Atelier des sorciers (l') - Édition grimoire Vol.1 - Manga

Atelier des sorciers (l') - Édition grimoire Vol.1 : Critiques

Tongari Bôshi no Atelier

Critique du volume manga

Publiée le Vendredi, 07 Février 2025

Depuis son lancement dans nos contrées en 2018, le manga « L’atelier des sorciers » de Kamome Shirahama rencontre un franc succès, justifié aussi bien par le passionnant univers de fantasy onirique dans lequel nous invite l’artiste que par son trait si précis, fin et détaillé qui nous laisse en extase à chaque planche. Lors du démarrage de l’œuvre dans nos librairies, Pika avait mis les petits plats dans les grands en conviant la mangaka au Salon du Livre de Paris, en plus de lui réserver une petite, mais élégante, exposition à la librairie Bulles en tête. En ce début d’année 2025, Kamome Shirahama a de nouveau foulé le sol de l’Hexagone, mais cette fois dans des dimensions plus grandiloquentes puisqu’elle est à l’affiche du Festival International de la Bande Dessinée d’Angoulême où elle fut sujette à une exposition de plus grande envergure (à la file d’attente impressionnante équivalente à plusieurs heures de patiences), à des séances de dédicaces et à une masterclass. Un retour, donc, que l’éditeur n’a pas voulu négliger, bien au contraire. De nouvelles publications sont alors lancées, dont un artbook et une édition deluxe de la série intitulée « Édition grimoire ». Des confections totalement inédites à notre marché et qui honore tant l’œuvre que son autrice. Pour les fans, c’est l’occasion de profiter de versions plus chiadées du récit tandis que les nouveaux lecteurs aux budgets les plus confortables peuvent voir une nouvelle porte d’entrée vers l’univers de Kamome Shirahama. C’est donc une démarche très rare qui nous est offerte, les deluxe habituelles qui nous sont proposées étant toujours basées sur des conceptions nippones, à quelques rares exceptions près. Une création encore plus exceptionnelle que la série est toujours en cours, et qu’il est ainsi impossible de prédire le nombre d’ouvrages que contiendra cette version.

Dans un monde où la magie existe, mais n’est réservée qu’à une poignée d’élus ayant présenté les capacités adéquates à la naissance, la jeune Coco est passionnée par cet art mystique qui semble être un rêve à ses yeux. Lors Kieffrey, un sorcier, fait halte à la boutique de sa maman, Coco caresse de plus près ce rêve inaccessible. Alors qu’il est interdit pour le commun des mortels d’observer le lancement d’un sort, Coco passe outre cet interdit en espionnant le sorcier… et en découvrant l’étonnant secret derrière la magie : loin d’être impossible pour n’importe qui, elle émerge de dessins et de symboles qui doivent être rigoureusement représentés ! En voulant elle-même s’essayer à la pratique via un grimoire obtenu il y a des années, la jeune fille provoque un drame qui va bousculer sa destinée…

Les forces de « L’atelier des sorciers » sont multiples, et reposent aussi bien sur son scénario accrocheur, ses personnages attachants et la patte ô combien merveilleuse de Kamome Shirahama. Des qualités qui se remarquent dès ce premier opus de l’édition grimoire, équivalente aux deux premiers volets de la numérotation principale. On peut même dire que cette pagination plus dense est idéale pour se prolonger pleinement dans l’univers de la mangaka tant elle permet d’établir la phase d’introduction et de gratter des premières péripéties intéressantes par leurs intrigues, mais aussi par ce qu’elles disent de l’univers et des personnages. Car sur ce pavé de plus de 400 pages, c’est tout un ensemble qui vient nous captiver, que ce soit les secrets liés à l’immersion de Coco dans le monde de la sorcellerie, la quête que cherche à accomplir chacun des personnages, ainsi que l’Histoire avec un grand H qui rend un univers déjà vaste et promis à de grandes possibilités. Loin d’avancer à l’aveuglette, on sent déjà que l’autrice a une vision de son œuvre et de son monde. Peut-être même qu’elle est aussi transportée que nous tant ces premiers chapitres regorgent d’intérêt et ne se montrent jamais avares en tension, permettant une amorce qui ne reste jamais en surface et qui ne se satisfait pas d’une écriture sommaire.

Pour ces raisons, le charme opère tandis que les pages se tournent sans qu’on ait le temps de ressentir une quelconque redondance. Une prouesse qu’on peut estimer encore plus forte à l’heure où les mangas de fantasy liés à la magie ou à la sorcellerie sont légion, pouvant engendrer une forme de lassitude autour de ces sujets et de ces thèmes. Mais comme dit précédemment, l’art de Kamome Shirahama est aussi une composante qui permet de comprendre le succès de l’œuvre et qui entraîne son lecteur au cœur de l’univers. Un univers richement détaillé visuellement, auquel on croit et qui nous emporte comme il emporte Coco. Outre le cachet propre à la patte de l’artiste, le détail des cases donne une vraie richesse narrative, et le soin esthétique apporté aux différents éléments fantastiques de l’histoire les rend imposants et subjuguant. Les superlatifs ne manquent pas pour évoquer le dessin de Kamome Shirahama, et on imagine bien que nos éloges ne faibliront pas au fil du récit, tant on s’attend à ce que l’autrice affine encore son trait.

Mais ce qui fait le sel de cette édition, c’est aussi sa fabrication. « L’atelier des sorciers » sonnant comme une ode à l’imaginaire, avoir pensé une version deluxe sous forme de vieil ouvrage, via une couverture en similicuir ornée d’effets de dorure, est un petit coup de génie. Une idée suivie par la fabrication très qualitative, comme l’attestent les détails de cette même couverture ou le papier épais de très belle facture sélectionné. À ceci s’ajoute près de quarante pages qui jonglent entre les morceaux de documentaire dédiés à l’univers, un entretien avec Kamome Shirahama ou encore des pages couleur et illustrations venues des réseaux sociaux comme du Morning Two, le magazine de prépublication de la série. Tant de suppléments qui proviennent des guidebooks et artbooks des éditions limitées, soit un bon moyen pour rendre accessibles les contenus de ces ouvrages jusqu’ici réservés à une niche. Loin d’être de l’ordre du gadget, ces bonus enrichissent notre appréciation de l’univers et notre compréhension de celui-ci. Pourvu qu’il en soit de même pour les opus à venir !

Alors, si la mise en chantier d’une édition luxueuse d’une série encore en cours n’a pas manqué de faire jaser, force est de constater que l’édition grimoire de « L’atelier des sorciers » ne flaire pas uniquement l’opportunisme lié à la venue de Kamome Shirahama dans nos contrées. Ainsi, Pika propose un ouvrage réellement qualitatif qui a de quoi contenter les amateurs de belles éditions ainsi que les fans de l’œuvre qui aimeraient conserver celle-ci dans un écrin de prestige. Puisque cette version coexiste avec l’édition simple, il n’y a clairement pas de quoi bouder son plaisir. Avec un œil plus cynique, on pourrait même croire à une sorte de revanche de la part de l’éditeur, suite à la fabrication plus tiède et décriée des fameuses éditions Masterpiece.


Critique 1 : L'avis du chroniqueur
Takato
17 20
Note de la rédaction
Note des lecteurs