Métamorphose (la) - Actualité manga
Métamorphose (la) - Manga

Avis sur Métamorphose (la)

Henshin / Die Verwandlung

nolhane

De nolhane [6581 Pts], le 24 Avril 2020 à 17h56

16/20

La métamorphose est à l'origine un excellent livre de Franz Kafka à l'influence considérable.

Bargain Sakuraichi (également nommé Toshifumi Sakurai lorsqu'il signe certains titres moins sérieux) est l'auteur de Ladyboy VS Yakuzas et La virginité passé 30 ans. Deux œuvres extrêmes dans leur positionnement mais révélant une profondeur et des sujets particulièrement intéressants.

C'est donc avec un mélange de curiosité et de crainte que je me suis penché sur ce titre, me demandant comment il était possible d'adapter un livre aussi unique et puissant.

Mes craintes ce sont vite dissipés quand j'ai compris que l'auteur n'a pas réellement adapté l’œuvre originale mais en a proposé une nouvelle version. L'intrigue de départ est identique à celle du roman, le fils d'une bonne famille ne se lève pas pour aller à son travail alors qu'il est toujours à l'heure. Il se transforme peu à peu en cafard sans pouvoir contrôler son état. Si le roman d'origine se concentre sur le point de vue du fils, le mangaka choisis ici comme narrateur le père, un vieux retraité, fainéant qui compte sur son fils pour rembourser ses dettes tout en rêvant de sauter sur la jeune domestique.

Ainsi, le mangaka traite de manière pertinente des sujets récurrents dans son œuvre sans trahir l’histoire originale.

Le point de vue du père est intéressant dans ce qu'il révèle de la notion de père de famille. Celui qui dirige, commande et qui possède des droits sur sa famille était au 20ième siècle le père de famille (s'est encore trop souvent le cas..). Ici, le père compte sur sa fille obligé d’arrêter ses études et sur sa femme pour continuer à rembourser ses dettes alors qu'il garde précieusement de l'argent dans un coffre, espérant s'attirer les faveurs sexuelles de la domestique.

On comprends peu à peu comment le fils, emprisonné dans son devoir de faire vivre la famille s'est peu à peu transformé en cafard tant personne ou presque ne le regarde comme une entité doué de sentiment. Même sa sœur va peu à peu l'abandonner. En voyant les envies lubriques du père, son incapacité à penser aux autres et à faire vivre sa famille.. on se met à penser que c'est plutôt lui le cafard. D'autant plus quand il projette ses défauts et erreurs sur son fils sans le connaître vraiment.

Derrière un dessin souvent exagéré et absurde se cache une critique amère de la figure classique du père. Le dessin est par ailleurs excellent tant il soutient le coté absurde et glauque de l'histoire tout en amenant un aspect ridicule à l'ensemble. Le coté absurde et ridicule créant un humour noir des plus sordide. Le trait de Sakuraichi est extrêmement précis et recèle de détails lorsqu'il dessine des expressions sur les visages ou dans la reconstitution des vêtements et des rues de l'époque.

Bien sur il faut adhérer au trait assez particulier de l'auteur sinon la lecture peut être vite désagréable.

Doté d'une vraie puissance graphique et d'une narration efficace, la lecture de la version manga de La Métamorphose est une bonne surprise. On est bien sur loin de l'expérience de lecture du livre mais ce manga propose un nouveau point de vue très intéressant sur cette histoire encore pertinente aujourd'hui.

Une vraie bonne surprise et la confirmation d'un auteur à suivre de près.

 

(Vous pouvez bien sur lire ce manga sans avoir lu le livre original, d'autant plus si sa lecture vous donne envie de lire l’œuvre de Kafka).

VOTRE AVIS



Si vous voulez créer un compte, c'est ICI et c'est gratuit!

> Conditions d'utilisation