Born To Be On Air ! Vol.1 - Actualité manga
Born To Be On Air ! Vol.1 - Manga

Born To Be On Air ! Vol.1 : Critiques

Namiyo Kiite Kure

Critique du volume manga

Publiée le Jeudi, 20 Octobre 2016

Hokkaido. Dans un bar de Sapporo, Minare Koda, 25 ans, vient de se faire plaquer et noie son chagrin d'amour dans l'alcool. On va dire que la jeune femme a un peu l'alcool mauvais, puisqu'elle se met à laisser couler toute sa rage au premier inconnu qui passe... Inconnu ? pas tout à fait. Car Kanetsugu Matô, 49 ans, la fine moustache impeccable travaille pour une station de radio populaire. Le bougre est farceur, aussi a-t-il décidé d'enregistrer la conversation de l'alcoolique en face de lui... pour la diffuser sur le sondes le lendemain ! En reconnaissant sa voix et ses inepties à la radio le lendemain, le sang de Minare ne fait qu'un tour : elle laisse en plan le restau où elle travaille en tant que serveuse pour aller dire ses quatre vérités au type de la radio. Mais cela va avoir des conséquences inattendues pour elle, car Matô, qui semble avoir repéré un talent vocal en elle, lui propose de faire ses premiers pas à la radio...

Après nous avoir séduit à de nombreuses reprises chez Casterman avec des titres tous biens différents (L'habitant de l'infini, Snegurochka, Halcyon Lunch, Emerald), Hiroaki se voit pour la premier fois publié par une autre boîte que son éditeur français historique, à savoir Pika Edition. Avec Born to be on air ! (Namiyo Kiite Kure en japonais), série démarrée au Japon en 2014, l'artiste change encore complètement de registre, en nous plongeant dans un récit plus ancré dans notre monde contemporain que ses précédents travaux, et mêlant pas mal de choses : incursion dans les coulisses de la radio, déboires sentimentaux, comédie pêchue, tranche de vie... pour un résultat qui ne manque pas de séduire.

L'argument sur lequel la série est vendue concerne surtout la plongée dans le monde de la radio, qui se fait plutôt en "douceur", via les premiers pas de Minare dans cet univers. Après une gueulante et une impro forcée à la radio, la voici sollicitée par Matô, et le résultat amène d'ores et déjà diverses petites infos très diverses sur ce milieu : matériel spécifique, importance de la voix en radio, sentiment étrange pouvant découler du fait qu'on fait réagir un public qu'on ne voit pas et n'entend pas, règles comme celle des "3 secondes" et celle liée au signal d'intervalle, concurrence du live streaming... Sans oublier les différents personnages secondaires amenant à prendre connaissance de certains métiers : producteur, mixeur, assistant de production. Car il y a évidemment toute une équipe derrières les émissions de radio. Cette incursion sait se faire plutôt immersive, sans pour autant être omniprésente. Concrètement, l'aspect "coulisses de la radio" reste pour l'instant un élément parmi d'autres, puisque Minare n'a pas encore réellement fait le grand saut dans ce milieu. Elle participe d'abord une fois par semaine en tant qu'intervenante, tandis que Matô cherche à lui préparer une émission attitrée dont elle serait l'animatrice...

Mais d'ailleurs, pourquoi donc Matô a-t-il été attiré par Minare ? On arrive ici à ce qui est sans doute la plus grande force de ce premier tome : son héroïne ! Ca se voit dès la couverture où elle semble en plein coup de gueule : cette femme-là a du caractère et n'a pas fini de nous amuser autant que de nous séduire. Minare est le genre de femme qui agit presque à l'instinct. Elle ne se laisse jamais faire, ce qui donne parfois des situations assez géniales (il faut la voir faire une prise à son voisin qui n'a rien demandé), et rend parfois son entourage un peu fou. Par exemple, son chef au restau "Voyager" tend à être agacé par ses retards à répétition et ses petites frasques même si elle travaille bien, son collègue de travail Nakahara ne sait comment gérer ses sentiments pour elle... Tout simplement, et sans forcément s'en rendre compte, Minare a tendance à bousculer son petit entourage, et c'est bien ce qui semble plaire à Matô, bonhomme qui en a marre des idoles locales et des doubleurs connus formatés et veut essayer de forme un chroniqueur de zéro. Un chroniqueur qui secouerait les gens au lieu de les calmer. Autant dire que l'insolente Minare semble parfaite pour ça, d'autant que sa voix semble être aisément reconnaissable, qu'elle ne bafouille pas quand elle parle... Elle est naturelle et spontanée en toutes circonstance, tout simplement. Et pourtant, derrière cette femme de caractère, on devine aussi des faiblesses au fil des pages : elle n'est pas forcément bien dans ses pompes, se morfond dans ses soucis amoureux au point de se mettre souvent des mines et de regarder des sites d'astrologie, elle a du mal à joindre les deux bouts côté argent... et, derrière sa carapace de demoiselle caractérielle, elle semble plus d'une fois souffrir d'un certain manque de confiance en elle. Peut-être que la radio l'aidera a se surpasser sur ce point ?

Au fil des pages, on peut également dire de Samura qu'il parvient à dépeindre un petit portrait de société intéressant, entre les relations de Minare avec les différentes personnes qu'elle fréquente, ses problèmes financiers et sentimentaux, son travail de serveuse pas toujours facile mais qui l'aide malgré tout à joindre les deux bouts, la façon de l'auteur de surfer sur certains éléments plus ou moins d'actualité, ou d'en profiter pour évoquer certaines choses réelles (comme l'Urasando Festival)... Sans oublier toutes les références musicales que permet l'incursion dans le monde de la radio.

Visuellement, Samura n'a plus rien à prouver, et délivre ici à nouveau un trait riche et porté par des angles de vue parfois très bien trouvés et immersifs. Toutefois, le récit étant plus léger et plus ancré dans notre monde moderne qu'un Habitant de l'infini, un Snegurochka ou un Emerald, il est possible de trouver le trait de l'artiste un peu plus relâché, un peu allégé. Une impression peut-être due au fait que l'on n'avait jusque là pas l'habitude de voir du Samura en petit format. Mais cela ne gâche absolument, l'auteur s'adapte simplement à l'ambiance de sa nouvelle oeuvre. A part ça, on note que certaines planches ont des airs de Tsutomu Takahashi. Et s'il fallait dénicher un défaut, il concernerait plutôt certaines transitions pas toujours très soignées.

Born to be on air ! démarre donc d'excellente manière avec ce premier tome qui trouve un bon équilibre et qui doit beaucoup à son héroïne géniale.
Quant à l'édition française, au-delà du petit format déjà évoqué, elle s'avère très plaisante ! Avec ses lignes de fréquence et son écriture entourée de rouge épais qui semble avoir été tamponné, le logo-titre s'avère bien trouvé. A l'intérieur, l'impression est correcte, le papier ne souffre ni de transparence ni de bavures, et surtout la traduction est redoutablement efficace. Sur ce dernier point, il était évidemment important de réussir à faire ressortir tout le caractère de Minare, et la traductrice Anaïs Koechlin de B.L.A.C.K Studio s'en sort à merveille grâce à un travail très vivant.

Critique 1 : L'avis du chroniqueur
Koiwai
16.5 20
Note de la rédaction
Note des lecteurs