Museum - Graphic Vol.1 - Actualité manga
Museum - Graphic Vol.1 - Manga

Museum - Graphic Vol.1 : Critiques

Museum - the serial killer is laughing in the rain

Critique du volume manga

Publiée le Vendredi, 19 Mai 2017

Le lieutenant Sawamura s'est toujours donné à fond dans son travail dans la police, au point de complètement négliger sa famille. Et à l'heure où son épouse s'en va sans rien dire en emportant avec elle leur jeune fils, une nouvelle affaire lui tombe entre les mains. Dans une rue, le corps sans vie d'une jeune femme a été découvert, dévoré par des chiens, et à l'horreur de la scène s'ajoute un petit bout de papier : "La sanction de la pâtée pour chien". Secondé par le jeune sergent Nishino, Sawamura entame l'enquête, et tandis que les pistes restent maigres, un nouveau cadavre est découvert, puis deux, puis trois... toujours sur le même mode opératoire : une mise en scène particulièrement violente et macabre, et à chaque fois la présence d'un autre petit de papier affichant un verdict : "La sanction pour comprendre la souffrance de sa mère", "La sanction de l'amour partagé", etc.
Quel est le but de cet étrange et morbide jeu de pistes que le mystérieux assassin entretient avec la police ? Quelles sont les motivations du tueur ? Pourquoi de telles scènes de crimes ? Et le meurtrier pourra-t-il seulement être démasqué ? Alors que l'affaire progresse doucement et que des pistes apparaissent, Sawamura ne sait pas encore à quel point cette enquête sera celle de sa vie...

Ryôsuke Tomoe est un tout jeune mangaka de 34 ans, qui a débuté sa carrière en 2009 en remportant le prix Tetsuya Chiba grâce à son histoire courte "Girl and Killer". Et Museum n'est autre que sa toute première série. Publié en 2013-2014 dans le Young Magazine de Kôdansha, ce thriller est d'abord compilé en trois tomes reliés dans première édition nippone. Auréolée d'une flatteuse réputation, la série est ensuite adaptée en 2016 en un film réalisé par Keishi Otomo (réalisateur des films live March comes in like a lion, Kenshin le Vagabond, The Top Secret...) et en une version roman écrite par Osamu Makino. Dans la foulée, une nouvelle édition en 2 tomes voit le jour, celle-ci étant enrichie de chapitres bonus.

C'est en grande pompe que Pika Edition nous amène la série en langue française, celle-ci débarquant d'emblée dans ses deux différentes éditions. Ainsi, l'édition en 3 tomes rejoint la collection seinen de l'éditeur, tandis que celle en 2 volumes intègre la collection Graphic en grand format, l'objectif étant sans nul doute de toucher un public plus diversifié. Et autant le dire tout de suite, le polar qui nous est proposé ici a effectivement tout ce qu'il faut pour plaire aux amateurs du genre issus de divers horizons, tant le travail de l'auteur est immersif et captivant.

S'il fallait faire une comparaison, il faut dire qu'il est difficile, en entament la lecture, de ne pas songer au film culte Se7en de David Fincher, le schéma partant sur des bases similaires : un duo d'enquêteurs avec un "vieux" (disons une quarantaine d'années, sûrement) briscard et un jeune sergent, la découverte de cadavres tous plus mutilés les uns que les autres dans des mises en scène variées et qui ont de quoi soulever les coeurs, des pistes d'abord nébuleuses puis qui semblent se rejoindre, une volonté de décortiquer le comportement méthodique du meurtrier et de cerner ses motivations, un assassin "à la John Doe" mystérieux, doté d'un masque de grenouille, très méticuleux, qui semble toujours avoir un coup d'avance et qui joue avec la police... et une atmosphère pesante, très pesante, qui doit autant à la cruauté méthodique du tueur qu'à un très gros travail d'ambiance effectué par l'auteur : la pluie ne cessant de tomber, un profond réalisme dans les personnages et les décors, une pointe de froideur, un vaste souci du détail où les angles de vue ne semblent jamais choisis au hasard et où le moindre élément paraît pouvoir avoir son importance...

Ce grand soin de mise en scène, implacable, ne quitte jamais l'oeuvre, y compris quand le récit finit par s'emballer sur des enjeux plus personnels concernant Sawamura. A ce titre, certains passages sont brillamment menés : on pense notamment aux quelques dizaines de pages commençant à partir de la page 141, qui, grâce à l'excellente utilisation des décors qu'il faut observer, laissent deviner avec effroi la menace qui est sur le point de tomber implacablement sans que Sawamura puisse y faire quoi que ce soit. L'intrigue et pourtant assez classique, en jouant sur la colère, la peur et le désespoir d'un homme qui est un excellent policier, mais qui a des choses à se faire pardonner dans un rôle d'époux et de père qu'il n'a jamais tenu, et qui va devoir faire de cette enquête une affaire personnelle au point de braver les lois. Mais elle est redoutablement bien menée, sans rallonges, sans égarements et parvient à tenir en haleine, tant l'ambiance sombre installée par le mangaka fait qu'il est impossible de savoir comment les choses vont tourner.

Pour qui veut un thriller court, maîtrisé, bien construit et visuellement impeccable, Museum, sur sa première moitié, se place pour l'instant dans le haut du panier.

Dans son édition Graphic, le titre est donc proposé en grand format, avec une couverture sobre où l'on appréciera les effets de la pluie, une petite préface de Luc Jacamon, et un chapitre bonus.
Grâce à un papier bien épais et à une excellente impression, le grand format se justifie bien, tant il permet de mieux profiter des planches très travaillées de l'auteur.
Après 290 pages, on découvre le premier chapitre bonus, absent de l'édition en trois tomes, et plutôt intéressant puisqu'il nous invite à suivre pendant une trentaine de pages le meurtrier juste avant ce qui se passe dans le chapitre 1. On découvre alors un assassin très méthodique et habile, dont on ne voit jamais totalement le visage.
A la traduction, l'expérimenté Thibaud Desbief livre un excellent travail, fluide, posé, collant bien à l'atmosphère. La traduction ou le sous-titrage des onomatopées sont tout aussi convaincants.


Critique 1 : L'avis du chroniqueur
Koiwai
17.5 20
Note de la rédaction
Note des lecteurs