Critique du volume manga

Publiée le Jeudi, 30 Janvier 2025

L'Histoire est en marche: la forteresse de Juyongguan, ultime rempart protégeant la capitale des Jin, fait face à la pression constante des forces militaires mongoles, qui ne reculent devant aucun assaut ni devant aucun plan fourbe (en tête, envoyer les prisonniers en première ligne) pour parvenir à leurs fins. Et même si les soldats jin résistent vaillamment face à l'envahisseur, l'issue semble, à terme, scellée...

C'est dans ce contexte guerrier ample et intense que Yurul, en gardant toujours dans un coin de sa tête l'espoir de raisonner Temüjin sur les vertus des écritures et de récupérer la deuxième moitié du Gyokuondô, est emmené par Naran auprès du Grand Khan, et ne se doute pas forcément que tout ceci fait partie d'un plan du prince mongol en vue de faire tomber son père. Face à ça, Torui, l'autre prince et frère de Naran, ne semble pas décidé à rester inactif. Quant à Harabal, désormais désireux de prendre sa revanche sur les Mongols, il a pris la route en direction du camp du Grand Khan, bien décidé à en découdre, mais sans savoir ce qui l'attend sur place. Enfin, malgré son désir d'écouter les sages paroles de Yurul qui lui a appris que la haine et la vengeance sont un cercle infernal sans fin, Shut Hell ne peut aucunement se résoudre à laisser seul Yurul qui, face à Kahn, est sans doute condamnée malgré tout ce qu'il pourra lui dire. Ainsi la guerrière s'élance-t-elle à son tour en direction du lieu où tout va se jouer, non sans devoir également affronter sur sa route un redoutable arbalétrier...

Vous l'aurez compris: tandis que la grande Histoire suit son cours en étant proche de franchir un nouveau cap crucial dans la guerre d'invasion menée par les Mongols contre les Jin, c'est surtout sur un plan plus personnel que le récit s'emballe de plus belle, puisque nombre de personnages centraux de l'oeuvre sont voués à se retrouver au coeur d'un même conflit: celui ayant pour idée centrale la survie ou non du Grand Kahn face à ceux qui lui en veulent au point de vouloir le tuer, ceux qui le protègent ardemment et ceux qui souhaitent le raisonner, ce dernier rôle étant surtout porté par un Yurul peut-être plus captivant que jamais, mais nous y reviendrons un peu plus tard.

Dans les faits, cela permet à Yu Ito d'offrir plusieurs séquences d'affrontements particulièrement épiques, tant ses dessins restent limpides et grandioses quand il lui faut mettre en avant son entremêlement de combats vaillants et de duels où l'on ressent un véritable souffle. Clairement, l'autrice sait toujours retranscrire avec force des séquences captivantes (ne serait-ce qu'une flèche de Harabal filant à travers les obstacles) ainsi que la hargne de ses personnages en pleine action, en tête évidemment celle d'une Shut Hell dont la rage revient au galop face à certains événements durs, à certaines morts. Car des morts importantes, il y en aura inévitablement dans ce volume, même si pour l'une d'elles (la plus importante) on sait déjà que la mangaka réserve des "surprises".

Cependant, ce souffle épique permanent, cette action intense, ne semble surtout là pour, comme toujours, permettre à la mangaka d'insister sur ses thématiques autour de l'importance de l'écriture et de la transmission. Bien sûr, cela passe en premier lieu ici par le face-à-face entre Yurul et Temüjin, entre celui qui veut protéger les écritures tangoutes et celui qui voue son existence à les faire disparaître. Et ce "duel de mots" est parfaitement mené par une autrice qui sait très bien où elle va, tant les paroles prononcées par Yurul sont à la fois pleines de sens et riches de convictions. Et pour appuyer ses idées, Yu Ito sait également tirer parti de plusieurs de ses autres personnages, à commencer par ce que Torui fait vis-à-vis de Naran, et le regard que Sholga pose sur le parcours de son fils Salhi. Sans oublier, dans les dernières pages, l'acte insondable d'une Veronika qui n'a toujours pas fini de nous intriguer.

Nous voici à un nouveau tournant de la série, et Yu Ito nous y amène avec beaucoup de verve, d'intelligence et tout simplement de talent. Non contente de proposer un contexte historique soigneusement abordé et d'offrir de l'action épique, rondement menée et riche en rebondissements forts, la mangaka continue de mettre en avant avec beaucoup d'intensité ses thématiques phares autour de la vanité de la guerre, de la haine et de la vengeance, et de l'importance des écritures et de la transmission aux générations futures. A désormais trois tomes de la fin de la série, tout ceci nous promet une dernière partie captivante !


Critique 1 : L'avis du chroniqueur
Koiwai
16.75 20
Note de la rédaction