Dilemma Vol.1 - Actualité manga
Dilemma Vol.1 - Manga

Dilemma Vol.1 : Critiques

Shônen Y

Critique du volume manga

Publiée le Vendredi, 28 Août 2015

Critique 1


Le survival est un genre qui a décidément la cote en ce moment, du moins du côté du manga. Depuis Doubt de Yoshiki Tonogai, les œuvres se sont multipliées sur le marché et nombre d’éditeurs ont tenté de proposer leur petite pépite, mais chaque récit n’avait pas la même qualité… C’est alors au tour de Komikku de proposer Dilemma, un titre que nous devons à Hajime pour le scénario et à Tatsuya Tôji pour le dessin, deux artistes qui signent leur première œuvre. Se démarquer avec une œuvre prenant pour thème la mort est difficile, mais Dilemma peut-il y arriver ? Ce premier tome nous laisse penser que oui…

Yuzuru n’est pas doué pour les relations sociales et sa plus grande crainte est d’être un marginal, quelqu’un qu’on exclurait du système social. Il entre pourtant dans une nouvelle classe dans un lycée où il ne connaît personne. Autrement dit, c’est la pire crainte qu’il pouvait imaginer. Mais alors qu’arrive l’heure de sa présentation au reste de la classe, Yuzuru retrouve tous ses camarades morts, leurs corps affalés au sol, mais leurs âmes pendantes au plafond. Devant lui surgit Wabiko, une demoiselle se présentant comme un demi-dieu qui explique la situation au jeune Yuzuru : par les épreuves qui l’attendent, il pourra sauver la vie de certains camarades, mais devra en revanche en sacrifier d’autres… Pour notre héros, le choix le plus difficile de sa vie s’impose à lui.

Dilemma n’est pas un survival à proprement parler. Ce premier tome est assez clair là-dessus, l’intrigue ne consiste pas à présenter une troupe de personnages à la mort en vue de les éliminer un à un, mais bien de ramener progressivement les élèves d’une classe à la vie tandis que d’autres trépasseront. Par les épreuves qui lui sont imposées, Yuzuru doit alors décider qui sauver et qui sacrifier, une optique des plus intéressantes puisque le héros est assez loin des protagonistes basiques qui n’agissent que par sens de la justice, ce dernier réfléchissant avant tout de différentes manières, tentant de distinguer la moindre morale dans ces choix qui n’ont pourtant pas de bonne réponse. Les épreuves passent alors par un cap hautement psychologique, un point d’autant plus passionnant que la suite semble inclure d’autres personnages dans le jeu des choix et permettra de développer une dynamique par rapport à Yuzuru.

En dehors des épreuves en elles-mêmes, l’intrigue des responsables du jeu des dilemmes (appelons-le ainsi puisque tel est le titre français de la série) ne manque pas de piquer notre curiosité. Sous ses airs de simple lycéenne, Wabiko est un personnage intrigant, assez amusant, mais qui nous permet de nous questionner sur le motif du jeu, sans compter que certains éléments en rapport avec les « Dieux » nous sont déjà donnés sur ce premier volet. Nous sommes clairement dans du « wait and see », mais on en attend déjà beaucoup de la trame de fond qui se développera certainement au fil du temps.

Enfin, la critique sociale que représente ce premier tome a de quoi marquer. L’introduction est en effet assez longue et passe par tout un tas de questionnements de Yuzuru par rapport à sa future place dans la classe de lycée qu’il est sur le point d’intégrer. Toute cette machination psychologique met en exergue le malaise de la société, notamment la société nippone et ses hiérarchies d’individus et la manière de faire naître un marginal. Le propos des auteurs est assez fort pour un titre de ce genre et cela va de pair avec le sujet central de Dilemma qui impose à son héros de choisir des survivants et des morts à partir de critères abstraits qui mettent en valeur la condition de Yuzuru en tant qu’humain. On espère que toutes ces idées ne s’envoleront pas dans la suite de l’œuvre, car elle y apporte beaucoup de cachet.

Pour servir le scénario de Hajime, le dessin de Tatsuya Tôji est déroutant par ses codes et ses lignes très shônen qui tranchent beaucoup avec le sérieux qu’a le récit pour traiter son sujet et son protagoniste. Une fois la surprise retombée, on apprécie un style classique, mais qui met l’accent sur les expressions des personnages afin d’appuyer leurs réactions, de les rendre choqués au moment opportun ou ambigus quand une nouvelle figure plus difficile à cerner fait son apparition. Sans transcender, le dessin du mangaka remplit aisément sa part du contrat.

L’édition de Komikku ne souffre d’aucune fausse note. Le volume est sobre, mais efficace, jouissant notamment d’une bonne qualité d’impression, et la traduction sonne très juste et adapte correctement ce récit plus complexe qu’il n’y paraît. L’éditeur est habitué aux très bonnes copies et nous le montre cette fois encore.

Réfractaires aux survival, ne fuyez pas Dilemma trop vite. Ce premier volume montre aisément que le titre se démarque correctement du genre en prenant à revers ses concepts et en présentant un héros en perpétuel questionnement quant à ses actes et au monde qui l’entoure, permettant alors de présenter ce début d’œuvre comme une sorte de critique sociétal tout en proposant un divertissement hautement efficace. Excellent début d’histoire donc, et on ne peut qu’espérer que la suite reste


Critique 2


Yuzuru est ce qu'on pourrait appeler un élève marginal ou inadapté. Depuis toujours, il est peu sociable et est incapable de faire des choix, ce qui lui a toujours valu d'être mis à l'écart. Et ce n'est pas son arrivée dans un nouveau lycée qui va arranger les choses : alors qu'il espère parvenir à s'adresser normalement à ses nouveaux camarades lors de sa présentation en classe, chaque pas le rapprochant de son nouvel établissement scolaire le replonge un peu plus dans ses vieilles angoisses. Il a peur de faire mauvaise impression, de passer pour un élément en trop dès son arrivée dans la cour... Et une fois devant sa future salle de classe, entendre tous les élèves discuter de tout et de rien derrière la porte finie  de l'achever, tant il a peur de ne pas pouvoir s'intégrer au milieu de ces adolescents qui se connaissent déjà tous. Il préférerait être ailleurs, loin d'ici, loin de tous ces gens, à tel point qu'au fond de lui, il émet une très brève prière : qu'ils disparaissent tous. Mais tout aussi brève fût-il, son souhait a été entendu : quand il ouvre la porte, il découvre les corps de la trentaine d'élèves et de son professeur, inertes. Ils sont tous morts. Alors que la panique le gagne, Wabiko, une étrange jeune fille, apparaît en se présentant comme une apprentie déesse venue exaucer son souhait. Et à présent, voici le jeune garçon affublé du droit de vie ou de mort sur ses camarades : à travers une succession d'épreuves, Wakibo lui offrira l'opportunité de ressusciter une personne de son choix. Mais en contrepartie, une autre mourra définitivement...

Issue du même magazine japonais que Darwin's Game, la nouvelle série des éditions Komikku s'inscrit elle aussi dans la droite lignée de cette vague de mangas de type "survival" ou "jeux de la mort"... Dans la droite lignée ? Hé bien, pas tout à fait, car Dilemma propose un contrepied tout à fait intéressant : là où l'on a habituellement des héros luttant pour leur survie, Hajime (scénario) et Tatsuya Tôji (dessin) offrent au contraire un personnage principal contraint de choisir qui vivra et qui mourra. Et "contraint" est le bon mot, tant la situation est difficile pour lui... En effet, comment pourrait-il décider qui ressusciter et qui sacrifier dans une classe où il ne connaît absolument personne ? Et même s'il en connaissait certains ou se sentirait des affinités particulières avec quelques noms, comment pourrait-il décider de qui doit mourir sur cette simple base, simplement parce qu'il en connaît un vaguement plus que les autres ? Le fait de sacrifier des inconnus atténuera-t-il la difficulté de la décision ? De même, lors d'une deuxième épreuve où il connaît les deux noms, comment choisir entre les deux ? Quelles que soient ses interrogations, il n'a pas le choix : lui qui n'a jamais rien su décider doit désormais prendre des décisions, faire des choix... et les assumer, car il sait très bien qu'aucun choix ne pourra être bon.

La plus grande crainte avec une série ayant un personnage principal doté du droit de vie et de mort était de se retrouver avec un bonhomme inutilement dark et se prenant dès lors pour un dieu tout puissant (le syndrome Death Note...). Ici, ce n'est aucunement le cas : Yuzuru s'interroge constamment sur les choix à faire, sait que n'importe lequel sera mauvais puisque quelqu'un mourra... A chaque épreuve, ce n'est pas le fait de pouvoir ressusciter quelqu'un qui le tourmente le plus, mais bien le fait de devoir signer la mort d'une autre personne... et il devra vivre avec ça, en prenant conscience de la valeur de la vie. Le titre français "Dilemma" s'avère parfaitement choisi, tant chaque épreuve devient un dilemme, y compris quand il se retrouve avec un compagnon on ne peut plus difficile à cerner. Le fait d'être plusieurs à décider d'une mort permettrait-il de soulager un peu le choix en partageant entre plusieurs personnes le sentiment de culpabilité ? Pas si sûr...

Ainsi les auteurs parviennent-ils à développer de nombreuses questions autour de leur concept... tout en proposant un divertissement réellement efficace ! Les premières épreuves sont plutôt intéressantes dans leur conception. Et en plus des nombreux tourments intérieurs de Yuzuru, le parfum permanent de mort et de dilemme entretient constamment une ambiance tendue, ce qui n'empêche pas quelques toutes petites notes d'humour apportées par la mignonne, mais intransigeante Wabiko, celle-ci s'adonnant à un certain engouement dans sa tâche ou à quelques petits jeux (s'amuser aux ombres chinoises pendant que Yuzuru se tourmente, voila voila). Très intrigante, la jeune fille pose également un certain regard sur Yuzuru : tantôt cynique et cassante, tantôt encourageante, elle n'hésite pas à commenter les choses, sans prendre parti dans les choix. Mais elle n'est pas la seule à intriguer, car au-dessus d'elle, d'autres forces apparaissent déjà...
De même, on appréciera la cohérence des réactions face aux morts de la classe : ici, preuve qu'il n'est pas question d'un simple jeu de la mort "boucherie gratuite" comme il y en a tant, on a tout le loisir d'appréhender les réactions après les décès. Réactions des professeurs qui découvrent tous les corps sans vie, des sapeurs-pompiers qui ne peuvent rien faire, des familles que l'on voit brièvement meurtries à travers les infos télévisées... Les décès ont bel et bien une consistance dans l'intrigue, ont un impact qui, forcément, ne peut que renforcer les tourments de Yuzuru et le climat général.

Visuellement, l'oeuvre vise l'efficacité avant tout : le trait est expressif et dynamique, la narration est claire et directe, et il y a un vrai sens de la mise en scène avec des angles de vue souvent bien choisis et variés. Du bon travail sans énorme prétention et pleinement au service du récit, tout simplement.

Avec ce premier volume, Dilemma emballe donc totalement. Très efficace dans sa mise en forme, ce récit sans temps mort parvient à développer comme il se doit son concept, pour un résultat qui pourrait vite devenir très addictif. Une excellente surprise !


Critique 2 : L'avis du chroniqueur
Koiwai

17 20
Critique 1 : L'avis du chroniqueur
Takato
17 20
Note de la rédaction
Note des lecteurs