Strange dawn - Actualité anime
Strange dawn - Anime

Strange dawn : Critiques

Critique de l'anime : Strange dawn

Publiée le Vendredi, 21 Février 2020

Dire que le registre de l'isekai est à la mode depuis quelques années est clairement un euphémisme, tant ce type de récit inonde la production animée actuelle avec autant de hauts que de bas... mais ce genre d'histoire est loin d'être nouveau, et dès que l'on creuse un peu dans les production d'il y a plusieurs années on trouve quelques représentants du genre. Ainsi, il y a 20 ans était diffusée au Japon Strange Dawn, série de 13 épisodes que le public japonais a pu découvrir du 11 juillet au 26 septembre. Egalement diffusée à la télévision anglaise en 2002, elle est ensuite sortie sur support physique dans plusieurs contrées comme l'Amérique du Nord et, pour ce qui nous concerne, la France, grâce à l'éditeur Dybex qui la proposa d'abord en 4 DVDs unitaires en 2003, avant de réunir les épisodes en 2005 dans une intégrale, le tout en vf et vostf. Vieille de quasiment 17 ans, cette édition reste assez facile à trouver d'occasion, mais accuse lourdement son âge, forcément, avec une image en 4:3 et une qualité de son et d'image éloignée de ce qui se fait aujourd'hui. Néanmoins, puisqu'il ne fait jamais de mal de redécouvrir ou de découvrir ce genre de petite série retombée dans l'oubli après avoir eu une petite notoriété, c'est à elle que l'on va s'intéresser aujourd'hui, le temps de quelques lignes.

  

Ce qu'il est bon de noter dans un premier temps, c'est que Strange Dawn est une série qui fut conçue par certains noms loin d'être inconnus et ayant auparavant déjà bien fait leurs preuves. L'homme ayant imaginé cette histoire et l'ayant réalisée n'est autre que Junichi Satô, qui était déjà bien connu pour Sailor Moon entre autres, et qui signera les années suivantes quelques merveilles comme Princesse Tutu (ne vous fiez pas à son nom; cette série est un bijou), Kaleido Star, ou encore Aria et Amanchu! d'après les mangas de Kozue Amano. Le character design si particulier de l'oeuvre, lui, a été conçu par Akihiko Yamashita, artiste expérimenté se cachant derrière pas mal de très beaux projets: il notamment réalisa notamment le character design et l'animation de la série d'OAV culte Giant Robo, et est ensuite devenue une figure importante du studio Ghibli. Par exemple, c'est à lui que l'on doit l'animation de la scène finale du Voyage de Chihiro, la direction de l'animation du Château Ambulant, de Ponyo sur la falaise, d'Arriety, de La Colline aux Coquelicots, ou encore de Souvenirs de Marnie, et même le chara design du Château Ambulant, rien que ça. Les musiques, elles, ont été assurées par le talentueux Kaoru Wada, artiste qui compose pour de nombreux secteurs différents, allant de l'animation au cinéma en passant par la télévision, le théâtre et d’autres événements. Il a notamment composé le musiques d'Inuyasha et D.Gray-man, est à l’origine de quelques centaines d'œuvres musicales, et est aussi chef d’orchestre. Quant aux studios ayant pris en charge les choses, il s'agit de Hal Film Maker et Strange Dawn Production Committee, un comité créé exprès pour le projet. Avec ces quelques noms importants derrière Strange Dawn, il y a facilement de quoi être curieux de voir ce que donne l'oeuvre.

  

Celle-ci nous plonge donc aux côtés de deux lycéennes assez différentes, Eri Natsuno et Yuko Miyabe, qui, dès les premières secondes, sont d'ores et déjà perdues dans un monde fantastique dont elles ne connaissent rien et où elles ont été transportées comme par magie ! Et elles ont à peine le temps de paniquer et de commencer à explorer les lieux qu'elle découvrent un étrange petit être en uniforme de soldat, blessé, allongé sur le sol après avoir été touché par un ennemi. Plus de doute possible: les deux adolescentes sont dans un monde rongé par la guerre, une guerre opposant différentes factions de ces drôles de petits êtres. Après un premier abord plutôt virulent, elles sont accueillies dans le village de Grania par le dénommé Shall et les habitants des lieux, qui sont tout aussi petits, tels des lutins en quelque sorte. La grande taille d'Eri et de Yuko les démarque forcément et les rendent à part... tellement à part qu'elle se retrouvent d'emblée vénérées ! En effet, d'anciennes croyances prédisaient l'arrivée dans ce monde de deux êtres, les "Grands Protecteurs", porteurs de pouvoirs puissants, et à même de protéger ce monde en mettant fin au conflit embrasant les différentes factions. Seuls soucis: Eri et Yuko sont des adolescentes tout à fait normales, n'ont aucun pouvoir, n'ont aucune idée de comment elles pourraient aider ce monde et son peuple, et aimeraient surtout trouver un moyen de retourner dans leur monde... Y parviendront-elles, et auront-elles sur ce monde autant d'influence positive que l'espèrent celles et ceux qui les vénèrent ?

  

Junichi Satô pose ici un univers dont les bases sont aussi classiques qu'efficaces, avec un monde en guerre aux paysages globalement plutôt hostiles et arides, allant des falaises aux plaines en passant par des lieux désertiques. Très classique, mais suffisant pour appuyer la vraie originalité graphique de l'oeuvre: le design de ses personnages, bien sûr. Et si le look des deux héroïnes humaines est on ne peut plus standard et passe-partout, on sent qu'Akihiko Yamashita s'est appliqué à concevoir, pour les habitants de ce monde, un look de "lutins" assez bien étudié. Tout petits, tout ronds, ils seraient presque mignons s'ils n'étaient pas en guerre...

Car la guerre, elle n'est pas là pour faire de la figuration, et le récit cherche à l'exploiter sous différents aspects souvent durs, cette dureté étant décuplée par le contraste avec le physique petit et plutôt mignon des habitants. Un peu à la manière d'une série comme L'Autre Monde dans une moindre mesure (on reste très loin de la puissance dramatique de L'Autre Monde, série qui était d'ailleurs sortie au Japon un an avant Strange Dawn... et si vous n'avez jamais vu cette série, hé bien, réparez cette erreur), Strange Dawn expose sans détours ses moments durs, ses quelques morts fortes, ses conflits de grande ampleur où se mêlent bien souvent des intérêts plus personnels, intérêts personnels pouvant résider dans certaines relations d'amitié ou d'amour entre ces petits habitants, ou dans des choses beaucoup moins belles comme les ambitions voire les pulsions de certains personnages. Des trahisons et une brève tentative de viol sont là, par exemple.

  

Et dans un tel monde, que peuvent donc bien faire Eri et Yuko, jeunes filles vénérées malgré elles alors qu'elles n'ont rien de spécial ? La réponse qui se dessine tout au long de la série est assez intéressante, dans la mesure où contrairement à pas mal d'isekai plus récents, ces deux adolescentes ne deviendront jamais de réelles héroïnes dans ce monde, quand bien même les habitants le pensent. Globalement, pour aider ce monde tout en cherchant un moyen de rentrer chez elles, elles ont surtout pour elles leur grande taille, et les intimidations qu'elles peuvent parfois faire en s'appuyant sur leur statut de "Grands Protecteurs". Qui plus est, leur quête pour rentrer chez elles et leur rôle protecteur sont parfois rendus encore plus difficiles par leur propre personnalité: les deux jeunes filles ont des caractères diamétralement opposés (l'une est timide et sensible, l'autre plus franche, directe, caractérielle et égoïste) les poussant parfois à se disputer voire à se séparer suite à des désaccords sur ce qu'il faut faire, elles ne sont parfois pas loin de craquer en voulant tout bonnement laisser tout le monde en plan sans plus se mêler de leurs problèmes guerriers... En réalité, elles n'accompliront rien de vraiment fou, jusqu'à une fin sonnant alors un peu avec un réalisme étonnant, même si elle peut également beaucoup frustrer et laisser sur une impression de "tout ça pour ça". Néanmoins, avec un peu de recul, on comprend que les deux adolescentes ont, malgré tout, vraiment apporté (parfois involontairement) quelque chose aux habitants de ce monde, en accentuant leur volonté de voir le conflit s'arrêter, quitte à devoir se révolter pour ça.

Strange Dawn présente alors un petit univers et une histoire piquant bien la curiosité et ayant un certain intérêt dans ses partis pris... Néanmoins, pas mal de limites viennent la rendre moins forte qu'elle aurait pu l'être. En tête, forcément, l'âge de la série: techniquement, l'animation était dans une moyenne honnête pour l'époque, mais désormais elle a pris un sacré coup dans l'aile, même si ça reste assez fluide. De même, on devine une série qui n'avait pas forcément un énorme budget au vu de quelques irrégularités visuelles qui surviennent de temps à autre. Mais l'aspect technique n'est pas le plus gros problème: il y a surtout dans la série un rythme et des avancées un peu bancals. Après l'installation d'un univers prometteur, celui-ci peine parfois trop à vraiment prendre de l'ampleur, à bien s'étendre, si bien qu'il finit vite par apparaître plus réduit que prévu. Et tandis que certains épisodes sont vraiment intenses, d'autres montrent de gros coups de mou en semblant presque être inutiles et faire un peu du remplissage, alors qu'ils auraient précisément pu servir à densifier l'univers, par exemple.

  

Au final, Strange Dawn est donc une série ayant son charme et son intérêt sur plus d'un point, mais qui a forcément pris un coup de vieux et qui, surtout, ne semble pas toujours à la hauteur de ses possibles ambitions. On pouvait attendre un peu plus de cette série loin d'être indispensable, mais on reste quand même sur une oeuvre ayant des atouts pouvant la rendre facilement plaisante à suivre.
   
Critique 1 : L'avis du chroniqueur
Koiwai

12.5 20