Bosse ou crève ! Vol.1 - Actualité manga
Bosse ou crève ! Vol.1 - Manga

Bosse ou crève ! Vol.1 : Critiques

Mushoku Kyôsei Shûyôjo

Critique du volume manga

Publiée le Mardi, 28 Mars 2023

Petit à petit, les éditions naBan étoffent leur catalogue de titres variés et qualitatifs, du classique du manga de SF qu'est Destination Terra à l'incontournable Give My Regards To Black Jack, qui nous secoue par son traitement de l'univers médical, en passant par des titres plus singuliers tels que Millenium Darling et son charme volontairement rétro. Le thriller a déjà été abordé par le jeune éditeur, avec l'effroyable 17 ans, adaptant un fait divers réel pour aboutir à un titre sombre et social percutant. Cette fois, c'est avec Bosse ou Crève ! que ce double registre est abordé.

Publié entre 2016 et 2018 aux éditions Futabasha, sous le titre original Mushoku Kyôsei Shûyôjo, le manga est l'œuvre conjointe d'Atsushi Kamakura et d'Akira Rei, nom de plume côté Japon du dessinateur coréen Ki Soryeong qui participa durant un temps à l'aventure de Solo Leveling, avant de quitter le navire pour certaines controverses.

Dans cette histoire, c'est un Japon fictif qui nous est présenté, un pays qui a accueilli la « loi de reprogrammation des inactifs ». Un titre barbare qui implique que toute personne n'ayant pas travaillé depuis 6 mois subit un lavage de cerveau, oubliant tout de sa vie d'autrefois, avant d'être façonnée comme un travailleur modèle de la société. Fort heureusement pour Tatsuya Kamijô, ses efforts acharnés font de lui un élément clé de sa société. Du moins, c'était le cas jusqu'à l'arrivée de Junya Takagi, véritable génie qui va causer la chute de Tatsuya, au point de provoquer son renvoi. Incapable de retrouver du travail, c'est la loi de reprogrammation des inactifs qui le guette. Résigné, c'est pourtant un tout autre sort qui l'attend, lorsqu'il est envoyé dans un camp de redressement, traitant d'une autre manière les individus qui n'ont pu retrouver un emploi...

Avec Bosse ou Crève, le binôme Kamakura/Rei nous propose un thriller aux élans horrifiques, et dont la dimension sociale a largement de quoi nous parler, à l'heure où la notion de « travail » dans nos existences est aux cœurs des débats politiques. Dans cette dystopie, c'est bien le travail qui régit l'existence des citoyens japonais, et quiconque n'ayant pas accompli son quota serait tout bonnement rebooté en tant qu'humain, ni plus ni moins. Dès lors, le lecteur comprend qu'il a affaire à une société froide et calculatrice, dans laquelle le Capitale est la plus grande valeur de tout humain, et que même un brillant employé comme Tatsuya, le héros, pourrait faire les frais des dérives liées à cette organisation. Après exposition du protagoniste et de sa brillante carrière, nous nous attendons forcément à la chute sociale du personnage, véritables prémices de son destin peu enviable, l'action se déportant ainsi (et c'est le cas de le dire) dans un véritable camp de concentration, voué à redresser les individus qui n'ont pas su briller au sein de la société.

C'est dès lors que le suspense et l'horreur prennent le pas sur le côté social, qui continue d'exister par ce qui est fait des détenus, déshumanisés, et réduits à un numéro de prisonnier. On assiste ainsi à la montée d'un thriller carcéral et malsain, dans lequel le mot d'ordre sera la survie pour Tatsuya et une poignée de personnages, tous différents, et constituants des anomalies dans ce centre de détention. Et c'est là que Bosse ou Crève parvient à nous piquer d'un intérêt supplémentaire, en dehors de son discours social et de son ambiance morbide : Par l'existence même de ces individus, une intrigue a priori plus dense se met en place, ne consistant par seulement en une potentielle évasion du groupe de héros, mais semblant cacher un plan plus vaste les concernant. Plusieurs éléments teasent cet ensemble plus important, nous rendant toujours plus curieux à l'idée de découvrir la suite de l'histoire. Ainsi, la parution simultanée des deux premiers opus par les éditions naBan, opération certes classique dans le lancement d'une série sur laquelle un éditeur compte, a du sens, et permettra de se faire un aperçu plus étoffé d'un manga qu'on ne pourrait résumer à son sensationnalisme et sa noirceur.

Car il ne faut pas nier que Bosse ou Crève à une démarche grand spectacle, de par quelques séquences volontairement violentes et ses scènes de sexe et de viol qui n'ont pas toujours grand intérêt, si ce n'est pousser plus loin le macabre et la surenchère des excès. Néanmoins, certains de ces aspects sont subtilement dosés, aussi la fameuse scène d'agression sexuelle n'a pas qu'une portée racoleuse, et sert à l'un des quelques mystères de la série.

Un point de départ intriguant pour Bosse ou Crève !, donc, dont on en attend sur le plan thématique comme pour l'intrigue, qui promet déjà des rebondissements.

Du côté de l'édition, naBan reste fidèle à lui-même, avec un ouvrage joliment conçu, que ce soit par son papier épais toujours aussi agréable, le lettrage solide de Florent Faguet, et la traduction sans fausse note signée Pierre Sarot.


Critique 1 : L'avis du chroniqueur
Takato
15 20
Note de la rédaction
Note des lecteurs