Good Morning Little Briar-Rose Vol.1 - Actualité manga
Good Morning Little Briar-Rose Vol.1 - Manga

Good Morning Little Briar-Rose Vol.1 : Critiques

Ohayou, Ibarahime

Critique du volume manga

Publiée le Jeudi, 12 Octobre 2017

Tetsu Misato, lycéen, a décidé depuis peu de se trouver du travail et de renoncer à la fac si besoin, soi-disant par besoin d'argent, ce qui n'a pas manqué de susciter une vive opposition de son père. Du côté de ses deux petites soeurs, l'adorable Suzu le soutient candidement, tandis que la plus mordante Ryô lui conseille de poursuivre les études. Quant à sa mère... elle n'est pas là. A force d'insistance, le jeune garçon est parvenu à se faire embaucher dans la petite société de son père en tant qu'employé de maison au sein du Manoir de la prestigieuse famille Karasawa, située sur les hauteurs de la ville. D'emblée, Kumada, un autre employé, le met en garde : il ne faut jamais s'approcher de la petite annexe située au bout du jardin. On dit que c'est en ce lieu que vit Shizu, la fille de la famille qui, en raison d'une maladie, ne peut pas sortir. Mais cette Shizu, personne ne l'a jamais vue parmi les employés... Existe-t-elle vraiment ?
Tetsu ne tarde pas à voir que oui, quand il l'aperçoit à la fenêtre. Un petit peu plus tard, alors qu'il se réveille dans le jardin après s'être assoupi, il découvre la jeune fille debout devant lui. Attiré par son sourire empli d'une étrange tristesse, l'adolescent ne peut s'empêcher de braver l'interdit. Sur demande de Shizu elle-même, il reviendra la voir chaque semaine, lors de son jour de service. N'a-t-elle donc aucun ami ? Quelle est cette soi-disant maladie qui fait qu'on lui interdit de sortir ?
Tout en s'interrogeant sur cette jeune fille et en observant certaines contradictions en elle, il s'éprend peu à peu d'elle... sans savoir encore les étonnants secrets qu'elle renferme. Qui est réellement Shizu Karasawa ?

Nouveau shôjo des éditions Akata, Good Morning, Little Briar-Rose intègre cet automne la collection principale des éditions Akata, et la sous-collection mixte. Ce manga, qui s'est bouclé l'été dernier au Japon avec son sixième volume, est la deuxième oeuvre et la première série publiée en France de Megumi Morino (aussi appelée Mei Morino), une artiste qui a débuté sa carrière en 2013. Depuis l'annonce de sa publication française, l'oeuvre n'a pas manqué de susciter notre curiosité, pour son pitch on ne peut plus mystérieux bien sûr, mais aussi parce qu'elle peut se targuer d'avoir reçu au Japon les éloges de plusieurs mangakas reconnus dans des genres bien différents : Yoshitoki Oima (A Silent Voice, To Your Eternity), Yuki Suetsugu (Chihayafuru), ou encore Kinoko Nasu (le créateur de la saga Fate). la série a su créer en nous une forte attente, et disons-le d'emblée, ce premier volume ne déçoit pas du tout.

Dès le départ, Megumi Morino parvient à installer une atmosphère tout à fait particulière, à la croisée de plusieurs styles. On trouve des notes d'humour assez régulières, un fond sociétal crédible et moderne autour du désir de Tetsu de travailler, de ses relations au lycée, ou de l'absence de sa mère dont on finit vite par découvrir la raison, des pointes presque angoissantes concernant certains éléments dont il est difficile de parler sans spoiler, le tout dans un cadre qui reste assez axé sur un aspect quotidien... mais l'aspect le plus captivant est bel et bien l'aura de mystère que le récit développe dès ses toutes premières pages, à partir du moment où est évoquée l'existence de cette Shizu que personne n'a jamais vu parmi les employés du manoir.

Cet aspect mystérieux, Morino l'approfondit vraiment très, très bien au fil des pages. La première énigme concernant l'existence ou non de Shizu passée, le lecteur ne cesse plus de voir les interrogations se lancer sur cette jeune fille qui, depuis très longtemps, vit complètement en solitaire. Pourquoi n'a-t-elle pas le droit de sortir ? Quelle est donc la nature de sa maladie, elle qui a pourtant l'air en bonne santé ? Il s'agit des premières interrogations à son sujet, mais ce sont loin d'être les dernières, car les mystères ne cessent d'apparaître alors même que certaines réponses nous parviennent déjà.
Et pour entretenir efficacement tout cela, la mangaka a fait un excellent choix de narration, qui plus est assez rare dans la majeure partie des shôjo publiés en France : son personnage principal est un garçon, et c'est quasiment exclusivement à travers lui que l'on suit les choses. Il n'est pas forcément rare qu'un shôjo se plonge par intermittences du côté des personnages masculins (rien que dans le magazine de prépublication japonais de la série, on peut citer Le garçon d'à côté, ma gamine, la fac et moi, ou encore La maison du soleil qui se placent régulièrement du point de vue masculin), mais ici le lecteur vit vraiment tout à travers les pensées et les observations de Tetsu, ce qui est déjà moins courant. Ainsi, en plus de rendre l'oeuvre vraiment très mixte, on ne peut que relever en même temps que le lycéen tout ce qu'il a l'occasion de constater sur Shizu : son sourire qui lui rappelle étrangement quelqu'un, ses goûts et passe-temps contradictoires (elle aime faire le ménage alors que sa chambre est sens dessus dessous, elle a plein de beaux vêtements qu'elle ne porte jamais...), le fait qu'elle semble parfois soudainement changer de personnalité... sans oublier les à-côté dont Tetsu a vent, comme certaines rumeurs sur le fait que l'annexe est dit hanté depuis longtemps ou sur la légende d'une petite fille qui se serait noyée dans la piscine de l'école il y a longtemps... L'aura de mystère, qui est ainsi parfaitement installée, donne alors totalement envie au lecteur d'essayer d'analyser toutes les petites observations, les petites remarques, qui peuvent être autant d'indices pouvant mettre sur la voie de la vérité concernant l'identité de cette demoiselle, et pouvant donner un sens à chacune des constatations sur son comportement bizarre.
En enchaînant les petits observations difficiles à expliquer et en nous les présentant sous le regard de Tetsu, Morino joue très bien son coup, car elle accumule ainsi les petits détails qui donnent très vite envie au lecteur de se faire ses propres hypothèses, avant de les voir se confirmer à demi-mot ou s'effondrer. Par exemple, on peut légitimement se demander si la jeune fille est un fantôme, surtout au vu de certains détails, mais le simple fait qu'un policier puisse la voir nous permet d'écarter naturellement l'idée. De même, on s'étonne de la voir parler comme si elle était la mère de Tetsu et de la voir agir tantôt comme une enfant tantôt comme une adulte, si bien que l'on peut se demander si elle a un rapport avec la génitrice du jeune garçon... Mine de rien, Morino nous balade tranquillement, nous pousse constamment à nous interroger, et c'est d'autant plus brillant pendant tout le premier chapitre, qui se déroule de façon classique mais distille déjà plein de détails mystérieux et intrigants, jusqu'à une toute fin de chapitre qui marque un premier climax fort.
Et ce sera comme ça à chaque chapitre : tout en laissant de côté des hypothèses, on a l'occasion d'en voir surgir de nouvelles via certains indices, et la lecture reste alors addictive à chaque page, encore plus quand on voit que la mangaka parvient à offrir à chaque fin de chapitre des éléments encore plus mystérieux qui relancent constamment l'envie de découvrir la suite. Le mieux dans tout ça, c'est que la majeure partie des détails mystérieux, des indices, semblent tous trouver peu à peu une raison logique, et qu'il s'agit rarement de la raison que l'on supposait, du moins pour l'instant. Le récit avance très vite puisque arrivé en fin de tome on en sait déjà beaucoup plus sur Shizu a priori. A partir de là, il est impossible d'en parler plus sans trop en dire, tant ça avance bien tout en révélant déjà beaucoup de surprises. Dans tous les cas, c'est fou de voir que rien ne semble laissé au hasard, et de constater que les révélations de fin de tome donnent encore plus envie de découvrir la suite. C'est pour l'instant addictif, très bien écrit, parfait dans l'aura de mystère, et c'est un véritable modèle de narration, tout simplement.

Pour accompagner ce récit captivant, Morino dévoile des visuels saisissants de par leur finesse. Le trait est à la fois doux et envoûtant, mais aussi réaliste dans son cadre et dans l'utilisation des trames, le découpage accompagne l'histoire avec naturel et sans trop en faire, et les quelques changements soudains d'atmosphère (surtout un passage vers la fin, plus angoissant) sont très réussis. Le personnage de Shizu est particulièrement bien travaillé, tant il peut dégager de choses différentes. Son physique assez gracile peut dégager une fragilité naturelle, tout comme un aspect plus vivant ou enfantin lorsqu'elle se montre plus agitée. Ses expressions faciales, tantôt douces, tristes ou perdues par exemple, peuvent être sublimes, notamment grâce aux yeux et à la bouche. L'artiste déniche à plusieurs reprises des angles de vue magnifiques, qui à eux seuls entretiennent toute une ambiance, on pense par exemple à la contreplongée sur le ciel étoilé pendant la nuit des étoiles. Enfin, on notera que la mangaka utilises ses onomatopées uniquement quand c'est strictement nécessaire, et que celles-ci, quand elles sont présentes, ne sont pas là au hasard et servent bien l'ambiance ou l'action. Il est possible d'avoir un bon nombre de pages à la suite sans grosses onomatopées, ce qui amène une ambiance assez éthérée parfois.

Abouti en termes d'ambiance et de twists cohérents, porté par une narration impeccable où l'on sent que la mangaka sait où elle va et par des visuels immersifs, faisant aller son lecteur de surprise en surprise tout en donnant l'impression que rien n'est laissé au hasard, le premier volume de Good Morning, Little Briar-Rose fascine, devient facilement très addictif, se paie le luxe d'être très mixte, et paraît bien ambitieux. La série ne pouvait sans doute pas mieux démarrer, et se présente comme l'une des nouveautés à suivre de très près dans les mois à venir.

Akata nous livre son nouveau bébé dans une édition soignée. On a droit au petit format habituel de l'éditeur sur les shôjo/shônen, à un papier souple et sans transparence, à une bonne impression, et à une traduction très soignée de Miyako Slocombe qui colle toujours à l'ambiance. Saluons aussi le travail très appliqué sur le lettrage.

Critique 1 : L'avis du chroniqueur
Koiwai
17 20
Note de la rédaction
Note des lecteurs