Wet moon Vol.1 - Actualité manga
Wet moon Vol.1 - Manga

Wet moon Vol.1 : Critiques

Wet Moon

Critique du volume manga

Publiée le Mardi, 27 Mai 2014

Critique 1


Au cœur du Japon de la deuxième moitié des années 1960, dans une station balnéaire, le jeune inspecteur Sata poursuit une enquête, celle du meurtre d'un ingénieur qui travaillait pour un mystérieux programme spatial. Sur le lieu de travail de la victime, une secrétaire stressée, Kiwako Komiyama, prend soudainement la fuite en devenant dès lors la suspecte numéro 1. Alors qu'il la poursuit, Sata s'effondre soudainement. Quand il se réveille un mois plus tard, son supérieur hiérarchique est mort, l'enquête a été bouclée, et une énorme cicatrice s'exhibe sur le front du jeune inspecteur. Derrière cette cicatrice, logée dans sa tête, il y a quelque chose, comme un morceau de métal.
Sata ne peut croire que son enquête doit s'arrêter là. Komiyama n'a toujours pas été retrouvée, il décide de continuer à la chercher au point d'en faire une obsession, tandis que le morceau de métal logé dans sa tête provoque en lui des hallucinations, pertes mémoires et visions étranges... de la lune.

Après le road-movie punk et trash Bambi et l'enquête surnaturelle Soil, Atsushi Kaneko revient avec Wet Moon, un thriller halluciné nourri aux multiples influences.
Autour de Sata, inspecteur qui n'est plus totalement maître de lui-même face aux pertes de mémoire et hallucinations, rien ne semble tout à fait réel. Pour ce héros typiquement kafkaïen, perdu dans une réalité qu'il ne comprend plus au point de s'enfoncer peu à peu dans la paranoïa, rien ne semble totalement digne de confiance, encore moins ses collègues qui semblent comploter dans son dos, ou même les rencontres faites dans la face cachée de la ville, qui lui ouvrent peu à peu des portes qu'il n'est pas encore prêt à franchir.
Pourtant, Sata, s'il veut progresser dans son enquête obsessionnelle, et lever le voile sur ses hallucinations et pertes de mémoire de plus en plus persistantes avant de sombrer dans la folie, devra composer avec ce monde de ténèbres typique d'un film de David Lynch, partagé entre l'atmosphère nocturne bling bling et rétro que dégage cette sorte de Las Vegas japonais, les cabarets hypnotiques et les personnages aux propos indéchiffrables... Sans oublier ces visions au clair de la Lune de Méliès, une Lune que l'inspecteur cherche constamment à renier. Alors que la conquête spatiale se joue dans l'espace, lui s'est persuadé que jamais l'homme ne marchera sur la Lune, et que jamais il n'en découvrira la face cachée.

Dans cet univers où l'astre lunaire est un élément central, encore énigmatique mais rappelé à chaque instant à notre mémoire à travers les hallucinations de Sata ou un simple cadenas qui s'ouvre, tout est question d'ambiance. Atsushi Kaneko nous plonge dans la quête obsessionnelle et plus importante qu'il n'y paraît de Sata, au gré des déraillements et égarements paranoïaques qu'il croque de sublime manière sous sa mise en scène impeccable (le choix des angles lors de la perte de repères de l'inspecteur dans le cabaret est brillant), ses dessins où clarté et ténèbres contrastent merveilleusement, et son utilisation intelligente des éléments propres à son art, telles les onomatopées (les halètements répétés lors de la course poursuite, les pas de danse du cabaret rythmant les pas incertains de Sata...), où les découpages oppressants (les hallucinations de Sata sont une merveille du genre).

Pour peu que l'on accepte de se laisser happer par ce polar défiant pour l'instant toute logique, on se retrouve alors face à un bijou d'ambiance et de mystère, qui est sans doute encore très loin d'avoir dévoilé toutes ses qualités.

L'édition fournie par Casterman est impeccable. Les premières pages teintées de rouge sont du plus bel effet, le papier et l'impression sont de qualité, la traduction est excellente et la gestion des onomatopées (élément de prime importance) sans fausse note.


Critique 2


Après le sulfureux Bambi et l'intriguant Soil, l'atypique auteur Atsushi Kaneko nous revient chez Sakka avec Wet Moon, nouvelle série toute aussi charismatique. Au programme, une enquête policière haletante et hallucinée en trois tomes, tout ce ci mêlée à un graphisme toujours aussi percutant digne de Charles Bruns ou encore Paul Pope !

L'histoire prend place au Japon, dans les années 1960, près d'une ville aux allures d'un Las Vegas nippon où règne la corruption. C'est dans cette bourgade qu'enquête le jeune et irréprochable inspecteur Sata sur le meurtre d'un ingénieur. Alors que ce dernier semble avoir trouvé la criminelle, Sata perd connaissance en la poursuivant et à son réveil un étrange morceau de métal est logé dans son crâne, lui provoquant ainsi des pertes de mémoire et des hallucinations. La traque de la suspecte va peu à peu prendre la forme d'une obsession amoureuse, le tout teinté de rapports étranges avec la lune...

Wet Moon, c'est typiquement le genre de récit au rythme crescendo, avec un héros au préalable tout ce qui a de plus banal jusqu'à ce qu'il devienne un être mentalement torturé par la folie qui va le mener dans des chemins de plus en obscurs. Ici nous suivons donc Sata, cet inspecteur dont on ne peut rien reprocher, prêt à tout pour accomplir son enquête; cependant petit à petit il se rendra compte que le monde autour de lui n'est pas celui qu'il prétend être. Les questions se posent au fur et à mesure que l'on tourne les pages, avec notamment des intrigues fortes : comment Sata s'est-il retrouvé avec un morceau d'acier dans la tête, que s'est-il passé pendant son coma d'un mois et quelle est la raison du meurtre de l'ingénieur ? Et pendant ce temps là, des choses étranges se trament dans son dos, ses coéquipiers semblent comploter sur son sort, et d'étranges hallucinations en rapport à la lune se font de plus en plus récurrents...

Atsushi Kaneko nous livre ici à nous poser des questions tout comme le héros de l'histoire, à découvrir "la face cachée du monde" et à déceler le vrai du faux dans cette folie grimpante; et pourtant si Sata veut découvrir la réalité il devra obligatoirement plongé dans ses ténèbres afin d'avoir les réponses à ses questions.

Pour un premier tome autant dire que le ton est donné, on se retrouve vite aussi intrigué que le héros et il est encore impossible de savoir vers où l'auteur veut nous mener. Et avec un début aussi captivant, la suite ne pourra qu'être encore plus passionnante !
Notons d'ailleurs que l'auteur narre à merveille son récit par son trait rond et malsain à la fois, rappelant fortement le coup de crayon de Charles Burns. Toutes les scènes ont un cadre les illustrant parfaitement, chaque séquence est particulièrement forte à tel point qu'on se sentirait presque comme dans un film. Les personnages ont également un charisme propre mais déroutant, surtout le chef des inspecteurs qui est difficile à cerner.

Enfin, ce premier volume de Wet Moon est surtout sublimé par une édition parfaite mettant parfaitement en valeur la série, entre traduction et objet de qualité, premières pages en couleurs avec une feuille en calque du meilleur effet.
Bref, une très bonne mise en bouche, qui annonce une suite encore plus exceptionnelle ! (16/20)


Critique 3


Atsushi Kaneko est un auteur atypique, un créateur de mangas dits « alternatifs ». Bien qu’ayant un succès confidentiel, ses séries Bambi et Soil sont salués par la critique et possèdent un petit noyau de fans. En tout cas, cette estime suffit pour que différents éditeurs s’intéressent à ses travaux. Après Imho et Ankama, c’est Casterman qui nous propose Wet Moon, sa dernière série en date. Avec sa venue à Angoulême et un gros éditeur qui le publie, on est en droit d’espérer beaucoup de bien pour sa carrière en France !

Mais pour le moment plongeons nous dans ce premier volume. Pour résumer brièvement l’intrigue, nous suivons Sata, un inspecteur de police du Japon des années 1960, à la poursuite d’une meurtrière présumée. Au cours d’une course poursuite avec elle, Sata se blesse et perd connaissance. A son réveil, un drôle de morceau de fer est logé dans son cerveau. Dès lors, il est pris d’hallucinations. Arrivera-t-il à voir le bout de cette histoire ? Est-ce que ses collègues, qui se comportent de plus en plus étrangement, ne vont-t-il pas lui mettre des bâtons dans les roues ?

Ce scénario part sur le principe d’une multitude de mystères à éclaircir. En ce sens, ce premier volume est parfaitement réussi sur ce point, car il intrigue. Qui a introduit ce morceau de ferraille dans le cerveau de Sata ? Qui est donc vraiment cette femme qu’il poursuit, et est-elle vraiment coupable des crimes dont on l’accuse ? Pourquoi les hallucinations de Sata tournent-elles autour de la Lune, comme le suggère le titre du manga ? Si on lit un peu Kaneko, on se rend compte que, bien que pouvant rester très sérieux sur un tel scénario, il arrive à créer des personnages grotesques, dégoutants et outranciers. Dans Bambi, cet aspect tirait vers l’humour. Ici, il participe à créer un climat nauséabond, qui tendent à rendre Sata paranoïaque.

Mais outre cette ambiance des plus prenantes, ne nous le cachons pas, c’est le style graphique de Kaneko qui éblouit littéralement le lecteur. Il est d’une régularité implacable, mais posséde aussi une très forte personnalité, probablement inspiré des comics américain underground. La double-page où Sata se voit sur la Lune en train de regarder la Terre est fabuleuse, dans la façon dont elle est amenée. La narration de Kaneko a même un léger goût d’Urasawa, à ce niveau.

Nous parlions des comics américains parmi les inspirations de Kaneko, mais ce n’est pas tout. Son univers est bourré de références, dans le style et les allusions directes, un peu à la manière de Tarantino. Casterman communique autour de l’univers à la David Lynch, mais on peut également évoquer le nom de Sergio Leone et, bien sûr, de George Meliès et son célèbre Voyage dans la Lune, qui peuple les pages de Wet Moon, jusque sous la jaquette. N’y a-t-il d’ailleurs pas un peu de Brian de Palma version Scarface dans la ville où se situe l’action ? Un bouillon de références, rarement pour faire joli, mais plutôt pour construire un univers à la fois cohérent et stylisé.

En définitive, Wet Moon s’annonce comme une véritable bombe dans les sorties manga de 2014. C’est un formidable effet de style, un exercice qui rapproche le manga et la bande-dessinée au plus proche de sa dimension artistique. Accessoirement, au vu de la brièveté de la série (trois tomes), c’est également une porte d’entrée facile dans l’univers de cet auteur si particulier. Il n’y a plus qu’à se régaler et attendre patiemment jusqu’où l’hallucination de Sata va aller dans les prochains volumes. Et preuve en est que Kaneko est un auteur qui a le souci de la qualité : les pages ont retouchées entre la prépublication en magazine et la parution en volumes reliés.

L’édition de Casterman est exemplaire. La qualité du papier et de l’impression est excellente. On a même droit à des pages couleurs et un sommaire en papier calque pour donner une vision opaque de la page suivante. La texture de la jaquette montre qu’elle est de qualité. Surtout, c’est un livre épais de 250 pages, pour un prix correct.


Critique 2 : L'avis du chroniqueur
Kiraa7

19 20
Critique 1 : L'avis du chroniqueur
Koiwai
17 20
Note de la rédaction
Note des lecteurs