A Silent Voice Vol.1 - Actualité manga
A Silent Voice Vol.1 - Manga

A Silent Voice Vol.1 : Critiques

Koe no Katachi

Critique du volume manga

Publiée le Lundi, 09 Février 2015

Critique 1


Nous ne sommes qu’au premier mois de cette année 2015, mais s’il y a bien un titre que de nombreux lecteurs assidus de mangas attendaient de pied ferme en ce Nouvel An, c’est « A Silent Voice », le premier titre de Yoshitoki Oima, mangaka en herbe puisque la demoiselle n’a que 25 ans et fait de sa première œuvre un véritable succès. Les raisons ? Un sujet soulevé grave, inhabituel pour un magazine de prépublication shônen, mais aussi les scores fulgurants de la série qui a dominé le Shônen Magazine, devançant même l’Attaque des Titans. C’est donc l’âme curieuse, mais aussi avec le sentiment que nous n’aurons pas affaire à une lecture comme les autres que nous ouvrons ce premier volet. Et, en effet, notre sentiment positif va vite se confirmer, page après page.


Shoya, élève de CM2, pense que la vie est un grand combat contre la morosité. C’est pourquoi il entraîne chaque jour ses camarades dans des défis tous plus turbulents les uns que les autres, et ce n’est pas en se faisant passer à tabac par un garçon plus âgé que son mode de vie changera. Pourtant, son existence va bien prendre un tournant différent lorsque la jeune Shoko intègre sa classe. Normale en apparence, la demoiselle est pourtant malentendante, poussant son entourage, élèves comme professeurs, à adopter un comportement différent pour communiquer avec elle. Voilà une belle curiosité pour Shoya qui va trouver ici un moyen de s’amuser, ni plus ni moins. Mais les brimades envers Shoko vont se révéler collectives et tous ne vont pas réagir de la même manière, y compris lorsque le harcèlement sera d’une ampleur plus importante…


Ce qui interpelle directement au début de notre lecture, c’est le découpage du récit. Les premières pages nous présentent un Shoya adolescent, en pleines retrouvailles avec Shoko. Lorsque l’intrigue nous projette dans le passé, lors de l’année de CM2 du protagoniste, on se doute que ce passage de la série sera éphémère afin de bien nous situer les relations entre les personnages, leur psychologie d’antan et ce que chacun aura vécu au fil des années.


C’est ensuite que l’histoire prend son temps en plantant le personnage de Shoya, ou plutôt celui qu’il était lors de sa dernière année de primaire. Le préado est casse-cou, nous le comprenons, et la vie n’est pour lui qu’un terrain d’amusement et de défi, un trait de caractère du personnage essentiel pour que l’on comprenne ses réactions face aux éléments qui suivront. Car l’introduction de Shoya est suivie par l’arrivée de Shoko, une enfant malentendante, mais qui ne demande qu’à s’intégrer à sa nouvelle classe après avoir changé d’établissement scolaire à cause de brimades. On comprend alors que les ennuis commencent, d’abord pour Shoko puis progressivement pour le protagoniste.


On comprend assez rapidement que le thème de ce premier opus est le phénomène de « l’ijime », autrement dit la persécution d’autrui en milieu scolaire. D’autres séries ont tenté cette thématique, l’une des plus connues en France est Life. Mais A Silent Voice n’a pas pour vocation que de traiter des brimades et va plus loin par le biais du personnage de Shoko qui symbolise le handicap. Cela peut paraître anecdotique, mais cette caractéristique du personnage va jouer un rôle des plus importants et surtout impacter notre vision des évènements de manière conséquente. Car si la demoiselle est la proie de ses camarades, c’est bien parce qu’elle est malentendante, ce qui va créer un climat de malaise général aussi bien pour les autres élèves que pour les professeurs.


Le traitement de cette intrigue sonne juste, et c’est bien pour ça que la lecture nous affecte autant. Dans son récit, Yoshitoki Oima ne cherche pas à partir dans la surenchère pour simplement monter d’un cran dans la tension dramatique, comme Life a pu le faire en son temps, et la mangaka parvient ainsi à décrypter avec justesse toutes les problématiques liées à ce genre de maltraitances. Pour Shoya, brimer Shoko n’est qu’un amusement comme un autre, il voit en sa camarade un phénomène de foire, chose qui tend à démontrer l’incompréhension d’un handicap pour une jeune personne s’il n’y a pas assez de communication entre lui et ses tuteurs afin de diminuer le fossé de la différence. Shoya, comme démontré dans le premier chapitre, c’est l’insouciance de la jeunesse, le fait qu’un enfant cherche à s’amuser sans forcément penser à ses actes, chose qui peut avoir des conséquences sur le quotidien et le moral d’autrui. A côté de ça, un contraste se créer petit à petit entre le héros (ou l’antihéros, pour ce que nous voyons de lui actuellement) et ses camarades de classe, voir ses professeurs qui adopteront un certain comportement vis-à-vis de Shoko de manière très hypocrite. Cette hypocrisie est marquée de différentes manières selon les individus, et c’est sûrement la forme la plus cruelle de maltraitance qui est infligée à la jeune fille durant ce tome. Petit à petit, notre vision change du héros, de son comportement, tant on saisit la distance entre ses agissements et ceux des autres élèves. D’ailleurs, la situation finit par opérer un changement radical qui nous « conforte » dans notre frustration, notre colère et notre compassion pour les deux personnages principaux et contre cette injustice générale.


Ainsi, l’accent est fortement mis sur les brimades subies par Shoko tout le long du tome, ainsi que la descente aux enfers qui va petit à petit marquer Shoya dont le revirement de mentalité est explicité de manière rapide, mais néanmoins très convaincante. Ainsi, on peut penser que le ton de ce premier opus est particulier et que la suite de la série ne manquera pas de varier les manières d’aborder le sujet d’un handicap, et surtout le traitement de la relation entre Shoya et Shoko.


On le comprend assez vite, la série tournera autour des interactions entre les deux personnages principaux tout en développant une évolution logique à la relation entre les deux personnages. Amour ? Amitié ? Animosité persistante entre les deux ? Difficile de le dire clairement à ce stade de l’œuvre et bien que les couvertures très douces tentent de nous aiguiller, la crédibilité des rapports entre les deux personnages nous permet de penser que rien ne sera toujours très simple ni trop convenu.


Si on devait parler de ces protagonistes au cas par cas, on ne pourrait s’empêcher d’évoquer un attachement pour eux, bien que les deux cas soient nettement différents. La situation de Shoko est la plus évidente, car sa situation de handicapée invite évidemment à la compassion, mais c’est bien l’absence d’affirmation du personnage, sa candeur et sa gentillesse qui nous font nous attacher à elle comme on s’attacherait à une petite sœur, avec l’envie de protection que cela implique. En ce qui concerne Shoya, c’est nettement plus délicat puisqu’à première vue, le personnage n’inspire pas la plus grande sympathie et ce ne sont pas les méfaits du héros qui changeront notre point de vue. En revanche, au fil des chapitres et en observant le sort progressif du personnage, on parvient à mieux cerner ses erreurs et celui qu’il était autrefois, pour estimer une évolution logique qui nous permettra de l’apprécier sur le long terme. En revanche, difficile de s’attacher aux autres personnages qui comptent en leurs rangs leurs lots de pourritures et d’hypocrites, sans toutefois tomber dans la facilité et afin d’apporter une véritable critique sociétale.


Le dessin de Yoshitoki Oima est étrange à première vue. Le trait, bien que fin, semble manquer de précision, mais donne une ambiance à l’œuvre. Cela permet notamment à la mangaka de nous livrer des faciès très expressifs et rendre humains les différents personnages. Les contours, souvent épais, de ces mêmes personnages permettent de les mettre en relief dans le récit, rendant toutefois les arrière-plans obsolètes. Le style de l’auteure est ainsi original et empreint d’une certaine maturité pour un shônen. On a hâte de voir de quelle manière l’art graphique de Yoshitoki Oima évoluera.


Quant à la copie éditoriale, Ki-oon a fait un excellent travail, comme à son habitude. La traduction semble correcte, l’adaptation est efficace et fluidifie notre lecture, le tout sans coquilles ni bavures. Concernant le livre en lui-même, c’est du Ki-oon tout craché : le volume est plus épais et plus grand que chez d’autres éditeurs, et on apprécie l’impression de qualité sur un papier épais et plaisant entre les mains.


Très attendu par de nombreux lecteurs, souvent très curieux, le premier tome de A Silent Voice nous laisse presque sans voix. Le sujet abordé est grave, le ton est juste et les personnages vraiment humains, aussi bien de manière positive que négative. Voilà une série dont on dévorera les tomes, sans aucun doute. A Silent Voice est bien l’une de ces trop rares séries dont le premier tome a laissé votre serviteur… sans voix.


Critique 2


Tout au long de l'année 2014, une sorte d'ovni n'a pas manqué d'attirer l'attention en s'affichant régulièrement parmi les premières places des tops vente de manga au Japon. Il faut dire qu'avec ses couvertures aux teintes douces et son sujet délicat traitant du handicap, Koe no Katachi avait, d'emblée, de quoi intriguer. Mais au point de connaître un destin aussi incroyable, ça, on ne s'y attendait pas.


Pourtant, cette série, lors de sa création, n'avait sans doute pas grand-chose pour créer un tel phénomène, pas à cause de ses qualités, mais plutôt à cause de son sujet largement éloigné des considérations habituelles du shônen. D'ailleurs, quand son auteure, Yoshitoki Oima, remporte en 2008 et à seulement 18 ans un concours de jeunes auteurs chez Kodansha, il faudra ensuite attendre jusqu'en 2011 pour que l'éditeur décide enfin de laisser sa chance auprès du public japonais à ce sujet très sensible. Après un épisode "one-shot" accueilli très favorablement, en 2013 Kodansha accepte finalement de faire de Koe no Katachi une série à part entière avec un nombre prédéfini de tomes (6 ou 7, elle en fera finalement 7), ce qui présage d'emblée d'un scénario bien pensé et qui ne devrait pas s'égarer.


Et il s'avère que l'accueil très favorable du one-shot n'était qu'une prémisse : au fil de ses chapitres, la série n'a cessé de gagner en notoriété, ce qui fut particulièrement inattendu dans un magazine comme le Shônen Magazine, peu habitué à accueillir ce type de récit. Le phénomène ne désemplit pourtant pas, au point que la série parvient même à se classer à la première place du vote des lecteurs du Shônen Magazine, devant le mastodonte L'Attaque des Titans, et qu'une adaptation en film d'animation est en chantier pour 2015 !


Avec un parcours si atypique et séduisant, on attendait forcément la série en France avec une curiosité mêlée d'impatience. Et ce sont les éditions Ki-oon qui nous l'amènent sous le nom A Silent Voice, à grand renfort de publicités et de bandes-annonces bien fichues (ces trailers en deux versions, selon le point de vue de chacun des deux personnages principaux, donnent vraiment le ton).


En annonçant des retrouvailles visiblement loin d'être joyeuses entre les deux personnages principaux de la série, les premières pages intriguent d'emblée. Pourtant, le premier chapitre d'A Silent Voice commence tout à fait normalement. En faisant un bond de 6 ans en arrière par rapport aux toutes premières pages, on y découvre Shoya, jeune garçon en CM2 très loin d'être un élève modèle. Entre des cours dont il se fiche royalement, une mère coiffeuse aimante, mais peu autoritaire et une grande soeur volage qui change sans cesse de mec, il tente de tuer son ennui par tous les moyens avec ses deux amis Kazuki et Keisuke. Sauter du haut des ponts dans la rivière ou affronter de face un garçon trois fois comme lui, ça ne lui fait pas peur. Tout le premier chapitre s'applique à retranscrire le quotidien de ce gamin qui, coincé entre sa vie familiale peu palpitante et la vie à l'école avec ses camarades, enchaîne déjà les 400 coups... au risque de passer pour un sale gosse. Ultra classique, voire même assez cliché sur certains aspects (notamment le dénommé XXL...), ce début de série n'en est pas moins très efficace, car il nous immerge parfaitement aux côtés de ce jeune garçon, à grand renfort d'une narration immersive et d'une mise en scène à la fois sobre et travaillée (par exemple, la page où l'on voit de haut Shoya s'ennuyant dans sa chambre parvient à retranscrire l'étouffement du garçon via un cadre très fermé).


Mais le quotidien de Shoya et de toute sa classe change le jour où une nouvelle élève arrive. Elle s'appelle Shoko, et est sourde. Brimée dans son ancienne école à cause de son handicap, sa mère l'a changée d'établissement scolaire en espérant que ce drame ne se répète pas. Mais en face, comment réagiront les autres élèves, et plus particulièrement Shoya ?


La première réaction de Shoya face à cette surdité qu'il ne connaît pas est très parlante, puisqu'il crie haut et fort, instinctivement, son étonnement. L'étonnement devient vite de la curiosité, Shoya est celui qui s'interroge le plus, se demande jusqu'à quel point la jeune fille n'entend rien, va alors la mettre à l'épreuve en criant dans ses oreilles, au risque de se faire réprimander sans que ça lui fasse quoi que ce soit. Très vite, cette curiosité se transforme en jeu : taquiner Shoko devient pour lui un passe-temps, un moyen de briser son ennui... La fillette est un nouveau jouet, en quelque sorte. Mais au fil des premiers jours, la situation évolue naturellement dans un sens inquiétant. Les élèves s'étonnent d'abord de voir Shoko avoir tant de mal à prononcer des mots et s'en moquent un peu. Puis certains se plaignent de rater la moitié des cours à cause des demandes de la fillette qui est contrainte de s'exprimer par des mots écrits sur un carnet. Le fait qu'elle participe ralentit les cours, son inclusion dans la chorale ruine le concours de chant... et l'engrenage commence, les taquineries curieuses et relativement discrètes deviennent peu à peu des brimades beaucoup plus cruelles et que Shoko peut désormais comprendre. Et si quelqu'un a le malheur de vouloir aider la jeune sourde, il se fait tout de suite dénigrer, comme Miyoko, traitée de fayotte par Naoka.


A travers de nombreux exemples de ce type, Yoshitoki Oima aborde avec beaucoup de nuances les problèmes liés au handicap. Elle met parfaitement en avant des réalités qu'on a tous déjà pu voir, et auxquelles nous avons peut-être même participé dans notre enfance : la curiosité blessante ainsi que la méchanceté des enfants face à la différence, une cruauté dont ils n'ont parfois (voire souvent) pas vraiment conscience. Et, par la même occasion, les problèmes liés à l'intégration en classe, ainsi que les problèmes de compréhension et de communication.


Et le portrait qui en est fait est dur, mais puissant, car l'auteure n'épargne pas les méchancetés (sans pour autant tomber dans le voyeurisme) et, surtout, nous les fait vivre directement du point de vue de Shoya et de ses camarades. Cela dit, Oima va encore plus loin à travers le jeune garçon, clairement plus extrême que les autres. Quand ses camarades savent s'arrêter à une certaine limite, lui va toujours plus loin dans les brimades, va jusqu'à briser les appareils auditifs de la fillette par simple passe-temps et pour amuser la galerie, sans avoir vraiment conscience de tout ce qu'impliquent ses actes... et jusqu'à ce que le retour de bâton finisse par arriver.


Yoshitoki Oima n'a clairement pas choisi la solution de facilité. Elle aurait pu bêtement nous faire vivre tout ça directement du point de vue de Shoko, en insistant sur ses malheurs et sur la méchanceté de ses camarades. Elle n'en a rien fait et a pris le parti inverse, ce qui est une réussite totale : en prenant le risque de présenter les choses à travers le "brimeur" Shoya, elle choque et émeut sans forcer, en évitant tout pathos et tout racolage, et ce choix lui permet d'aborder avec une pertinence rare tous les problèmes évoqués précédemment. Puis, au bout du compte, d'enclencher la prise de conscience du jeune garçon dans la dernière partie du tome.


Mais surtout, la narration est d'autant plus forte qu'elle ne nous plonge à aucun moment, dans ce premier tome, dans l'esprit de Shoko. La narration est constamment introspective sur Shoya, mais nous ne découvrirons ici aucune pensée de la jeune fille. On se contente de l'observer de loin, tel Shoya, et ce choix narratif ne fait que renforcer la mise en avant des problèmes de compréhension entre les deux enfants... mais aussi l'attachement que l'on ressent de plus en plus pour Shoko, sans que l'auteure n'ait besoin d'user des artifices habituels. Tout naturellement, on voit bien que la fillette sourde ne comprend pas toujours ce qui se passe autour d'elle, puis on la sent tourmentée par les brimades de plus en plus vives sans qu’elle ne le montre forcément, et tout cela attire naturellement notre tendresse, d'autant que le dessin d'Oima lui offre une forte impression de douceur et de fragilité. Le trait est très sensible, sans avoir besoin de forcer. Mieux, on s'étonne autant que Shoya de ne jamais voir Shoko craquer. Elle garde le sourire, encaisse sans chercher à se faire plaindre. Et quand c'est Shoya qui devrait s'excuser, c'est elle qui le fait, sans que le jeune garçon y comprenne quelque chose. Tout simplement, elle tente de s'intégrer du mieux qu'elle peut, avec sa différence.


Mais face à ces problèmes d'intégration, quelle solution adopter ? Et y a-t-il seulement une bonne solution ? A travers les adultes, l'auteure offre quelques points de vue. Forcément, la mère de Shoko, qui élève seule sa fille, est ultra protectrice au point de vouloir tout décider pour son enfant, y compris sa coiffure. Du côté des enseignants, Mr Takeuchi reste plutôt distant, là où Mme Kita cherche des solutions positives, par exemple en voulant apprendre aux enfants la langue des signes... mais parviendra-t-elle seulement à capter l'intérêt des enfants et de son collègue ? Dans tous les cas, le débat est totalement ouvert.


Au bout du compte, difficile de ne pas céder face à ce début de série, qui trouve le ton parfait pour toucher tous les publics. Les adultes découvriront un sujet traité avec pertinence, tandis que les adolescents, tels ceux lisant le Shônen Magazine, pourraient bien prendre conscience de beaucoup de choses pendant la lecture. A ce titre, la série est à conseiller à tous les âges.


Avant les toutes dernières pages qui reviennent dans le présent, on assiste pendant tout le volume à un véritable choc, sensible, percutant, et d'une intelligence rare dans sa façon d'aborder les choses, qui confirme d'emblée tout le bien qu'on attendait de cette série, et qui en fait déjà, sans aucun doute, l'un des futurs gros événements manga de 2015.




Critique 3


Plus les années avancent et plus les titres surprenants et originaux se font rares, pourtant, de temps en temps, certains titres possédant ces qualités se profilent et suscitent alors une grande attente de nombreux lecteurs… ce fut sans aucun doute le cas de « A silent voice », un titre atypique qui s'adresse à tous et saura toucher n'importe quel lecteur, quel que soit son genre de prédilection.


Ayant remporté un incroyable succès au Japon pour une série traitant d'un sujet si délicat, il était normal que le lectorat français attende ce titre avec une si grande impatience.


La force de ce titre est de s'adresser à tous en nous contant une belle histoire qui parle ou peut parler à chacun d'entre nous, car nous sommes tous ou avons tous été un jour été confronté au thème principal du titre : le handicap !


Shoko est une jeune fille qui année après année tente de s'intégrer dans toutes les écoles qu'elle fréquente. Shoko est sourde de naissance, et par extension quasiment muette, elle ne peut s'exprimer que de manière peu intelligible. Elle communique via un cahier qui lui sert à elle, mais aussi à ses camarades pour noter tout ce qu'ils veulent dire...mais c'est une méthode qui prend du temps et qui a ses limites.


Elle arrive dans la classe de Shoya, jeune garçon plein d'énergie, qui se présente comme le leader de la classe, mais un leader négatif, plus préoccupé à s'amuser qu'à travailler.


D'abord curieux, il va ensuite se consacrer exclusivement à tourmenter la pauvre Shoko qui de son côté fera tout pour se faire apprécier. Shoya va mener la classe contre la pauvre fille jusqu'à ce qu'une plainte de la mère de cette dernière tombe...à ce moment tous ses camarades lâchent Shoya qui devient à son tour la cible des brimades de la classe… Shoko quitte l'école, mais Shoya continue de subir les moqueries et agressions de ses anciens camarades, et ce même une fois passé au collège...il vivra une adolescence seule, laissée de cotée par les autres...un lourd prix à payer, mais peut être que la personne qui finira par prendre soin de lui n'est pas très loin…


Avec un tel sujet, il ne faut pas s'attendre à un titre léger ! Si on trouve par moment des notes comiques, elles sont très peu nombreuses et ne sont en rien symboliques de ce titre grave et touchant !


Pourtant cela commence justement de façon assez légère où l'auteur nous présente Shoya et ses deux principaux camarades qui se lancent des défis en permanence… On découvre donc des enfants pleins de vie, qui ne se préoccupent que de s'amuser...puis entre en scène le jeune Shoko et alors on découvre que l'enfance n'est pas que légèreté et insouciance !


Cette dernière démontre une grande maturité pour son âge, ce qui est souvent le lot des enfants liés de prés ou de loin au handicap.


On prend alors en pleine face toute la cruauté dont sont capables les enfants, une cruauté gratuite qui apparaît intolérable pour des yeux d'adultes, mais qui leur apparaît à eux si innocente, ils ne réfléchissent pas aux conséquences, ils ne sont que dans le jeu, le plaisir immédiat, bien loin de toute considération pour l'autre, bien loin de toute culpabilité…


On prend alors en pitié la pauvre Shoko qui doit subir ça sans que personne ne lui vienne en aide, on la plaint réellement et on souffre pour elle. C'est d'autant plus dur à supporter que même son climat familial semble injuste envers elle.


Le jeune Shoya qui se montrait amusant, un personnage que le lecteur avait très rapidement adopté, devient alors détestable, et on ne comprend comment il peut faire ça en riant...on lui en veut et on en viendrait presque à souhaiter qu'il souffre à son tour pour payer ce qu'il fait.


Et soudain, le récit subit un retournement, de bourreau il devient victime à son tour, il est abandonné par ses camarades, et malgré qu'il soit devenu antipathique depuis le début du volume, rapidement on le prend en pitié à son tour...après tout, mérite-t-il de subir autant de choses désagréables ? Il ne s'agit que d'un enfant.


C'est là qu'est toute l’ambiguïté de ce premier tome que l'auteur arrive à manier avec grand talent...bien qu'il s'agisse d'en enfant, il est détestable...mais il ne peut être totalement détestable, après tout ce n'est qu'un enfant !


On est donc confronté à l'injustice et on prend en pleine face l'incompréhension des enfants qui ignorent encore tout du monde et de ses injustices.


Et Shoko dans tout ça ? L'auteur nous présente le récit exclusivement du point de vue de Shoya, ainsi cela maintient une certaine distance avec le handicap, presque une neutralité vis-à-vis de ce qu'elle endure, ainsi le lecteur se retrouve placé à la même distance de Shoko et de son handicap que Shoyo.


Cette dernière subit tout cela tout en tentant de garder le sourire, sa seule arme pour essayer de se faire accepter par ses camarades de classe. Mais plus dure encore que ce qu'elle doit subir de la part de Shoyo, c'est l'indifférence des autres, et même du professeur qui semble ne pas intervenir mis à part quand il y est obligé.


On souffre donc avec elle, et on souffre d'autant plus quand on découvre sa mère qui elle aussi ne lui facilite pas la vie. Cette dernière reporte sur sa fille la vie difficile qu'elles vivent, la mère aussi subit le handicap, sa vie en est automatiquement modifiée, elle tourne autour de cela et s'organise autour de ça. Shoko devient alors le centre des reproches de sa mère, si leur vie est aussi difficile c'est de sa faute… L'auteur nous présente donc une mère ultra protectrice étouffant sa fille. Même si cela n'est pas dit clairement dans ce tome, s’est grandement sous-entendu et vient donc renforcer l'aspect dramatique de ce premier tome.


On s'attendait donc à un premier tome léger, on pensait y voir naître une belle relation entre deux enfants, mais l'auteur a pris le parti de nous confronter à la violence de ces derniers, à la dureté d'un monde qui, quoi qu'on en dise, est loin d'être totalement adapté aux personnes souffrant d'un handicap, et surtout terriblement injuste !


Un premier tome dur, violent psychologiquement, mais également particulièrement touchant qui nous offre de belles promesses pour la suite de la série !


Ce premier tome était attendu fermement, et désormais on comprend pourquoi, et surtout bien loin de nous décevoir, il nous touche et nous bouleverse !


Une magnifique réussite pour un titre poignant !


Critique 4


Une nouvelle élève arrive dans la classe de Shoya, leader de la classe. Il s’agit de Shoko une jeune fille malentendante. Malgré son handicap, Shoko essaye de s’intégrer en communiquant à travers un cahier. En effet, malgré l’aide d’un appareil auditif, elle perçoit mal les sons. Mais, Shoya ne lui facilite pas son intégration et au lieu de l’aider, ne trouve rien de mieux que de la persécuter et de l’humilier aux yeux de tous. Jusqu’au jour où, le bourreau devient à son tour la victime…


De par son succès au Japon, « A Silent Voice » est l’un des titres qui était le plus attendu en France. Rares sont les mangas qui traitent d’un handicap et en particulier de la discrimination. Yoshitoki Oima pointe du doigt sans détour les sévices et les moqueries que peut subir une personne handicapée ou différente. En théorie, l’école est là pour aider à intégrer un élève s’il a une différence. Elle prône la tolérance. Mais, à travers les mésaventures de Shoko, nous nous rendons compte que l’école n’est pas adaptée pour intégrer une personne avec un handicap. Les contraintes pèsent lourd à la fois sur les élèves et sur les professeurs, car Shoko hélas ralentit les cours, demande plus d’attention et entraîne des retards à la fois au niveau de cours, mais aussi pour les élèves qui l’aident qui ne peuvent pas suivre correctement les cours. Toute cette ambiance crée un climat d’exaspération et de tension allant jusqu’au rejet de Shoko dans la vie au sein de la classe. L’auteur dénonce aussi le laxisme des professeurs face au harcèlement que subit Shoko et l’absence totale de sanction des coupables.


Shoya agit en leader et est le trouble-fait dans la classe. L’école l’ennuie alors pour rendre sa vie un peu plus pimentée, il aime lancer des défis à ses amis et se comporter en véritable tête brûlée. La rencontre avec Shoko entraîne chez lui un vif intérêt, car il la considère comme une extraterrestre. Nous avons l’impression de voir un chat face à un oisillon tombé de son nid. A force de l’observer quotidiennement, il en vient à la harceler. En effet, il est facile pour lui de par sa popularité de malmener Shoko et de se moquer de son handicap. De plus, au lieu de se sentir mal par son comportement, cela l’amuse de voir aussi ses autres camarades de classe rire de ses frasques et des mauvais tours qu’il fait à Shoko. Mais, à trop tirer sur la corde, elle casse et le retour de bâton arrive en pleine figure à Shoya. Passer de bourreau à victime, il n’y a qu’un pas et l’acharnement qu’il a fait subir à Shoko, il le vivra aussi à son tour.


Quant à Shoko, elle est une jeune fille qui dégage énormément de douceur. Sensible et tolérante, elle se montre patiente envers ceux qui l’entourent et ne montre jamais d’agressivité malgré ce qu’elle subit. Elle essaye tant bien que mal à s’intégrer et très souvent le plus maladroitement possible. Nous ne savons pas si elle se rend compte que certains de ses comportements ennuient ses camarades. Peut-être que sa bonne volonté à vouloir être comme les autres lui joue finalement des tours. Alors que nous nous attendons à ce qu’elle soit épaulée par sa famille et en particulier par sa mère, nous découvrons une mère exécrable et qui ne se soucie absolument pas du bien-être de sa fille.


Qu’on ne se trompe pas, « A Silent Voice » est un Shônen et nous nous en rendons bien compte au niveau des graphismes. Ces derniers sont très masculins, par moment plus agressif au niveau des traits. Quant à l’édition, elle est de bonne facture.


« A Silent Voice » est un titre qui a le mérite de nous faire réfléchir sur le handicap et sa place dans la société à travers l’école. Un premier tome prenant à la fois par ce que l’auteur dénonce, mais également par tous les sentiments qui s’y dégagent. Nous sommes très curieux de découvrir la suite de cette œuvre au prochain tome.










Critique 4 : L'avis du chroniqueur
Einah

16 20
Critique 3 : L'avis du chroniqueur
Erkael

18 20
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Koiwai

18 20
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Takato
18 20
Note de la rédaction
Note des lecteurs