Jeu Video - Actualité manga

Le test du jeu video:

Publié le Lundi, 30 Mai 2011

C'est une anecdote bien connue des fans : il fut une époque où Disney et Square partageaient le même immeuble à Tokyo (je ne saurais vous dire si c'est encore le cas aujourd'hui). Cela a débouché sur de (très) belles choses, telle la série des Kingdom Hearts. Mais s'inspirant de son voisin du dessus, ou du dessous, Square s'est engagé sur une voie dangereuse : faire des suites. Comme chez Disney, l'aspect commercial était dissimulé, mais aucun fan n'était dupe. Et comme chez Disney, le résultat a été assez catastrophique. Avec l'épisode X-2, Square élabore sa première suite directe à un Final Fantasy. Souffrant du syndrome de la suite commerciale, un constat doit être fait : FFX-2 n'est pas particulièrement bon. Mais si ce n'était que cela... Ce qu'on va lui reprocher, surtout, c'est de dénaturer l'esprit de l'oeuvre originale, à tour de changement d'ambiance totalement incohérent et d'évolution des personnages pour le moins surprenante, sans que rien, pas même un gameplay plutôt plaisant et de très bonnes idées, puisse jamais rattraper la déception. Que cela soit clair : Final Fantasy X n'avait pas besoin de suite. Accepter le destin des personnages à la fin d'un Final Fantasy, cela entre dans le processus d'ensemble contribuant à faire un très bon jeu. Une exception demeure évidemment lorsque l'on voit la qualité des oeuvres tournant autour de l'univers de FFVII. Mais dans le cas de Final Fantasy X, il aurait été préférable de ne pas faire de suite. Le seul fait que le jeu proposait une fin non heureuse suffisait à lui conférer, même s'il était imparfait, le statut d'intouchable. De plus, il faut reconnaître que l'univers du dixième épisode n'était pas aussi riche que celui des volets précédents (qui étaient trop forts pour lui), et il paraissait trop difficile de faire une suite en changeant quelques éléments et en en gardant d'autres. L'idée la meilleure aurait été sans doute d'effectuer un saut considérable dans le passé, avec la quête des pères de Tidus et Yuna face à Sin, ou dans le futur avec une toute nouvelle équipe. Cédant à la loi du commerce, et peut-être, comme il a été dit, à la pression de fans japonais(es) face à une fin jugée frustrante, les développeurs se sont donc aventuré sur un chemin glissant. Final Fantasy X-2 n'est pas un mauvais jeu mais une mauvaise suite. Mais on ne va pas refaire le monde, et, au-delà de l'amertume, tout n'est pas à jeter.

Le scénario de FFX-2 prend place deux ans après la fin de FFX. Yuna a apporté l'Eternelle Félicité à Spira en se débarrassant de Sin, mais elle a perdu une personne chère. L'heure est à la reconstruction. Yuna n'est plus invokeuse, car les chimères ont disparu en même temps que Sin. En compagnie de Rikku, et de Paine, nouveau personnage mystérieux, Yuna est chasseuse de sphères : elle parcourt Spira pour retrouver l'être cher. Les pérégrinations emmèneront les trois jeunes femmes à découvrir le passé de Spira lors de la Guerre des Machines déjà évoquée dans FFX. Yuna s'appuiera sur des souvenirs issus des sphères, notamment ceux de Shuyin, vivant à Zanarkand lors la Guerre des Machines et de sa petite amie Lenne, une chanteuse célèbre, tous deux tombés sous les balles des soldats de Bevelle.

Des efforts ont été faits pour développer l'univers de façon logique. D'un point de vue politique notamment, les développeurs ont su respecter l'essence de FFX, en mettant en avant bon nombre de nouvelles organisations : la ligue des Jeunes (radicale, prônant l'abandon de l'ancien système pour plus de liberté), le néo-Yévon (conservateur, cherchant à restaurer la confiance des habitants de Spira dans la religion Yevon qui n'était pas étrangère à la naissance de Sin), les pro-Makinas (en majorité des Al Bheds, favorisant le retour de la technologie comme il y a mille ans). Face à cela, on trouve les Albatros (des chasseurs de sphères, composés de Yuna, Rikku, Paine et des trois Al Bhed Frangin, Poto et Shinra, dont le QG est le vaisseau aérien Celsius) et le gang Leblanc (également chasseurs de sphères, leur QG est à Guadosalam et ils sont les rivaux des Albatros).

On contrôle donc tout au long du jeu Yuna, ainsi que Rikku et Paine lors des combats. Trois personnages, c'est peu et c'est la première fois que l'on voit ça dans la saga. Le problème n'est pourtant pas là. Dans FFX-2, l'univers instauré dans l'opus précédent tient indéniablement la route... c'est bien l'ambiance qui plombe tout ! L'équipe a gardé le monde de Spira mais a donné à tout ça des accents pop. Yuna n'est plus la petite invokeuse renfermée et prude de FFX. Elle s'est émancipée, pour devenir, en plus de chasseuse de sphères, chanteuse et fashion victim à ses heures perdues. Et c'est là que le jeu s'enfonce. Car FFX-2 dégouline de fan service pur et dur. Yuna et Rikku ne sont que deux poulettes qui piaillent, accompagnée de Paine, la ténébreuse de service qui ne fait que prendre la succession de Lulu, trop occupée à s'occuper du bébé (qu'elle a eu avec qui, à votre avis ?). Des indices seront donnés pour connaître sa véritable identité et son intérêt à se joindre aux deux autres cocottes, mais en dépit des efforts faits, on peine (sans jeu de mots...) à ressentir quelconque intérêt pour ce nouveau personnage. Les dialogues sont d'une affligeante pauvreté, banalité et niaiserie. Certaines situations sont ridiculement caricaturales et prévisibles, une scène de bain notamment, placée là pour faire plaisir aux fans de l'aveu-même des développeurs... Yuna est déchaînée, provocatrice, orgueilleuse et paradoxalement idiote, elle n'est plus la même jeune fille que dans FFX : ce changement de caractère trouve son explication dans le seul fait qu'elle ait dû s'émanciper puisque personne n'est plus disponible pour la protéger... on repassera pour la profondeur psychologique des personnages ! L'animation de Yuna lorsqu'elle court n'est pas mieux niveau crédibilité : on dirait tant un pantin désarticulé qui se tortille et rajoute à l'aspect décérébré du personnage. Rajoutons à cela une Rikku insupportable, une Paine bien terne, un chara-design loufoque des rivaux, la musique techno, l'humour neuneu, et vous avez là une ambiance qui ne peut que susciter le rejet, que l'on ait apprécié le dixième épisode ou non, ou que l'on soit fan de la saga en général.

L'ambiance n'est guère améliorée par les doublages anglais, encore plus insupportables vu le nouveau caractère des jeunes filles. Et ne comptez pas sur la générosité technique, marque de fabrique de Square, pour rattraper le tout : FFX-2 contient très peu de cinématiques en images de synthèse, se contentant de séquences élaborées à partir du moteur graphique, ce qui corrobore l'impression que le jeu a été conçu dans une optique commerciale sans souci de création.

La majorité des décors de FFX reviennent, à quelques exceptions près (disparition du lac Macalania, des temples ou d'autres lieux clefs de FFX qui n'ont plus d'importance ici). Bevelle, Besaid et Guadosalam restent eux bel et bien présents. Et il faut remarquer que, alors même qu'ils avaient une chance de se rattraper et bien faire côté fan service justement, en nous étonnant avec de nouveaux environnements, les développeurs l'ont laissé passer. Il en est ainsi du village de Kilika, détruit par un tsunami de Sin dans FFX, qui est ici reconstruit... mis à part que le moteur graphique n'a pas été corrigé, qu'il a donc fortement vieilli, que le nouveau décor qui aurait pu être appréciable est submergé d'aliasing. On repassera pour l'agréable surprise ! L'aliasing récurrent et le manque flagrant d'innovation d'un point de vue graphique se retrouvent dans tout le jeu.

Quelques références sont faites aux précédents volets (le jeune Al Bhed membre des Albatros porte le nom de « Shinra », référence à FFVII) et on retrouve d'anciens personnages... dans des rôles ultra-prévisibles : Wakka et Lulu sont parents, Kimahri est devenu le chef de ce qui reste de la tribu Ronso... Pas besoin de faire une suite pour nous montrer ça, laisser la logique et l'imagination travailler à la fin de FFX aurait amplement suffi car tous les éléments permettant d'induire les situations présentées y étaient déjà présents.

Le rôle des sphères est important, comme dans le précédent opus. Elles servent essentiellement à voir les événements passés ou à venir. Les sphères ont au contraire un rôle plus relatif dans le gameplay, puisque le sphérier a disparu pour laisser la place à un système de costumes, inspiré du système de classes/jobs présent dans FFIII, FFV et dans un autre genre FFTactics. Le système de costumes, très simple mais efficace et plutôt attrayant, passe par l'association de vêtisphères à des palettes. Les palettes disposent d'emplacements (six maximum pour les plus puissantes) dans lesquels des vêtisphères devront être placées. Les palettes comme les vêtisphères auront des implications sur les caractéristiques des personnages (points de vie, force, magie). Notons quelques éléments qui tentent de diversifier tout ça, notamment les « plots » sur les palettes et les tenues spéciales, qui permettent d'obtenir des caractéristiques et compétences plus élevées ou variées. Les vêtisphères sont en nombre important et permettent un réel choix du joueur et un gameplay intéressant, notamment dans la manière d'aborder les combats. A ce sujet, le système de vêtisphères permet de changer de compétences en plein milieu des combats, ce qui est appréciable, même si on passera plus souvent par le menu traditionnel hors combat pour choisir nos vêtisphères favorites et mettre en place une stratégie et une logique d'équilibre et de complémentarité entre les trois personnages. Le système de combat de Final Fantasy X, qui était un ATB amélioré baptisé CTB (combat en tours d'actions par battements) a été abandonné au profit d'un retour de l'ATB (le système traditionnel de la saga) dynamisé pour l'occasion. L'ATB n'aura jamais été aussi rapide que dans FFX-2, et aucun épisode ultérieur n'a pour l'instant repris ce système.

Le jeu se découpe en cinq actes, comportant un certain nombre de missions. La majorité des missions concerne l'avancement de l'intrigue principale et sont donc obligatoires. Celles facultatives ont peu d'intérêt et ne servent qu'à compléter le pourcentage du jeu. Pas besoin d'atteindre les 100% pour finir le jeu, sachant que, là encore pour la première fois, plusieurs fins sont disponibles selon les choix effectués lors de la dernière partie de l'aventure. Chaque mission a un niveau de difficulté noté par des étoiles (de une à cinq), dépendant du niveau en cours du joueur par rapport à celui du bestiaire présent lors de la mission. Le blitzball existe toujours mais a été marginalisé : il n'est plus aussi complet qu'auparavant. Un jeu de cartes chiffrées est le nouveau mini-jeu de cet épisode et fera sans nul doute le bonheur des adeptes de calcul mental et de sudoku.

A noter que des versions plus complètes du jeu, comportant des bonus (FFX-2 International) ou une nouvelle mission se déroulant après la fin de FFX-2 (FFX-2 Last Mission) ont vu le jour au Japon.

Graphismes : A quelques rares exceptions, les environnements de FFX-2 sont un copier-coller de ceux du précédent opus. Le format 50 hertz a été légèrement optimisé. La direction artistique et le character designer ont changé et cela se voit. Yuna et Rikku sont plus vulgaires d'apparence, et la première est un douteux mélange d'un gabarit asiatique fin avec une occidentalisation à outrance (yeux azur).

Jouabilité : Elle reste agréable même si quelques nouveautés se paient le luxe de l'alourdir, telle la curieuse idée des sauts... Au niveau du système de combat néanmoins, c'est du tout bon. Le rôle des palettes et vêtisphères, les enchaînements de coups et le dynamisme incroyable des actions rendent les combats prenants.

Durée de vie : Un mode new game + est disponible... ce qui est appréciable, car FFX-2 peut être rejoué moins pour son scénario que pour pouvoir trouver toutes les palettes ou vêtisphères. On aurait aimé pour le coup avoir ce genre de mode dans les volets précédents ! A noter que FFX-2 se finit plus rapidement que les autres, les à-côtés étant peu passionnants et moins nombreux et l'intrigue principale plus courte (30 heures maximum).

Bande-son : Côté musiques, c'est le changement total. Nobuo Uematsu n'est pas aux commandes... et ça fait mal. Noriko Matsueda et Takahito Eguchi parviennent à concevoir des musiques correctes, mais on n'atteint clairement pas le génie de Uematsu ! Hormis ces mélodies, ce sont aussi les deux chansons, de la pop et un slow indigestes (en anglais... mais avoir tout ça en langue japonaise n'aurait pas changé grand chose...) qui font tache. Seul le thème du menu principal au piano est tout à fait excellent !

Scénario : Loin d'être complexe, mais pas élaboré comme simple prétexte non plus, le scénario est acceptable et il n'y a pas de défaut de cohérence flagrant. Le défaut de cohérence, c'est bien au niveau de l'ambiance qu'il se situe ! Les dialogues pauvres voire idiots sont particulièrement problématiques. Le scénario prend une tournure radicalement différente après quelques heures de jeu, dès que le gang Leblanc, principal rival des Albatros, est relégué au second plan. Après un début ultra-léger, les accents mélodramatiques de la seconde partie sont beaucoup plus enthousiasmants.

FFX-2 apparaît au final comme un jeu très irrégulier. Il souffre d'une ambiance exaspérante et d'un moteur graphique qui a perdu de son éclat, mais le scénario, le gameplay et les musiques restent tout à fait convaincants. Suite indigne mais jeu passable.

Chroniqueur: RogueAerith


Note de la rédaction
Note des lecteurs