Jintarô - Le caïd de Shinjuku - Actualité manga

Avis sur Jintarô - Le caïd de Shinjuku

Shinjuku no teiô - Ori wa dokugusuri

nolhane

De nolhane [6606 Pts], le 30 Janvier 2021 à 17h01

15/20

Certaines œuvres sont plus difficiles à aborder que d'autres et c'est le cas de ce manga mettant en lumière un préteur sur gage abuseur, violent, misogyne, profiteur et j'en passe. Il ne fait aucun doute que nous avons là un manga provocateur qui ne brosse pas le lecteur dans le sens du poil et n'hésite pas à faire voler en éclat le bon goût. Cette impression est renforcée dans l'étrange entretien disponible en fin de volume où l'on rencontre un George Akiyama égocentrique et imbu de lui même. Pourtant, certaines phrases de l'auteur sont pleines de sens tout comme ce manga qui n'a au final rien de gratuit dans son mauvais goût.

 

Nous suivons Jintarô Dokugusuri, un préteur sur gage amis avec la pègre à l'égo tellement surdimensionné qu'il demande à qui passe devant lui « c'est quoi mon nom ?! » la réponse devant être « Jintarô, le caïd de Shinjuku ». Le bonhomme n'est pas seulement vulgaire, violent, abuseur.. il est aussi laid physiquement, Il profite de sa position de riche préteur sur gage pour forcer toutes les jeunes femmes qu'il croise en les achetant avec de l'argent, en les manipulant ou en abusant de leur confiance.. L'image de la femme en prends un coup tout comme celle des hommes montrés uniquement comme des rapaces. Heureusement, l'auteur évite toute érotisation des scènes de sexes qui restent dans la violence à l'allure vulgaire.

 

On pourrai se demander quel est l'intérêt de la lecture et en quoi elle est difficile à aborder ? Et bien parce qu'au fur et à mesure où l'on avance dans l'histoire, l'image qu'on a de Jintarô devient trouble.. On reste outré et marqué par ses actes et son comportement. Pourtant il se dégage une forme de misère humaine de cet homme.

Comment un homme devient un type de la pire espèce ? Comment peut-on ne vivre qu'au travers de la domination des autres grâce à l'argent ? Jintarô semble lutter contre lui même, les remords le rongent au point où notre regard envers le personnage évolue beaucoup dans une dernière partie émouvante. Jintarô est en permanence en train de lutter contre son enfance malheureuse. Il semble lutter contre lui même pour trouver sa place et gagner en estime de soi. Pour cela, le seul moyen qu'il a trouvé est d'écraser les autres mais surtout les femmes via la force et l'argent.

Jintarpo ne manque pourtant pas de sensibilité, il a du mal à dormir, fait parfois preuve de philosophie et s'attendrit d'une enfant qu'il trouve dans la rue.

Le manga peut se voir en soi comme une satyre provocatrice du mal généré par la cruauté des sociétés modernes. Si le propos manque de nuance, il provoque un goût amer en bouche qui subsiste une fois la lecture finie.

 

Le dessin n'est pas beau et ce n'est pas son rôle ici. Il est cependant diablement efficace pour nous faire ressentir les émotions fortes qui se dégagent de ce livre (souvent le dégoût il faut bien l'avouer mais pas que).

Mélangeant habilement grossièreté et réalisme, le style de l'auteur semble influencé par les mangas type Golgo 13 tout en révélant des nuances intéressantes.

 

Une lecture trouble donc mais qui peut se révéler sous un autre jour quand on l'aborde avec recul. Pour découvrir cet auteur, je conseil plutôt de commencer par le très bon Anji-San édité chez le Lézard Noir (comme Jintarô).

 

Jintarô – Le caïd de Shinjuku n'est pas une lecture agréable. Pourtant, elle n'est pas inintéressante dans ce qu'elle révèle des sociétés modernes et marque de part son côté sans concession. Portrait classique de méchant imbuvable à l'âme meurtrie, ce manga se démarque en allant au bout des choses et en proposant un final où seul la solitude règne.

Un livre à ne pas mettre entre toutes les mains mais qui se montre plus intéressant qu'il n'en à l'air.

VOTRE AVIS



Si vous voulez créer un compte, c'est ICI et c'est gratuit!

> Conditions d'utilisation