One-Punch Man Vol.1 - Actualité manga
One-Punch Man Vol.1 - Manga

One-Punch Man Vol.1 : Critiques Un point c'est tout !

One Punch Man

Critique du volume manga

Publiée le Jeudi, 21 Janvier 2016

Critique 1

On peut dire qu'il se sera fait attendre ce titre ! Cela fait des mois, voir des années, que le public Français attend une adaptation de One Punch Man, série qui régale les Japonais depuis des années ! Cela s'est fait par étape : annonce que l'excellent Yusuke Murata dessine le titre, puis annonce des droits de publication en France par Kurokawa suite à une lutte acharnée entre éditeurs...mais enfin il est là ! Sur nos étals, sur nos tables de chevet, sur nos étagères...entre nos mains !

Pour la petite histoire, le titre vu d'abord le jour sur internet sur le blog de l'auteur original, un inconnu se faisant surnommer « One ». Suite à l'étonnant succès rencontré, la Shueisha négocie les droits et l'auteur (One donc) se voit associé à Yusuke Murata, dessinateur qui nous avait déjà grandement impressionnés avec son remarquable travail sur Eyeshield 21, qui va donc redessiner le titre depuis son origine en lui insufflant tout le dynamisme et toute la vivacité dont on le sait capable ! A partir de là, l'annonce relayée en France tomba dans nombre d'oreilles de lecteurs impatients qui n'attendaient plus que notre tour vienne...cela fut long (voir très long), mais notre patience est enfin récompensée !

C'est donc Kurokawa, qui suite à lutte terrible entre éditeurs (on compte encore les corps mutilés) a obtenu le saint Graal… Car il faut bien comprendre que One-Punch Man ne s'annonce pas comme un énième shonen d'action, il se présente comme une future référence, un futur gros poids lourd, un futur numéro un des ventes, une future locomotive comme ont pu l'être Naruto, One Piece, Bleach et quelques autres. L'éditeur ne s'y est pas trompé et a donc annoncé le titre à grands coups de promotions coup-de-poing...en parfaite adéquation avec le titre !
A cela s'ajoute un animé de fort belle facture, qui sans parler des téléchargements illicites, est disponible légalement depuis quelque temps… Toutes les conditions semblent donc réunies !

Tout ça c'est bien beau, mais concrètement One-Puch Man ça raconte quoi ?
Et bien pour le moment pas grand-chose… On y découvre Saitama un jeune homme au chômage, sans grande passion, qui occupe son temps en jouant les super héros, en affrontant toute sorte de monstres et autres démons voulant envahir / détruire / coloniser (rayer toute mention inutile) la Terre ! Et s'il ne paye pas de mine, Saitama n'est rien de moins que l'être le plus fort au monde ! Rien que ça ! Suite à une révélation qu'il aura dans un court flash-back qui nous sera présenté dans ce premier tome, il prend la décision de devenir un héros, et pour cela il va s'infliger un terrible entraînement pour se renforcer...terrible au point qu'il en a perdu ses cheveux. Mais désormais, rien ne peut l'atteindre et il peut terrasser n'importe quel ennemi en un seul coup de poing, il est désormais One-Punch Man ! Le problème étant que maintenant les affrontements ont pour lui perdu toute saveur, il cherche désespérément l'excitation du combat, mais chacune de ses luttes se termine trop vite. Et ce n'est pas tout puisqu'il semble également avoir perdu toute trace d'émotion, de passion...tout en se renforçant, il s'est vidé de l'intérieur…
Mais il n'est pas prêt de manquer d'activité tant les menaces sont nombreuses, entre les savants fous, les monstres divers et variés et les démons venants de toute part, il va avoir de quoi s'occuper ! Et nous avec !

La couverture de ce premier tome nous fait une belle promesse, nous allons avoir droit à un héros puissant et charismatique, dégageant une aura remarquable, en arrière-plan, une créature informe vaincue, insistant sur la puissance du héros...mais un léger détail change profondément l'ensemble : dans les mains du héros, une poche de course avec des poireaux… Le côté sérieux est immédiatement remis en question et impose un sens comique imparable...nous n'avons même pas encore ouvert le tome que le ton est donné !
Et ce héros qui semble charismatique à première vue va, et ce dès sa première apparition dans l'histoire, apparaître parfaitement ridicule ! Il est chauve, arbore un costume sans la moindre classe, totalement cliché, a l'air totalement blasé...on est bien loin des héros qui nous sont proposés dans les autres titres d'action…
Et c'est avec ce clivage que vont jouer les auteurs sur l'ensemble du tome !

Saitama est l'anti héros parfait : il n'a aucune classe, n'impose aucun respect, il n'a même pas la moindre motivation, il a un physique pas du tout impressionnant, et pourtant il est l'être le plus puissant au monde. Il semble donc blasé en permanence, intéressé par rien, et pourtant lorsqu'il le faut, il s'avère intraitable et invincible. Murata joue merveilleusement bien avec cette ambivalence, réussissant à rendre comique un personnage aussi puissant et à l'inverse à rendre charismatique un personnage pathétique. Car pathétique il l'est. Au chômage, il ne devient super héros que parce qu'il n'a rien d'autre à faire et souhaite réaliser un rêve de gosse, la seule chose qui motive son entraînement dont nous ne saurons rien si ce n'est qu'il fut terrible au point qu'il en perde ses cheveux. D'ailleurs les « origines » du personnage nous seront racontées au détour d'un court chapitre tout aussi déjanté que les autres, supprimant ainsi toute possibilité aux auteurs de s'attarder plus longuement là dessus, coupant ainsi l'herbe sous les pieds des lecteurs qui pouvaient s'attendre à autre chose. Et cela sera encore plus radical pour son fameux entraînement, il a été terrible, cela l'a rendu chauve, surpuissant, au point qu'il n'en est presque plus humain, c'est comme ça et il faudra s'en contenter, nous n'en verrons rien !

Ainsi les auteurs prennent les lecteurs à contre-pied, affirmant leurs volontés d'aller à contre-courant de tous les titres d'actions construits sur les mêmes bases, usant des mêmes ficelles et ayant recours aux mêmes artifices...One Punch Man sera définitivement à part ! Ici pas de parcours initiatique, pas de progression du personnage, pas d'apprentissage de technique secrète...Saitama est déjà le plus fort et n'a guère besoin de technique puisqu'un seul coup de poing suffit amplement !

Il en sera de même pour les adversaires de Saitama : tantôt incroyablement classes et impressionnants, tantôt absolument ridicules et comiques ! Ces derniers viennent de touts horizons, ils peuvent être des monstres venants des entrailles de la Terre, des démons venus d'une autre dimension, des créatures issues d’expériences génétiques...bref, les auteurs s'en donnent à cœur joie (et à ce niveau nous ne sommes pas très éloignés des comics, qui eux se veulent pourtant sérieux). One de son côté peut donc s'éclater à donner vie à n'importe quelle créature, du titan colossal rasant des villes à coup de poing à l'homme crabe parfaitement ridicule, devenu un homme crabe après avoir mangé trop de crabes… Murata de son côté peut s'éclater à laisser libre court à son remarquable coup de crayon pouvant ainsi donner vie à des personnages soit charismatiques et inquiétants, soit affreux et ridicules. Citons par exemple la femme moustique, absolument magnifique et au design remarquable, total opposé de l'homme taupe qui se trouve n'être qu'une grande taupe…
On peut également voir des références et clins d’œil parmi les monstres, ainsi le titan renvoyant sans peine à « L'attaque des Titans », alors que le tout premier démon à apparaître dans le volume fait grandement penser aux créatures auxquelles Toriyama aurait pu donner vie.

Ce qui peut séduire également c'est le monde dans lequel les auteurs nous plongent : cela ressemble à un monde comme le nôtre, mais visiblement habitué aux attaques de monstres divers et variés, de telles sortes qu'un niveau d'alerte est attribué à chacun d'entre eux afin que les populations puissent s'en protéger (ou non). Ainsi cela ne choque personne de voir des créatures démoniaques débarquer.
Quelque part cela rappelle les sentais où les monstres sont légions et bien souvent ridicules. D'ailleurs Murata surfe sur cette vague dans le design des monstres qu'il oppose à Saitama. Il faut alors souligner le travail d'adaptation, notamment au niveau des noms qui correspondent tout à fait à cela et renvoient aux vieux épisodes de Bioman de notre jeunesse. 

L'humour est donc très présent, c'est même ce qui prédomine dans ce premier tome, mais surtout il se montre très efficace, même s'il peut parfois s'avérer un peu noir (Saitama qui détruit une ville en terrassant un colosse pour l’empêcher de détruire la ville).
On rit vraiment de bon cœur et surtout souvent !

Pour l'heure le seul point qui pourrait gêner certains lecteurs c'est l'absence de fil rouge et de sens à tout ceci...en bref, il n'y a aucune trame en vue. Certaines pistes sont évoquées comme le fait que Saitama perde peu à peu toute émotion, on peut mentionner l'intervention d'un second héros qui demande à Saitama de devenir son maître (et là encore l'intervention de ce dernier et l'explication de ses origines sont détournées avec brio et énormément d'humour), mais à l'issue de cette unique premier tome, nous serions bien incapable de prédire ce que nous réserve la suite (pour ceux qui ne se sont pas spoilé avec l'animé), mis à part une nouvelle succession de délires exposés dans des chapitres uniques...vraiment très drôles, mais risquant de s’essouffler à terme comme tant d'autres séries comiques avant celle-ci !

Pour l'heure, on ne fait que se régaler, on s'extasie devant le génie comique et l'inspiration de ONE, on est ébloui par le trait de Murata qui laisse libre court à son talent, semblant avoir toute la marge de manœuvre dont un dessinateur peut rêver, il insuffle une véritable pêche aux histoires, un dynamisme incroyable, il donne vie à des personnages fascinants ! On ne peut que se régaler également devant l'édition sans faille de Kurokawa qui fait ici un travail remarquable (en même temps, ils n'avaient pas droit à l'erreur). Le papier est nickel ; l'impression l'est tout autant et surtout l'adaptation est sans faille, proposant des traductions aux jeux de mots complexes, tout en laissant certaines onomatopées qui participent à donner vie au trait de Murata !

Nous avons donc là un premier tome absolument remarquable qui donne le ton pour un titre qui sera à n'en pas douter un incontournable (qui l'était déjà avant sa sortie) et qui surtout n'a pas usurpé la réputation qui l'a précédée… L'attente fut longue, mais grandement récompensée !


Critique 2


Dans le paysage du shônen en 2016, les attentes étaient assez unanimes. Si on patiente encore pour le très attendu My Hero Academia qui montrera le bout de son nez chez Ki-oon, c’est d’abord One-Punch Man que les lecteurs français attendaient de pied ferme depuis bien des mois. La série a même tardé à sortir et les rumeurs à ce sujet sont allées de bons trains, par exemple l’hypothétique refus du scénariste One de voir son titre diffusé partout dans le monde. Mais qu’importe que cela soit vrai ou non : Kurokawa nous propose enfin le manga que beaucoup ont qualifié de vent de fraîcheur dans le paysage shônen. Certains ont eu un bon aperçu du titre par l’adaptation animée qui s’est achevée après douze épisodes tandis que d’autres se sont montrés plus patients, préférant découvrir l’œuvre par sa version d’origine. Et qu’à cela nous tienne, ce premier volet est plus qu’efficace, il nous met même une jolie claque sur différents aspects.

Autrefois salaryman, Saitama a tout plaqué pour devenir un super héros. Oui, il a réussi, mais est devenu beaucoup trop puissant, si bien qu’il est désormais capable d’exploser au sens littéral du terme le plus gros des monstres qui se présenterait à lui. Chômeur, Saitama ressent alors un vide dans sa vie, ce qui ne l’empêche pas de lutter contre l’injustice grâce à son poing surpuissant !

Le pitch de la série a pour mérite d’être extrêmement clair d’entrée de jeu : Saitama est surpuissant, et ses ennemis éclatent au moindre de ses coups. Ce premier tome se veut alors un divertissement ultra efficace où le lecteur n’a pas à réfléchir. Ce n’est d’ailleurs clairement pas le but recherché par les auteurs qui ne cherchent qu’à créer une œuvre entièrement décomplexée, jouant parfois la carte du sérieux sur le ton de l’autodérision, se moquant même presque des nekketsu classiques et des récits de super-héros trop sobres.

A travers les premières mésaventures de Saitama, la série joue à fond la carte du cliché dans le fond : des monstres super méchants qui menacent l’humanité, et un super-héros aux pouvoirs incroyables pour les détrôner. Sauf que dans la forme, tout est rendu volontairement grotesque de telle sorte à ce qu’un décalage soit crée et évident, ne manquant jamais de faire rire. D’abord, Saitama est un anti-héros de shônen comme on en voit assez peu. Homme surpuissant, il est pourtant dénué de tout charisme de par son crâne chauve, son air stoïque et sa combinaison ridicule. Et pourtant on s’attache à lui grâce à son caractère d’éternel blasé, c’est même ce conflit du personnage face aux grands dangers classiques des séries d’actions qui nous fait rire aux éclats. Ce n’est d’ailleurs pas par les adversaires que ce premier tome cherche à se rendre sérieux puisque tous agissent comme des caricatures de vilains de comics entre l’homme-crabe devenu ainsi parce qu’il a… mangé trop de crabes, ou d’autres adversaires soit ridicule, soit oscillant entre le sérieux et le débile complet.

Le tome aurait pu tourner en rond et ne proposer que quelques mésaventures de Saitama, mais il se dote d’un schéma narratif à la fois convenu et très original. Le personnage de Genos, traditionnel second personnage clef très charismatique et puissant, fait son entrée, mais contrairement à ce qu’on pouvait penser de prime abord, il n’est pas là pour jouer au rival du héros, bien au contraire. En prenant à contrepied quelques ficelles classiques du nekketsu, One sait se montrer original sans en faire trop et surtout, il a trouvé la combinaison idéale pour nous faire rire. D’un côté, Genos est un épris de justice aux grandes tirades dignes des héros tragiques tandis que de l’autre, Saitama n’en a juste rien à foutre. Le duo part d’une idée simple, mais brillante et surtout désopilante, capable d’apporter une bonne dose d’humour pendant encore un long moment.

Toutefois, il serait faux d’affirmer que One-Punch Man ne cherche qu’à faire rire la galerie en se moquant des clichés. Oui, ce premier tome est une réussite humoristique, mais il ne s’arrête pas là, c’est même pour ça que la claque est si forte. Les auteurs, en parallèles aux sketchs, plantent un univers et des personnages, un décor qui pourra évoluer par la suite comme il pourrait rester statique. L’univers mis en avant, présentant une planète similaire à la nôtre, mais soudainement envahie par des créatures hybrides et où la géographie se construit uniquement autour de ville qui ont pour nom des lettres de l’alphabet, pourra être développé dans les prochains volets, ou alors ne rester qu’un immense prétexte pour rendre la série barrée. On ne sait pas comment la suite va se goupiller sachant que le cadre de la série est très dense entre ses premiers mystères autour du contexte ou encore le personnage de Saitama qui, derrière ses allures de gros rigolo de service, bénéficie déjà d’une introspection qui nous questionne sur la nature même du super-héros et des éléments qui le caractérisent. One-Punch Man pourrait être bien plus complexe qu’il en a l’air de prime abord, et les éléments pour sont clairement plantés sur ces premiers chapitres.

Cette mise en bouche ne serait pas non plus ce qu’elle est sans l’un des deux noms présents sur la couverture : Yûsuke Murata. On connaît le talent de l’auteur grâce à Eyeshield 21 et force est de constater qu’il a rapidement pris ses aises sur l’histoire originale de One. Le travail graphique est de haute tenue pour ne pas dire magistrale, ce qui s’oppose d’ailleurs au design très simpliste de Saitama. Le dessinateur maîtrise l’univers d’un bout à bout et navigue entre des ennemis d’apparence très grossière et d’autres qui ont plus d’allure. D’une manière générale, c’est son sens du détail qui impressionnent et les séquences d’action constituent de grands moments tant les pages sont riches et constituent un spectacle visuel dément tout en sachant que son sens de la mise en scène et son découpage permettent de ne pas perdre une seule miette des batailles. Entre les personnages bien grattés sur le papier et les arrière-plans toujours détaillés, demandant un travail monstre à l’auteur lorsqu’il présente des moments de destruction massifs, difficiles de ne pas apprécier une telle esthétique.

Il ne serait pas exagéré de dire que One-Punch Man était attendu comme le messie par les amateurs de manga, voire de bande dessinée tant la série est présentée et vendue depuis des mois comme une valeur sûre, un œuvre graphique hallucinante et une dose de rire bien garnie. Pour toutes ces raisons, l’attente était forte et Kurokawa se devait de répondre aux exigences des futurs lecteurs. A ce titre, la maison d’édition a fait un travail excellent. L’ouvrage est bien conçu, proposant un papier de qualité et une impression exemplaire, rien pour nous permettre de reprocher quoi que ce soit au livre. Aussi, la traduction de Frédéric Malet est aux petits oignons puisque ce dernier parvient avec aisance et brio à adapter et retranscrire tout l’humour de l’œuvre. Cela passer par le franc-parler désopilant de Saitama, le ton global de la série ou encore les noms divers d’ennemis ou de personnages qui sont pour la plupart sujets à des jeux de mots. Plutôt que de copier-coller les termes japonais incompréhensibles, sauf par des notes de bas de page qui gâcherait l’impact vif de l’humour sur le lecteur, les termes sont traduits, adaptés et les idées du traducteur très bien trouvées. Il fallait un tel travail pour que ce premier tome soit idéal dans sa version française, et Kurokawa a largement honoré son contrat.

Il y aurait encore énormément à dire pour parler en long, en large et en travers de ce premier tome de One-Punch Man tant il propose d’éléments divers, soulève des ambiances, s’avère aussi imprévisible que cliché, riche graphiquement et toujours hilarant. Cette première approche de la série est donc excellente et séduira sans mal aucun les amateurs de divertissement bourrin et efficace, ceux qui recherchent un travail de construction graphique, les lecteurs désireux de lire un shônen différent ou bien tout simplement le féru d’une bonne tranche de rigolade. Derrière ses airs décomplexés, One-Punch Man se présente déjà comme une œuvre aux multiples facettes des plus efficaces, difficile alors de ne pas succomber au poing de Saitama !


Critique 3


Dire de One-Punch Man qu'il s'agissait de la licence la plus attendue depuis de nombreux mois est un euphémisme. Au Japon, l'oeuvre originale du très mystérieux auteur original One, publiée sur son blog, a rapidement et étonnamment conquis un public de plus en plus grand, à tel point que Shûeisha a fini par s'emparer du phénomène pour en faire une adaptation manga mieux dessinée (le trait de One étant ultra minimaliste) et sérialisée. Prépubliée au Japon depuis 2012 au sein du Tonari Young Jump, le phénomène OPM nous permet également de retrouver au dessin le mangaka Yusuke Murata, qui nous avait profondément marqués grâce à sa verve et à sa puissance visuelles sur l'excellent Eyeshield 21. Autant dire que pour porter le phénomène, Shûeisha a su confier son adaptation manga au bon dessinateur !

En France, il aura fallu attendre quelques années avant d'enfin voir arriver l'oeuvre ! Au bout de nombreuses offres concurrentielles (vous imaginez bien que nombreux étaient les éditeurs voulant obtenir ce nouveau Graal), c'est finalement Kurokawa qui a empoché le gros morceau, l'éditeur japonais ayant visiblement été séduit par le plan marketing de l'éditeur... et il y a de quoi ! En effet, il sera sans doute très difficile de passer à côté de OPM dans les prochaines semaines (voire encore après), tant Kurokawa s'est appliqué côté pubs : posters créatifs où le héros Saitama brise le mur, petits présentoirs attirant l'oeil et PLV bluffants (reprenant l'immeuble où habite Saitama) en librairies, grandes affiches dans les transports en commun, publicités TV... l'éditeur ne s'y est pas trompé et prouve une nouvelle fois qu'il sait pousser ses séries avec une campagne promotionnelle plus grande que jamais.

Et c'est finalement en ce tout début d'année 2016 que nous pouvons enfin profiter du premier opus du manga, dont l'arrivée fut également fort bien préparée par la diffusion de la première saison de la série animée qui vient tout juste de s'achever (si vous ne l'avez pas vue, allez donc faire un tour sur Anime Digital Network où elle est entièrement gratuite et vaut amplement le coup d'oeil).

Voilà pour la présentation, si vous ne connaissiez toujours rien de OPM. Et si vous êtes dans ce cas, une question commence peut-être à vous assaillir : mais pourquoi donc l'oeuvre était-elle autant attendue ? Qu'a-t-elle donc de si particulier pour attirer un si grand public, dépassant même le cadre des simples lecteurs de manga ?

Hé bien, en premier lieu, il y a Saitama, le personnage principal. Petit bonhomme chauve de 25 ans au chômage, il n'a pas l'air d'avoir grand-chose pour lui, là comme ça, surtout avec sa tête souvent blasée et la façon dont il vivote dans son appartement. Mais il y a un tout petit détail qui change un petit peu la donne. Juste un tout petit peu. En fait, il est surpuissant. Tellement puissant qu'un seul coup de poing lui suffit pour terrasser tous les monstres et les super-méchants qui déboulent de nulle part pour ravager des villes entières. Cette force incroyable, il l'a acquise après trois années d'un entraînement tellement intensif qu'il en a perdu ses cheveux. Et du coup, Saitama, bah il joue les super-héros pour tuer le temps. Comme ça. Tu peux pas test.

"- Qui es-tu ?
- Un type qui joue les superhéros pour passer le temps."

Ce qui est génial avec Saitama, c'est... ben... tout. Son physique, tout d'abord. Avec sa tête de crâne d'oeuf à la mine blasée, il ne paie généralement pas de mine, et Murata joue d'ailleurs énormément là-dessus pour nous faire rire : capable d'être ultra sérieux et presque réellement charismatique (comme sur la couverture), le petit père peut soudainement anéantir toute trace de ce charisme en tirant des têtes simplistes très variées et délirantes, à laquelle il n'est pas rare qu'il ajoute une réplique désabusée, décalée (dégommer un monstre en lui reprochant d'avoir abîmé son plafond, c'est cool), ou teintée d'une délicieuse petite pointe de cynisme. Pourquoi est-il comme ça ? Ne ressent-il pas la peur face à ces hordes d'ennemis parfois colossaux, comme ce titan de la taille d'une ville ? Ben non, vu qu'il est le plus fort, que rien ne le blesse et qu'il lui suffit d'un coup de poing pour terrasser complètement l'ennemi. C'est bien pour ça qu'il apparaît si blasé, le Saitama : quand il affronte les ennemis, il n'y a aucun challenge. Et à force, il commence rudement à s'ennuyer, les victoires n'ont pas vraiment de saveur, et il n'est d'ailleurs pas rare de le voir se lamenter à ce sujet... En devenant le plus puissant, difficile pour lui de ressentir joie, peine, colère face aux ennemis... n'aurait-il alors pas perdu quelque chose de plus important que la force ? Une piste qui pourrait se développer par la suite et rendre le récit plus étonnant.

En face de Saitama, il y a une foultitude de personnages qui déboulent eux aussi.
Il y a tout d'abord Genos, qui, dans ce premier tome, est la seule autre figure importante que l'on peut pour l'instant classer dans le rang des alliés, des gentils. Apparaissant en milieu de tome, ce cyborg au passé douloureux et suivant son propre objectif se prend d'admiration pour Saitama au point de vouloir devenir son disciple. Moins comique que Saitama pour l'instant, on reste très curieux de voir ce qu'il a à nous offrir par la suite !
Mais il y a surtout la ribambelle de méchants, de super vilains, qui sont sans aucun doute un bonheur pour un Yusuke Murata qui peut se lâcher dans leurs dégaines ! Car la force des nombreux super-vilains de OPM, c'est sûrement leur diversité, qui est telle qu'elle peut amener absolument toutes les possibilités allant de choses assez classes visuellement comme la femme-moustique ou le titan, à totalement ridicules et donc hilarantes. Dites par exemple bonjour à Vaccineman, né de la pollution causée par les humains, à Crabotaure, qui a bouffé tellement de crabes qu'il en est devenu un, ou à Dragotaupe, une... grosse taupe.
En somme, tous les délires semblent possibles, du plus ridicule au plus impressionnant. Mais que ce soit dans un cas ou dans l'autre, Murata n'a pas son pareil pour impressionner, que ce soit visuellement, ou dans son humour décalé ou surprenant. En effet, il n'est pas rare que les méchants soient un peu... lâches ou idiots, pour rester polis, à l'image de ce que le titan fait à son frère (tellement ballot et hilarant !) ou de l'homme-gorille qui flippe sévère. Et quand les méchants restent méchants comme des méchants jusqu'au bout, à l'image de la femme-moustique, toute la tension se voit généralement brisée soudainement avec un bon coup de poing. Ou comment nous prendre à contrepied.

Et prendre le lecteur à contrepied, justement, est sans doute l'un des éléments ayant le plus contribué à faire parler de OPM.
Dans la majorité des mangas les plus populaires (One Piece, Naruto, Bleach...) et de manière générale dans énormément de titres d'action ou estampillés "nekketsu" (dont Eyeshield 21, le précédent manga de Murata), les choses commencent avec un héros assez faible, devant devenir plus fort à force d'entraînements, et avec la volonté de protéger ses proches, ses amis. Ici, Saitama est déjà le plus fort. Il s'est entraîné pour devenir le plus fort des superhéros, et quand le récit commence, il l'est. Quant à des proches à protéger, notre brave célibataire au chômage n'a pas l'air d'en avoir. Il se bat pour passer le temps, quoi. Pas de grandes morales ni de grandes valeurs sur l'amitié, etc., dont on nous abreuve souvent. D'ailleurs, bien au contraire, il n'est pas rare qu'un combat de Saitama contre un méchant amène quelques dommages collatéraux "minimes", comme un immeuble qui s'effondre ou une ville détruite, tout ceci dans l'indifférence, juste pour servir un petit gag un peu cruel et débile du plus bel effet. Quant aux habituelles phases d'entraînements, et de flashback qui y sont liées, ici elles ne sont point ! Mieux, les auteurs se font un plaisir de s'en moquer, à l'image de la manière dont Genos raconte son passé en un gros bloc de texte qui saoule Saitama !
Avec tout ça, on a presque envie de dire que One et Murata se moquent un peu de toutes ces séries d'action basées sur ces recettes habituelles et les étirant parfois à outrance.

Difficile, également, de ne pas revenir sur le travail de dessinateur de Murata. On a déjà parlé de son talent pour dessiner les deux facettes de Saitama, de son inventivité dans les vilains, et de son talent pour amener un humour désopilant. Mais il est loin de se limiter à cela, les lecteurs d'Eyeshield 21 en savent quelque chose. Sur sa précédente série, le dessinateur bluffait déjà dans la densité de son coup de crayon, dans les notions de profondeur et de perspective, et dans le dynamisme incroyable des planches. On retrouve tout ça ici. Car si Saitama affiche souvent des têtes simplistes délirantes, tout le reste est toujours très fourni.
Les décors sont omniprésents, notamment les décors urbains, et il n'est pas rare qu'il s'y passe quelques petites choses, ce qui contribue grandement à rendre l'oeuvre encore plus animée. Le trait est d'une densité exemplaire, l'auteur se fait plaisir avec de superbes variations d'angles de vue (ce qui renouvelle sans cesse la vision du lecteur), et on peut également saluer l'impressionnant travail effectué sur les plus importantes onomatopées qui font partie intégrante du dessin (et là aussi, Murata s'amuse beaucoup avec les angles de vue). Ce n'est sans doute pas pour rien que l'adaptation animée a suivi de très près l'enchaînement des cases du manga, tant le rendu est sublime.

Et disons donc quelques mots rapides sur le rapport entre le manga et l'anime. Ce dernier suivant fidèlement le manga, la version papier garde-t-elle un intérêt pour celles et ceux ayant vu la série TV ? La réponse est clairement oui. Tout d'abord parce que l'anime n'adapte que les premiers tomes, mais aussi parce qu'il effectue quand même quelques modifications et omet certains passages brillamment mis en scène par Murata dans le manga. Et puis, la version manga laisse plus de temps pour apprécier la verve visuelle du dessinateur et les nombreux gags qui vont avec. On peut s'attarder sur les dessins avec grand bonheur.

Enfin, côté édition, c'est du tout bon, du travail étudié à chaque instant pour offrir le meilleur plaisir de lecture possible.
La traduction est signée Frédéric Malet, un habitué des titres mêlant action et humour (on lui doit Blood Lad, Hayate, Assassination Classroom, Gintama...), qui offre ici un travail vivant et ne passant à côté d'aucun gag, pas même sur les noms des personnages. Sur ce dernier point, OPM a pour particularité d'offrir des jeux mots, et un travail d'adaptation était nécessaire pour pouvoir amuser le lecteur français. Ce travail est redoutablement efficace (aaaah, le Professeur Kidob...), d'autant qu'il est en parfaite adéquation avec les noms de la série animée !
Les onomatopées constituaient l'une des principales craintes, tant certaines font partie intégrante du dessin de Murata. Là aussi, Kurokawa a fait un travail très appréciable. Les plus petites onomatopées, celles faisant juste un petit bruit de fond, ont été traduites, avec des choix de polices toujours bien choisis. Et les plus grandes onomatopées ont heureusement été conservées sous leur forme originale pour ne pas dénaturer le travail du dessinateur. Un dosage très juste.
Pour le reste la qualité d'impression est très bonne, le papier à la fois souple et suffisamment épais pour ne souffrir d'aucun problème de transparence... Le livre est vraiment agréable à tenir en main.

OPM est-il donc la claque attendue ? Evidemment que oui ! Servie dans une excellente édition, l'oeuvre de One et de Murata nous comble sur tous les points. Et il ne s'agit pourtant que du premier volume d'une série qui n'a pas fini de nous étonner.
  

Critique 3 : L'avis du chroniqueur
Koiwai

17.5 20
Critique 2 : L'avis du chroniqueur
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18 20
Critique 1 : L'avis du chroniqueur
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17 20
Note de la rédaction
Note des lecteurs