Critique du volume manga
Publiée le Vendredi, 05 Avril 2024
Une sortie à Shibuya entre Katsuji et Kazumi tourne au vinaigre quand tous deux croisent la route de petites frappes du quartier. Ces derniers sont sous la direction d'Onizuka, un caïd aussi redoutable que craint par ses sbires, et qui s'adonne à des arnaques sous forme de vente de place pour des soirées factices pour se remplir les poches. La rixe avec Katsuji, et plus globalement avec les élèves de Teiken et plus globalement du quartier Kichijôji, va mettre le feu aux poudres d'une bataille qui s'annonce sanglante...
Jonglant entre des moments de tranche de vie ubuesques et romantiques autour des élèves de Teiken et des arcs plus fournis, Rokudenashi Blues nous régale par sa dynamique et grâce à la patte de son inimitable auteur, Masanori Morita. Et tandis qu'on est loin d'être rassasiés par les aventures de Maeda et les siens, le mangaka nous offre ici le début de l'arc le plus intense qu'il ait pu nous proposer à ce jour au sein de sa série phare, une partie de l'histoire riche en bastons et qui ne trouve pas encore sa conclusion avec cet épais neuvième volume.
Par une rixe assez classique avec quelques lascars de Shibuya, l'auteur nous offre le point de départ d'une grande bataille dont il est impossible de deviner l'ampleur à première vue. L'introduction d'Onizuki signe en réalité les prémices d'un affrontement assez dantesque, tant l'antagoniste fait office du plus redoutable adversaire de Maeda à l'heure actuelle. Néanmoins, l'opposition entre les deux personnages ne constitue qu'un enjeu qui n'est abordé que dans l'ultime étape de l'ouvrage. Entre-temps, Masanori Morita prend le temps de faire monter la sauce, de faire se croiser les deux chefs de quartier sans jamais qu'ils ne s'en rendent compte, tout ceci dans l'optique d'amener un tas de confrontations qui permettent aux différents personnages du récit de briller face à des adversaires particulièrement imposants. C'est une belle manière de donner des rôles à des figures que l'on peut juger plus secondaires tout en faisant profiter chaque membre du groupe de son moment de gloire.
Mais par ce schéma, l'auteur prend aussi le risque de développer un arc qui paraîtra longuet pour certains. Car les enjeux dramatiques mettent un certain temps à se mettre en place, aussi le cœur de ce tome résulte d’une succession de bastons en attendant la très attendue confrontation entre Maeda et Onizuka. Néanmoins, un fond parvient tout se même à s'installer, une dimension morale assez importante vis-à-vis du protagoniste de l'histoire en tant que chef de gang. Morita embrasse alors les valeurs classiques du Jump pour élargir le caractère noble de ses personnages et la dimension quasi chevaleresque de son œuvre, en opposition avec le camp d'Onizuka qui n'existe que pas la force et la peur. L'idée peut paraître très classique aujourd'hui, voire naïve, mais elle est clairement efficace quand elle est développée par les lycéens de Teiken, pas toujours futés, mais toujours dotés d'un grand cœur.
Alors, les quelques longueurs de ce 9e tome sont largement pardonnables. Plus encore, on finit par en faire fi tant l'opus parvient à rebondir au bon moment et se renouveler, jusqu'à amener un début de climax riche d'intensité et fort de plusieurs élans émotionnels. Forcément, difficile de ne pas avoir envie de se jeter immédiatement sur le dixième tome, ne serait-ce pour découvrir le dénouement du combat opposant Maeda à Onizuka.