The Unexpected Goddess Vol.1 : Critiques

Manekarezaru Shinnyo

Critique du volume manga

Publiée le Jeudi, 29 Août 2024

Un nouveau manga de fantasy s'est installé dans le catalogue des éditions Doki-Doki depuis le mois de juillet: The Unexpected Goddess. De son nom original "Manekarezaru Shinnyo" (dont le titre anglais de l'édition française est une traduction fidèle), cette oeuvre est, à l'origine, une série de romans inédite en France à l'heure où ces lignes sont écrites, écrite par Hana Amasaki et illustrée par Yuu. C'est en 2022 que Tsukasa Arima, mangaka dont c'est la première publication française et la deuxième série au Japon, entame l'adaptation manga pour le compte du site Young Ace Up des éditions Kadokawa, cette adaptation s'étant achevée tout récemment puisque le troisième et dernier tome est paru dans son pays d'origine le 10 juillet dernier.

L'histoire nous plonge dans le saint-royaume fictif d'Arialantë, marqué par deux spécificités. Tout d'abord, le fait que, tous les cent ans, le cristal immaculé choisit quatre jeunes filles saintes, chacune héritant d'un des pouvoirs de la déesse Liliana, pour ensuite être vouées à oeuvrer pendant les cent prochaines années à maintenir la paix au sein du royaume, le tout sous l'autorité absolue du message de la déesse, à savoir le pape (actuellement un dénommé Sobra). Ensuite, un système de rang solidement ancré depuis bien longtemps: tandis que les gens habitant à la capitale ont soi-disant reçu la bénédiction de la déesse en étant alors appelés les Sanctifiés, tout le reste de la population (90%, quand même) vit dans la misère sous le titre de Réprouvés, en n'ayant quasiment aucun droit, en subissant de la discrimination, et en subissant finalement une vie d'absurdité et d'injustice.

Litha Denni est précisément une de ces réprouvées: vivant seule avec sa mère psychologiquement affaiblie, elle joint les deux bouts en gardant sa force de caractère malgré son quotidien injuste et déterminé par sa naissance, et conspue quotidiennement la déesse Liliana pour le sort qu'elle leur a réservés, à elle, à sa génitrice et à tant d'autres personnes. Pourtant, en cette journée a priori comme les autres, la jeune fille voit apparaître devant elle Kirick et Kyte, deux hommes arrivés de la capitale et qui ne sont pas là par hasard: tout porte à croire que le cristal immaculé l'a désignée pour devenir l'une des quatre nouvelles filles saintes pour les cent prochaines années. Elle, une réprouvée, ce qui est normalement impensable puisque les élues ont toujours été,au fil des siècles, des sanctifiées. N'y croyant guère, et de toute haineuse envers les injustices provoquées par la déesse, notre héroïne refuse catégoriquement son nouveau rôle... du moins,au départ. Car quand Kirick déclare que la mère de la jeune fille sera alors prise en soin dans un hôpital de la capitale en échange, Litha finit par accepter, sans savoir ce qui l'attend là-bas...

Il faut, dans un premier temps, reconnaître aux autrices une entrée en matière particulièrement efficace, dans la mesure où certains événements (que l'on a préféré taire dans cette chronique) vont immédiatement permettre d'installer le background assez terrible, tragique et injuste du passé de Litha, expliquant très bien son dédain pour la déesse et pour les sanctifiés, son manque de féminité dont elle se fiche royalement et, surtout, son caractère très marqué. Dans son genre, cette héroïne en impose alors assez vite, d'autant plus que par la suite elle ne va jamais perdre cette personnalité forte et énervée qui s'avère franchement délicieuse !

Cette suite, justement, est donc vouée à rapidement l'amener à la capitale en compagnie de Kirick et de Kyte, deux hommes au caractère là aussi assez bien définis et qui sont voués à devenir ses gardes du corps,maintenant qu'elle est une sainte désignée par le cristal. Et des gardes, nul doute qu'elle en aura besoin, tant on va vite se rendre compte qu'à cause de ses origines de réprouvée, Litha sera loin d'être accueillie à bras ouverts au palais cristallin de la capitale, certains hauts placés refusant violemment de lui montrer le moindre signe de respect. Les autrices jouent avec une réelle efficacité sur ce système de ségrégation, une ségrégation ayant lieu jusqu'au sein même des sanctifiés, ceux-ci étant eux-mêmes divisés en différents rangs, et celui très particulier de Kyte amenant encore une complexité et des injustices supplémentaires.

En somme, il s'agit typiquement du genre d'univers discriminatoire où l'on a très facilement envie de voir souffler un vent de bouleversements et de révolte. Et ce vent pourrait tout à fait, à l'avenir, être levé par Litha, une jeune fille décidément bourrée de force de caractère en décidant de ne pas se laisser marcher sur les pieds, en s'énervant même très vite face au traitement que les sanctifiés les plus hauts (et hautains) font de Kyte, et en voulant alors lui faire prendre conscience de sa valeur en tant que personne, au-delà de tout rang social. Cependant, derrière le charisme qu'impose assez bien notre héroïne, certaines interrogations stimulantes se posent également déjà. Comment se fait-il qu'il y ait cette fois-ci non pas quatre saintes élues par le cristal mais cinq ? Litha est-elle de trop ? Et quels sont les desseins secrets de Kirick, sur qui les toutes dernières pages intriguent très facilement ?

A l'arrivée, ce premier volume possède tout ce qu'il faut pour nous maintenir facilement accrochés à la lecture: une héroïne pleine de caractère, des personnages secondaires déjà intéressants, un univers global bien pensé et qui s'installe soigneusement au fur et à mesure des pages... Malgré une certaine crainte quant à la brièveté de ce manga (seulement trois tomes pour une adaptation d'une série de romans, c'est rarement bon signe), nous serons clairement au rendez-vous pour la suite !

Du côté de l'édition française, enfin, l'éditeur nous gratifie de la qualité dont il a le secret: la traduction d'Aurélie Lafosse-Marin est particulièrement bonne pour faire ressortir le caractère et le franc-parler assez cru de l'héroïne, le lettrage de Jean-François Leyssène est très propre, le papier est assez épais et opaque, l'impression est très convaincante, les quatre premières pages en couleurs sur papier glacé constituent un bonus appréciable, et la jaquette reste fidèle à l'originale japonaise tout en s'offrant un logo-titre fin et soigné.


Critique 1 : L'avis du chroniqueur
Koiwai
16 20
Note de la rédaction
Note des lecteurs