Critique du volume manga
Publiée le Mardi, 28 Juin 2022
Avec la complicité de Kazuma, le réprouvé que traque Ochô, une révolte des chrétiens du Japon est menée par Kintsube, prêtre souhaitant guider les siens vers la liberté de la foi, contre un shogunat qui ne tolère par ces adeptes. L'insurrection gagne en violence suite aux manigances de Kazuma qui prévoit une invasion totale du quartier de Yoshiwara, privé d'Ochô maintenant que celle-ci est détenue par Raizô, ce dernier ayant trahi les siens au nom de sa religion... Serait-ce la fin du quartier des plaisirs ?
Avec la deuxième partie de Butterfly Beast, Yuka Nagata a indéniablement gagné en maturité. Bien plus sombre, cette suite n'hésite pas à aller au-delà de la simple quête vengeresse pour développer des intrigues lourdes de sens. La plus captivante à ce jour est sans nuls doutes celle entamée dans l'opus précédent, narrant l'existence d'un cercle chrétiens que condamne le shogunat. Et bien entendu, pour donner de la force à cette trame, la menace de Kazuma ne pouvait être bien loin...
Dans son intégralité, le troisième tome de Butterfly Beast II achève ce récit, via un volume mené tambours battants où s’enchaînent les trahisons et retournements de situation, avec une intensité épatante tant on en arrive à douter du sort de certains personnages clés de la série. Tout s'enchaîne donc admirablement du côté de l'action, que ce soit par les batailles ou tout simplement par des décisions de personnages qui portent à elles seules le déroulé de cet arc qui nous scotche à notre siège.
Et au-delà de l'intensité, c'est tout ce que Yuka Nagate nous raconte autour de son casting qui vient conférer à ce troisième opus une force encore plus vive que dans les précédents opus. C'est notamment le cas de Raizô, personnage assez transparent au départ qui prend ici une plus grande dimension au point de devenir particulièrement touchant, tandis qu'Ochô reste passionnante à suivre de par la dualité des émotions qui la traverse. La chasseuse de réprouvés, tiraillée par ses sentiments, est plus démunie que jamais, et sans doute cet arc aura-t-il des conséquences sur son développement global.
Et tandis que l'intrigue liée aux chrétiens touche à son point final, une question nous traverse inéluctablement tout le long de la lecture : Quelle posture occupe le récit vis à vis de ces croyants qui habitaient le Japon durant le XVIIe siècle ? Au même titre que le shogunat, l'optique de Butterfly Beast II est-elle de les condamner ?
Si les chrétiens menés par le père Kintsube sont clairement identifiés comme des ennemis, tout le développement du tome couplé au point final proposé apportent bien des nuances. Au final, ce tome aura été celui d'une fatalité, celle d'une communauté habitée par la foi mais qui n'avait pas sa place au Japon, subissant les événements au point de parfois s'éloigner de leurs croyances. Aussi bien pour Ochô qui doit faire face à son passé que pour ces individus, dont Raizô, la série demeure particulièrement sombre et douloureuse, complétant habitant son portrait d'une époque parfois sinistres, et où les laissés pour compte s'avéraient nombreux.
Il en résulte un troisième volume (ou cinquième, si on considère la première série) prenant de bout en bout, aussi habile dans son action que dans son habilité à nuancer la fatalité des enjeux. Il ne reste plus que deux tomes avant la fin de la série, aussi on attend Yuka Nagate au tournant sur ses prochaines intrigues.