Critique du volume manga
Publiée le Mardi, 30 Août 2022
Jyanome est une mangaka que l'on a beaucoup aimée pour son oeuvre Twilight Outfocus ainsi que ses spin-off, si bien que l'on accueille toujours avec entrain la publication française d'un autre de ses récits. Et en juin dernier, c'est A fool's love song qui est venue enrichir le catalogue des éditions Hana. De son nom original Orokamono no Ai no Uta, ce récit a été initialement prépublié dans le courant de l'année 2017 au sein du magazine Opera des éditions Akaneshinsha et se compose de 7 chapitres. Il est ensuite paru dans son pays d'origine en un seul volume broché agrémenté d'un court chapitre bonus exclusif, pour un total d'environ 220 pages.
Ce nouveau récit nous immisce auprès du jeune Tomizô, chanteur dans le groupe de rock Les Choucas depuis déjà deux ans et demi. Tout ce temps s'est effectivement déjà écoulé depuis que, alors qu'il venait de lâcher le lycée et errait dans les rues sans le moindre but ni désir ni même estime de lui-même, il a été trouvé par Yachiyo, le guitariste du groupe, qui a été séduit par sa voix. Et pourtant, aujourd'hui, la situation qui l'a sauvé a un peu changé. Certes, le leader du groupe Ui est un homme sur qui on peut compter, le batteur Yoshi est positif et amusant, et Yachiyo est toujours là pour l'aider, mais il a le sentiment d'être incapable de quoi que ce soit tout seul, et ça ne s'arrange pas quand Yachiyo, qui s'est trouvé une copine depuis quelque temps, se montre un peu plus cassant qu'avant à son égard. Mais les choses risquent encore de changer pour Tomizô quand, alors qu'il est en route pour un concert, il se fait interpeller par une voyante lui affirmant qu'il rencontrera bientôt son âme soeur, mais qu'avant ça il devra passer par quelques épreuves.
A travers une narration passant essentiellement par Tomizô, Jyanome n'a aucune difficulté à rendre assez attachant ce jeune homme qui, depuis déjà quelques années, est un peu paumé voire franchement à l'ouest sur certaines choses. Et c'est bien ce côté "à l'ouest" qui lui vaut de se sentir incapable de quoi que ce soit et de se faire régulièrement pigeonner, la dernière en date à en avoir profité étant donc cette voyante. Tomizô semble pourtant croire dur comme fer à la rencontre prochaine de son âme soeur, à tel point qu'il serait prêt à tomber dans les bras de quiconque se montre intéressé par lui: un barman, son ancien professeur principal, l'ancien chanteur du groupe... Et forcément, cette lubie crée un décalage par rapport à son rôle au sein du groupe, au point de provoquer quelques petites tensions chez Yachiyo en particulier !
Concrètement, dans la première moitié du tome la mangaka joue à fond sur la crédulité de son héros, qui se retrouve à coucher avec des hommes ne recherchant qu'à baiser un coup tandis que lui cherche son âme soeur. Cela pourrait agacer un peu, d'autant que le schéma menace alors d'être redondant, mais fort heureusement l'autrice rebondit très vite et bien, tout d'abord en nous faisant bien sentir que l'apparente crédulité de Tomizô cache surtout un désir d'être enfin aimé voire "sauvé" par quelqu'un après avoir longtemps été paumé, puis en faisant évoluer les choses dans la deuxième moitié entre les prises de conscience de son héros et de Yachiyo, jusqu'à un final où l'un est enfin honnête envers lui-même tandis que l'autre trouve enfin la motivation d'avancer dans une direction claire, comme en témoigne son regard déterminé à la toute fin.
On regrettera peut-être de ne pas voir plus en avant les autres membres du groupe, ou même de ne pas assister un peu plus à l'aspect musical qui ne sert ici que de petite toile de fond. Néanmoins, A fool's love song reste une histoire très plaisante à parcourir, d'autant que les qualités visuelles de Jyanome sont toujours au rendez-vous.
Enfin, l'édition française est tout à fait satisfaisante entre une jolie jaquette restant fidèle à l'originale japonaise, une première page en couleurs sur papier glacé, un papier assez souple et bien épais permettant une bonne qualité d'impression, un lettrage propre, et une traduction soignée d'Angélique Mariet.