dorohedoro s'est ainsi finalement achevé dans notre pays en juin 2019, après 16 années de publication, non sans enfin acquérir (de façon largement méritée) une plus large notoriété, sans doute plus encore depuis l'arrivée d'une adaptation animée sur Netflix en 2020. Malgré les quelques déboires initiaux dans notre pays, Dorohedoro est ainsi devenu, au fil du temps, un manga culte, et son autrice Q Hayashida s'est largement imposée comme une "Reine du Chaos" à l'imagination débridée et à la richesse visuelle folle, avec son mélange comme aucun autre de designs dingues, de gore malsain ou d'humour tantôt très noir tantôt absurde et grotesque. Inutile de dire que l'on attendait avec une grande impatience le retour de l'autrice en France, et cela a enfin lieu en ce mois de mars avec l'arrivée, toujours chez Soleil Manga, de sa dernière série en date, Dai Dark. Pour cette oeuvre, la manga s'essaie pour la première fois au genre du shônen, avec une publication toujours en cours depuis 2019 dans le magazine Gessan de Shôgakukan, magazine ayant aussi accueilli les séries MIX et Quand Takagi me taquine, entre autres. mais rassurez-vous: ce n'est pas parce que la géniale autrice passe dans le genre du shônen qu'elle va mettre en berne son inventivité frénétique et son style unique.

Dai Dark nous plonge donc dans l'immensité du cosmos (tout un programme), auprès d'un jeune garçon qui, malgré ses bouilles parfois simplettes et insouciantes et son amour immodéré pour les spaghettis-boulettes, ne semble pas vraiment avoir la vie facile. Jugez vous-mêmes: ce cher Sanko Zaha est constamment mis en danger par les gens qu'il croise car ceux-ci, dès qu'ils le reconnaissent, veulent s'emparer de ses os, dont on dit qu'ils pourraient réaliser les voeux. Pour se sortir des situations délicates dans lesquelles il se retrouve régulièrement en différents recoins de l'univers, il peut heureusement compter sur Avakian, son fidèle sakadoh. Tout le monde possède un sakadoh pour se promener dans le cosmos, mais Avakian est effectivement un peu à part par rapport aux autres...

Ce pitch de départ, qui tient en quelques mots, est largement suffisant au départ pour que la mangaka nous immisce immédiatement dans un de ces nouveaux univers farfelus dont elle a le secret. Car dans les premiers chapitres, il est simplement question de voir le duo principal se promener ici et là, que ce soit dans le présent ou dans le passé (quand Zaha était enfant), jusqu'à se retrouve face à des malfrats qui en ont après les os du jeune garçon. La recette aurait pu vite être redondante, mais Hayashida est évidemment plus maligne que ça, essentiellement sur deux choses.

Tout d'abord, l'exploitation de sa patte unique, bien sûr: tout comme dans Dorohedoro, l'autrice se permet nombre de fantaisies qui passent autant par le mélanges de tonalités (le gore absurde et donc à la fois un peu malsain et rigolo, une marque de fabrique) que par la personnalité en apparence insouciante de Zaha (se balancer dans un trou noir ? Yoplà, on y va en toute gaieté) et, évidemment, par sa richesse visuelles. Hayashida nous offre son mélange typique de décors riches posant hyper bien l'ambiance, et de dégaines de personnages à l'inventivité grotesque inouïe, à l'image de cet écumeur de l'espace à trois têtes, des mini-seauliens (des petits bonshommes à tête de seau, ça ne s'invente pas), des professeurs photoleums, ou surtout de Death Delamort, monstre funeste dévorant les trépassés, personnification de la mort toutefois un peu capricieuse et avec qui Zaha a bon espoir de sympathiser (sisi).

Ensuite, les éléments de background qui se distillent petit à petit, car Hayashida ne se contente pas de nous balader gratuitement dans le cosmos. La mangaka, en filigranes, met bel et bien en place des lieux assez marquants (comme Obscura, le monde des ténèbres), des concepts (le sakadoh, la peau de ténèbres...), des personnages sans doute voués à être récurrents (Death Delamort, Box), et un objectif assez précis pour Zaha: découvrir ce qui l'a condamné à cette vie pénible, où les gens aimeraient amener ses os, et qui serait censé exaucer leurs souhaits avec. une piste à remonter afin de démolir l'instigateur de tout ça et redevenir pleinement libre.

A l'arrivée, dire que l'on prend son pied à la lecture est un euphémisme, tant toute la chaotique extravagance typique de Q Hayashida est là. Il ne reste plus qu'à attendre de voir le scénario se développer un peu plus, mais dans l'immédiat on a droit à un volume de mise en place réjouissant à souhait... hormis, peut-être, pour certains choix faits pour l'édition française. Car soyons honnête: 11,95€ pour une petite format seinen standard d'environ 200 pages, sérieusement ? Alors, certes, l'éditeur a pris soin de rester fidèle à l'édition japonaise en reprenant le concept de la jaquette en plastique transparent et imprimée, et en conservant les 10 pages en couleurs, mais ça ne peut pas suffire à justifier un tel prix, surtout au vu de la qualité de papier et d'impression qui reste standard pour du Soleil (c'est-à-dire ni excellent, ni mauvais). Peut-être l'éditeur a-t-il décidé d'anticiper le côté possiblement "de niche" de l'oeuvre, mais ça revient aussi à se fermer d'emblée à une partie du public (peu de chances que quelqu'un ne connaissant pas du tout Q Hayashida se laisse tenter, par curiosité, par un petit format aussi cher). A part ça, soulignons tout de même aussi le lettrage propre de Anne Demars, et la traduction franchement chouette de Sylvain Chollet, toujours claire, et dont la tonalité colle généralement bien au mélange d'ambiances de l'oeuvre (surtout pour le vocabulaire de Zaha reflétant souvent bien son côté insouciant quand il le faut).
  

Critique 1 : L'avis du chroniqueur
Koiwai
16 20
Note de la rédaction
Note des lecteurs