Tonoharu - Actualité manga

Critique du volume manga

Publiée le Mercredi, 16 Mars 2016

Aaah le Japon... Pays qui fait rêver de bien nombreuses personnes, souvent tombées sous le charme de sa pop culture par ses mangas ou encore ses animes en ayant découvert par ce biais ses traditions et autres biens culturels... Rares sont les gens à ne pas avoir voulu découvrir une fois ce pays, par passion ou non, et ce jusqu'à parfois vouloir partir s'y installer pour y vivre. Mais malheureusement ce choix a souvent été trompeur pour certains, quelques personnes ayant découvert une face de la culture nippone qu'ils ne connaissaient guère, et qui aura vite fait de briser tout leurs rêves de ce pays dont ils avaient une image peut-être bien trop fantasmée. A l'instar du "syndrome de Paris" pour les Japonais, le Japon peut tout autant charmer un occidental tout comme l'en dégoûter. Rassurez-vous, ce n'est pas le cas pour tout le monde, mais une telle histoire mérite d'être illustrée, et c'est justement ce qu'a fait Lars Martinson avec Tonoharu.

A l'instar de Stupeur et Tremblements d'Amélie Nothomb, Lars Martinson nous dépeint une histoire semi-autobiographique d'un jeune américain, Daniel Wells, partant vivre et travailler au pays du Soleil levant. Ayant du mal à vraiment cerner son existence dans son propre pays, il imagine vivre un réel renouveau dans ce pays qui le passionne et y découvrir une culture prête à l'accueillir. Mais alors que ce dernier arrive, ses aspirations vont vite sombrées dans un certain désespoir en se rendant compte de toutes ces petites choses qui font que sa vie ici est tout simplement...triste. Barrière de la langue, difficulté à s'intégrer au coeur de ses compagnons japonais, personne à qui réellement se confier et enfin tout un cercle social à se reconstruire, la solitude va vite s'emparer de lui et lui faire comprendre qu'il devra se battre pour pouvoir espérer retrouver un certain rayon de lumière dans sa vie actuellement bien trop monotone.

Daniel est installé à Tonoharu, petite ville de campagne loin d'être cosmopolite, à quel point les occidentaux expatriés se comptent sur les doigts d'une main. Il travaille là-bas en tant qu'assistant dans une école dans les cours d'anglais et n'a pas vraiment à se plaindre de son job : avec des journées  allant de 8h à 16h pour seulement deux à trois heures de cours, Daniel a du temps pour lui. Mais justement, il en a beaucoup trop pour peu de choses à faire en dehors. Heureusement il y a Constance qui tout comme lui a le même travail, mais dans une autre école; cependant il semblerait que celle-ci se soit bien mieux intégrée, difficile de se rattacher à une unique personne... Qui dit Japon dit bien sûr japonais, mais le contact s'avère bien plus rude. L'amitié avec ses autres compagnons semble en effet bien factice, certains n'hésitant d'ailleurs pas à lui montrer leur désintérêt total envers sa personne.

Tonoharu a donc cette volonté de nous montrer par le biais de dessins comment un occidental peut se sentir au Japon. Si le pays a tout pour séduire à court terme, cela peut être une tout autre chose une fois installé là-bas, et même si on peut s'y plaire on voit tout de suite que l'on est obligatoirement confronté à la différence culturelle. Que ce soit par exemple le fait de voir les autres ne pas donner réellement leur avis, d'être sans cesse considéré comme un "étranger", et surtout donner l'impression que nous sommes ici seulement de passage, tout cela s'inscrit dans le ressenti que tout expatrié vivra forcément au cours de sa vie là-bas. Lars Martinson illustre merveilleusement  le sujet sur le fond, mais aussi par la forme en utilisant un format régulier, à savoir quatre cases par page au format timbre-poste, peintes par des nuances de gris aux contours noirs et épais. L'idée des repères brouillés vient même jusqu'au lecteur avec les phrases énoncées par les Japonais non traduites, donc totalement illisibles à tous ceux ne pouvant pas lire le japonais.

On en vient donc à vite s'attacher à Daniel dont la vie est rythmée par un travail pas des plus passionnants et des rencontres brèves et souvent peu intéressantes. On ressent tout à fait que cette histoire sent le vécu tant elle illustre exactement ce à quoi on peut être confronté là-bas. De mon avis personnel, ayant justement vécu au Japon le temps d'un an, ma vie fut bien moins monotone que Daniel Wells ici, cependant j'ai réellement retrouvé des situations dans lesquelles j'ai été dans Tonoharu et comprends absolument le ressenti que peut avoir le héros face à tel ou tel moment qui peut être embarrassant. Tonoharu peut donc être vu comme une sorte d'avertissement, ou plutôt de mise en garde face à ce qu'il peut arriver au Japon en tant qu'expatrié. Mais comme dit précédemment, cela n'est qu'une facette de la vie en terre nippone, loin est l'idée de vouloir dégoûtez du pays et de ce qu'il a à offrir. Tonoharu s'adresse donc tout aussi bien à ceux qui ont pu vivre ce genre d'expérience et s'y retrouver à travers les yeux de Daniel.

En conclusion, Tonoharu est vraiment un titre sur lequel nous méritons de nous pencher. Servi par un dessin agréable à l'oeil, simple et pourtant véritablement révélateur, Lars Martinson arrive en s'inspirant du style de Seth à illustrer les propos voulus par les aventures tristement monotones de Daniel. Désormais, on espère pouvoir lire la seconde partie de cette oeuvre afin de savoir comment la vie de notre héros a évolué jusqu'à son retour à son pays natal.


Critique 1 : L'avis du chroniqueur
Kiraa7
17 20
Note de la rédaction
Note des lecteurs