Tempts & tempted : Critiques

Premier travail de l’auteur en France, on découvre dans Tempt & Tempted le schéma classique d’un yaoi publié chez IDP, à savoir un recueil de plusieurs histoires avec un couple principal sur deux chapitres, un secondaire sur deux chapitres, et des petits bonus. Classique. Au début on apprend donc à découvrir Fujikawa et Satoru. Le premier est un commercial aguerri qui travaille en étroite collaboration avec l’homme dont il est amoureux, Satoru, qui dirige une petite boutique de vaisselle typiquement japonaise. Quand il est dans sa boutique, Satoru est droit, légèrement distant, tout en retenu et en kimono. Il a le charme posé nécessaire à un propriétaire de vaisselle traditionnelle, pour séduire les clients et coller à l’image de son commerce. Fujikawa est amoureux de lui depuis longtemps, et un jour il ose se rapprocher juste un peu en l’invitant boire un verre. Bon plan, puisque Satoru accepte … et se révèle bien différent de celui qu’il est à l’ordinaire, change même de dialecte pour se montrer bien plus décontracté et naturel. Une transformation qui n’esquisse absolument pas l’amour de Fujikawa. La transformation est assez intéressante quand il change comme ça du tout au tout, passant du gérant timide au copain décomplexé. Ça fonctionne, sans hésitation. Et leur couple, aussitôt formé, est alors un peu plus complexe que prévu au départ. Satoru fait tourner son petit ami en bourrique, en faisant le jaloux, en refusant de lui admettre ses sentiments, en jouant avec lui sans remords. Heureusement que les trois pages de fin de tome sont là pour régler cette histoire mais en même temps … On aurait presque préféré que cela reste mystérieux et pas tout à fait abouti, pour donner un peu de piquant à une histoire qui n’avait pas forcément la nécessité d’être terminée à un moment ou à un autre. C’est presque trop facile, vu comme ça.

La seconde histoire séduit un peu moins, manquant de ce petit point d’originalité que la première avait dans le décalage entre les deux personnalités d’un même héros. Pourtant, l’auteur parvient à faire évoluer les choses doucement, et c’est cela qu’on aime. Rien ne parait vraiment précipité même si la relation se forme rapidement. On voit bien que les protagonistes cheminent sec et passent par plusieurs étapes primordiales à la naissance du couple. Ils se complètent bien et gravissent les marches qui les mènent l’un vers l’autre. Même dans la dernière histoire, pas forcément très longue, il se passe quelque chose avec un petit truc qui rend la lecture agréable. C’est plutôt difficile à définit, cette capacité de l’auteur à les nuancer en quelques phrases, quelques secondes à peine. Ils prennent de l’ampleur dans la simplicité de leur quotidien et dans le manque de profondeur de leur vie, pour se concentrer sur l’autre et puiser une amélioration de celui qui les fait progresser. C’est véritablement de belles interactions qui se créent dans le travail de l’auteur, même en si peu de temps. On ne s’attendait clairement pas à voir quelque chose d’aussi sympathique et agréable dans un petit one shot qui ne paye pas de mine, mais c’est un fait, on passe un bon moment.

Pour ce qui est des dessins, le style est maitrisé, sans faute de proportions ou de morphologie. Par contre, ce qui ressort de façon évidente, c’est le vide. Pas d’arrière plan, pas vraiment de nuance dans les expressions qui sont dessinées telles qu’elles, brutes. Par exemple, un rougissement n’aura rien de très fin et l’auteur se contente de quelques traits. Pareil pour les larmes. Il manque comme un cocon qui enroberait le tout, soignerait les détails et les sentiments. Tout est très, trop « simple », exprimé de la manière la plus évidente qui soit. Et ça manque un peu de punch, de caractère. Sur l’édition, rien de plus à dire qu’à l’ordinaire, c’est tout fait correct et fidèle à leur ligne éditoriale. En bref, un bon one-shot, qui pour une fois se suffit à lui-même.