Orange - Ichigo Takano Vol.1 - Actualité manga
Orange - Ichigo Takano Vol.1 - Manga

Orange - Ichigo Takano Vol.1 : Critiques

Orange

Critique du volume manga

Publiée le Lundi, 12 Janvier 2015

Critique 1


Début juillet, nous avons enfin pu découvrir en langue française Ichigo Takano - mangaka devenue culte dans son pays en à peine quelques titres - avec Dreamin' Sun, un titre choisi par Akata pour Delcourt avant la fin de leur collaboration. Rien d'étonnant, alors de voir arriver dans le catalogue des éditions Akata l'oeuvre la plus emblématique de l'auteure, Orange, qui s'est forgée ces dernières années une solide réputation, et qui a été accueilli comme il se doit lors de son annonce pendant Japan Expo.


Orange commence pourtant presque comme de nombreux shôjo romantiques. A Matsumoto, grande ville perdue au milieu de la nature de la préfecture de Nagano, Naho, 16 ans, entame sa deuxième année de lycée aux côtés de ses amis Azu, Takako, Suwa et Hagita. Leur quotidien animé s'enrichit de l'arrivée dans leur classe d'un Tokyoïte, Kakeru, garçon à première vue un peu distant, mais qui finit par très vite se laisser conquérir par la joie de la petite bande, emmenée notamment par le sociable Suwa. La vie suit son cours, Kakeru s'intègre bien, sympathise facilement, notamment avec Naho, qui tombe irrémédiablement amoureuse de lui.


Vous sentez venir le banal shôjo ? Vous faites fausse route, car il y a un mais, et il est de taille : au moment de la rentrée, Naho a reçu une longue lettre, arrivée du futur, et écrite par elle-même 10 ans plus tard. Celle-ci décrit tous les événements qui vont arriver à l'adolescente dans les prochains mois. La jeune fille a d'abord du mal à y croire, mais elle est rapidement forcée de se rendre à l'évidence : tout ce qui y est raconté est vrai et se réalise : l'arrivée de Kakeru, des petits éléments en apparence anodins qui auront pourtant leur importance comme le choix ou non de participer à un match de softball, l'instant où Naho va définitivement s'éprendre de Kakeru... A travers cette lettre, Naho peut prendre connaissance de son futur des mois à venir, et celle qu'elle est devenue 10 ans plus tard lui demande de changer certaines choses. Car la Naho de 26 ans entretient depuis dix ans de profonds regrets, liés à des décisions qu'elle n'a pas su prendre, à des choses qu'elle n'a pas su voir à temps, à ses sentiments... et à plus grave encore. On n'en dira pas plus pour ne pas gâcher la petite surprise (bon, on s'y attend, mais quand même), mais les enjeux deviennent autrement plus importants dès la fin du premier chapitre.


Avoir la possibilité de changer le cours de sa vie, pouvoir revenir sur son passé pour en effacer les erreurs et les regrets : en seriez-vous réellement capable ? Ichigo Takano pose la question à travers son héroïne, que l'on suit à deux époques différentes.


La Naho de 16 ans a une chance d'influer sur son avenir pour avoir une vie moins remplie de regrets, mais aura-t-elle seulement assez de force pour prendre certaines décisions, et le souhaite-t-elle seulement ? Elle ne souhaite d'abord pas connaître son futur, laisse la lettre dans un coin, mais est très vite poussée à retourner la voir par la force des événements, et elle se rendra vite compte de l'importance de sa "mission", qui n'influera pas sur son seul bonheur, mais aussi sur celui de tout son entourage, à commencer par ses amies et par Kakeru. Pour Naho, il s'agit alors de prendre son courage à deux mains, d'oser faire les choix qu'elle n'a pas osé faire dans sa "première chance"... Mais on ne change pas si facilement : Naho, jeune fille qui a toujours été plutôt timide au point de s'effacer, pense aux autres avant elle-même au point d'avoir un fort instinct maternel, aura toutes les difficultés du monde à se changer elle-même et à changer certains événements.


Difficile de ne pas s'attacher à cette jeune fille, héroïne pourtant assez typique, parfois un peu énervante dans son côté passif, mais qui se dévoile beaucoup à travers l'étrange mission qu'elle vit. Malgré son manque d'assurance et son incapacité à franchir certains caps, elle possède en elle une réelle bienveillance et une volonté forte de changer les choses. Elle continue, comme si de rien n'était, sa vie joyeuse et insouciante en compagnie de ses amis, qui sont tous délicieux à suivre. Suwa est un bon garçon qui cache ses sentiments derrière sa sociabilité et sa bienveillance, Azu et Takako sont des amies complémentaires sur lesquelles on peut compter, seul Hagita est un peu plus en retrait, car de base plus solitaire, et on espère le voir plus sur le devant de la scène. On suit avec plaisir ce groupe d'adolescents profitant de sa jeunesse, car c'est frais et ça sonne très juste dans les relations. Mais dans ce cadre en apparence si insouciant, Naho est la seule à savoir ce qui va arriver, à connaître l'important bouleversement qui risque de tout changer.


De l'autre côté, il y a la Naho de 26 ans, que l'on suit aussi avec beaucoup d'intérêt à travers quelques "flash-back venus du futur", et qui soulève une somme considérable de thèmes forts les regrets face à ce qu'on a fait ou pas, la peur de l'avenir, la mort des proches, le deuil ou le suicide. Des choses auxquelles tout le monde est confronté, et qu'Ichigo Takano met en avant avec une certaine puissance en utilisant comme il se doit la touche fantastique de son histoire. On se demande également ce qu'elle deviendra si sa vie d'adolescente change.


Il se crée alors une dualité originale, tout en contrastes, mais complémentaire, entre l'apparente insouciance de la vie des lycéens, et des thèmes matures qui cristallisent les douleurs d'adolescents et de jeunes adultes. Une dualité qu'Ichigo Takano expose à merveille à travers une narration maîtrisée, claire, sensible sans être pathos. Les pensées/conversations par lettre interposée de la Naho de 26 ans pour celle de 16 ans, ou les questions adressées à la Naho adulte par la Naho adolescente, sont autant de jolis instants accentuant le ressenti, ce procédé rappelant notamment beaucoup les paroles et questions que Hachi et Nana s'adressent à travers le temps dans Nana.


Dans son mot de début de tome, Ichigo Takano affirme qu'elle n'est pas douée en dessin... On n'est pas d'accord avec elle ! Son travail graphique contribue grandement aux qualités du récit.De base, son coup de crayon est assez classique, mais il est précis, doux, assez chaleureux, et sait dégager beaucoup d'émotions nuancées chez les personnages. Sa narration est parfaitement mise en valeur via un découpage et une mise en scène sobres, mais limpides. Et l'auteur s'applique beaucoup à dépeindre la ville de Matsumoto, qu'elle connaît bien, en croquant des lieux inspirés de la réalité et en dégageant comme il se doit le charme de cette cité réputée pour être un endroit où il fait bon vivre.


Originellement débutée dans le magazine shôjo Bessatsu Margaret des éditions Shûeisha, la série a connu quelques tourments dans sa parution en changeant d'éditeur et de type de magazine, l'arrivée chez l'éditeur Futabasha s'étant accompagnée d'une prépublication dans le Gekkan Action, un magazine plus orienté adulte et mixte. Un choix pertinent, car si Orange possède de base une sensibilité plus féminine, son récit a vraiment de quoi parler à tous les publics.


En exploitant parfaitement ce qu'elle met en place, Ichigo Takano croque une histoire touchante et poignante, où les instants de bonheur insouciant se mêlent à merveille à des thèmes forts. On se prend totalement au récit, on se demande comment on réagirait à la place de la Naho adolescente, on se surprend à ressentir des émotions proches de la Naho adulte... Non, la solide réputation de la série n'était pas volée. Seuls les petits aléas que la parution japonaise a connus pourraient freiner un peu, mais maintenant que l'on sait que la série sera courte, il n' y a plus de raison d'hésiter.


En bonus, après les 190 pages du récit principal, Ichigo Takano nous propose de découvrir le premier chapitre (la suite sera dans le tome 2) d'une de ses anciennes histoires, où des jumelles différentes, mais inséparables rencontrent un mec visiblement parfait. C'est beaucoup plus classique qu'Orange, l'auteur ne cache d'ailleurs pas qu'elle a dessiné cette histoire principalement pour pouvoir faire des jolies filles et des beaux gosses, mais c'est agréable à parcourir, car bien narré et porté par les quelques tourments de ces deux filles qui se ressemblent comme deux gouttes d'eau.


L'édition proposée par Akata est plaisante, malgré quelques petits couacs très succincts. Le papier et l'impression sont de bonne qualité, malgré un petit effet de transparence des pages peu gênant. La traduction est très fluide et prenante même si quelques rares erreurs d'inattention s'y sont glissées (un "persipace" au lieu de "perspicace", une répétition du "a bien du mal" dans le résumé de couverture...). Et la couverture est superbe... mais très fine, donc faites attention de manipuler votre tome avec soin !








Critique 2



Imaginez-vous recevoir un jour une lettre écrite par vous-même, mais provenant du futur. Vous avez dit étrange ? Impossible ? C’est pourtant ce qui arrive à Naho le jour de ses 16 ans. Ce 6 avril, elle reçoit une lettre écrite par elle-même âgée de 10 ans de plus. Les années ont passé et sa « moi du future » est remplie de remords et est rongée par les regrets. Pour pouvoir ne plus avoir de regrets, elle décide de mettre dans cette lettre tous les événements qui se dérouleront et notamment parlent de l’arrivée du nouvel élève, Kakeru Naruse. Cette Naho du futur tente ainsi d’influencer la vie de la jeune Naho pour se libérer du poids de ses erreurs passées. Cette dernière écoutera-t-elle celle du futur ? Et surtout croira-t-elle à ce qu’elle lit dans ce courrier ? Et si la jeune Naho décide de changer ce qu’elle vit, quelles seront les conséquences de ses actes dans l’avenir ?


Au début de notre lecture, nous sommes comme la jeune Naho complètement dubitative. Comment une lettre peut-elle arriver du futur ? D’un futur de 10 ans qui plus est ? Même si ce point un peu surnaturel n’a aucune réponse dans ce tome, l’auteur nous emmène complètement dans son monde et son histoire. Nous faisons tout d’abord la découverte de la jeune Naho, âgée tout juste de 16 ans. Elle se montre très discrète et manque indéniablement de confiance en elle. En effet, même pour des petites choses du quotidien, elle n’ose pas dire à ses amis ou son entourage ce qu’elle souhaite ou désire vraiment. Elle s’accommode toujours de ce qui lui arrive. Recevoir cette lettre, finalement, bouleverse son quotidien, car elle sera amenée à faire d’autres choix pour ne pas avoir de regret et devra se faire violence pour exprimer ce qu’elle ressent. Qui dit shojo dit histoire sentimentale et la jeune Naho ne reste pas indifférente au nouvel élève Kakeru qui montre de l’intérêt pour la jeune fille.


Mais l’auteur ne se focalise pas essentiellement sur la jeune Naho, elle nous livre également le vécu de la Naho âgée de 26 ans. Ces deux univers créent une véritable alchimie et l’auteur suscite notre curiosité sur comment les événements et la vie ont pu amener Naho et ses amis à en arriver là, 10 ans plus tard. En effet, il y a une autre raison qui a poussé la Naho du futur à envoyer ces courriers à celle du passé. Elle veut protéger une personne qui lui est très chère et pour qui il se passera un tragique événement. La jeune Naho a maintenant de plus lourdes responsabilités sur ses épaules et essayera de tout faire pour empêcher le tragique destin d’arriver.


Et c’est là que l’auteur consolide son scénario. Si nous avions la possibilité de modifier le passé pour ne pas avoir de regrets, est-ce qu’on le ferait ? Naho est confrontée à ce dilemme et devra apporter ses propres réponses et choix en tout état de cause. Mais à vouloir changer le passé, quelles conséquences y aura-t-il sur l’avenir de Nao, mais aussi de ses amis et de Kakeru ? Est-ce que le bonheur de l’un veut dire le malheur de l’autre ?


Concernant les graphismes, l’auteur a un style soigné et a des traits empreints au shojo avec des visages ronds et des yeux bien mis en évidence. Les trames sont bien travaillées ce qui dégage à la lecture des passages remplis de douceur, mais également d’autres de tristesse. Quant à l’édition, elle est correcte.


« Orange » sort des sentiers qu’empruntent habituellement les shojo classiques en nous proposant une histoire un peu plus originale. L’auteur arrive à nous susciter des interrogations sur nos choix et nos regrets, tout en nous emmenant dans son univers. En passant par des moments d’insouciance à d’autres remplis de tristesse, ce premier tome nous fait vivre des instants purs et sincères.


Critique 2 : L'avis du chroniqueur
Einah

17 20
Critique 1 : L'avis du chroniqueur
Koiwai
18 20
Note de la rédaction
Note des lecteurs