Critique du volume manga
Publiée le Mardi, 28 Février 2023
Autrefois publiée en France par les éditions Doki-Doki, à l'époque où la popularité de la série animée battait son plein, la saga Puella Magi Madoka Magica a fait son retour dans notre pays chez Meian depuis la toute fin d'année dernière, en premier lieu avec la réédition de l'adaptation manga de la série animée originelle, une adaptation qui avait la lourde tâche de condenser en seulement trois petits volumes tout l'anime, pour un résultat certes fidèle mais trop rushé. Mais dans la foulée de cette réédition, Meian a aussi lancé un autre manga en 3 tomes qui, jusqu'à présent, était inédit dans notre langue: L'Arc des Spectres, qui nous narre une histoire inédite se situant entre l'anime d'origine et le film Rebellion, film dont l'adaptation manga est d'ailleurs elle aussi prévue en France, normalement à partir d'avril. Après tout ça, on attendra de voir si Meian poursuivra encore son exploration de cet univers assez vaste, notamment via d'éventuelles rééditions de Puella Magi Madoka Magica - The Different Story (une version alternative de l'histoire de l'anime, qui se révélait être sans doute le meilleur manga de la licence) et de Puella Magi Kazumi Magica - The innocent malice (un spin-off qui se centrait sur d'autres magical girls et qui était franchement mauvais, ne le cachons pas).
De son nom original Mahou Shoujo Madoka Magica - Majuu Hen, L'arc des Spectres a été prépublié au Japon en 2016-2016 dans les pages du magazine Manga Time Kirara Magica des éditions Hôbunsha, magazine bimestriel entièrement dédié à la licence Puella Magi Madoka Magica. Il s'agit du tout dernier manga de la licence à avoir été dessiné par Hanokage, manga habituée aux aventures de ces magical girls puisque, auparavant, elle avait déjà conçu le manga adaptant l'anime originel ainsi que The Different Story et Rebellion.
L'arc des Spectres se situe donc peu de temps après la fin de Puella Magi Madoka Magica, alors autant dire que lire ce manga sans connaître l'oeuvre initiale a peu d'intérêt, et que les lignes suivantes de cette chronique vont spoiler certains événements-clés de la série-mère. Dans cette suite, les Sorcières ont enfin disparu, et les Puella Magi ne sont donc plus condamnées à se transformer elles-mêmes en sorcières au bout de leur mission. Et tout ça, on le doit à Madoka Kaname, qui s'est sacrifiée en émettant, au bout de son combat, le souhait que toutes les Sorcières disparaissent, ce qui a aussi permis d'annuler les drames qui furent provoqués par les Sorcières (comme les morts de Mami Tomoe et de Sayaka Miki). Le sort des Puella Magi étant décidément bien cruel, l'émission de leur souhait final signifie également que leur âme va disparaître, et c'est ce qui est arrivé à Madoka, qui a dès lors été oubliée par tout le monde, comme si elle n'avait jamais existé dans ce monde. Par tout le monde, sauf une personne: son amie Homura Akemi, avec qui elle a bâti un lien à part, et à qui elle a transmis ses dernières volontés.
C'est dans ce contexte triste qu'est mystérieusement apparue une nouvelle menace: les Spectres, des entités énigmatiques, invisibles pour les humains, mais proliférant grâce au miasme se libérant de leurs corps et dévorant les sentiments des gens. Les Puella Magi doivent donc poursuivre le combat, en utilisant leurs pouvoirs magiques pour essayer d'éradiquer la nouvelle menace, toujours sous les observations de l'étrange créature Kyubey...
Comme le laisse deviner la jaquette de ce premier volume où la Puella Magi brune s'affiche seule au premier plan avec derrière elle la silhouette d'une Ultimate Madoka disparue, ce manga est voué à mettre sur le devant de la scène Homura, celle avec qui Madoka a construit un lien si fort et qui est la seule personne au monde à encore se souvenir d'elle. C'est avec ce poids en elle que Homura va devoir reprendre le combat. Et cela, on sent bien qu'elle va le faire dans un but bien précis: pour Madoka, pour entretenir sa mémoire, voire peut-être pour trouver un moyen de rappeler aux autres le souvenir de sa précieuse camarade. Mais une fois les toutes premières pages d'introduction passées, il faut attendre le dernier chapitre du tome pour que Homura soit remise en avant, puisqu'avant cela Hanokage, pendant environ les deux premiers tiers du volume, s'intéresse quasiment exclusivement aux trois autres figures-phares de la série d'origine: Mami Tomoe, Sayaka Miki et Kyôko Sakura. Loin des querelles d'autrefois, celles-ci ont choisi d'unir leurs forces pour protéger de plus belle la ville de Mitakihara. Cependant, Mami, qui s'est installée en leader du trio, doit assister aux régulières prises de bec de ses deux camarades, notamment parce que Kyôko ne cesse de réprimander une Sayaka toujours embourbée dans ses petits tourments amoureux liés à Kyôsuke et Hitomi. Dans les faits, il peut y avoir régulièrement comme un arrière-goût de répétitivité, puisque ces problèmes sentimentaux étaient déjà au coeur des tourments de Sayaka dans la série-mère. Mais non seulement c'est assez logique puisque, suite au voeu de Madoka, on a une situation en quelque sorte rebootée. Mais en plus cela permet de mettre un peu plus en exergue le fait que la situation a changé par rapport à avant: cette fois-ci Mami n'est pas morte, et peut tâcher d'accompagner ses deux compagnes pour les guider. Enfin, tout cela permet aussi, bien sûr, d'installer les quelques spécificités de cette nouvelle menace mystérieuse que constituent les Spectres.
Sur le plan visuel, on sent bien que Hanokage a cumulé de l'expérience dans cet univers, à force d'avoir précédemment travaillé dessus pendant quelques années pour trois autres manga de la licence. Si l'on compare au tout premier manga de PMMM, ses designs sont globalement plus réguliers avec un travail honnête sur le contraste entre les designs ronds/mignons des jeunes filles et l'aspect sombre et tourmenté de cet univers. Malgré une tendance à multiplier des petits effets numériques impersonnels, la dessinatrice livre également des scènes d'action plus convaincantes, à la fois vives et fluides, avec même quelques instants de mise en scène découpant les mouvements avec beaucoup d'efficacité. Enfin, même si on ne les voit malheureusement pas tant que çà, les Spectres ont le mérite d'avoir des designs originaux et assez différents selon leur statut.
Il faut se dire, au vu de son contenu, que ce premier volume de L'arc des Spectres n'est vraiment qu'une mise en place, tâchant de présenter la nature des nouveaux ennemis, d'installer le nouveau contexte (avec notamment notre trio de magical girls mené par Mami), et de rappeler à notre mémoire le statut à part de Homura qui est désormais la seule à garder le précieux souvenir de Madoka... L'ensemble est assez efficace, si bien que l'on attendra avec intérêt de voir comment ce manga se développera sur ses deux tomes suivants.
Pour finir, soulignons la qualité de l'édition française, tout à fait satisfaisante. A l'extérieur, Meian propose une jaquette sobre et fidèle à l'originale japonaise, et agrémentée d'un fin vernis sélectif sur le logo-titre. Et à l'intérieur, on a droit à une première page en couleur sur papier glacé, à une traduction claire d'Angélique Mariet, à un lettrage soigné d'Elodie Baunart, et à une bonne qualité d'impression sur un papier à la fois, souple, assez épais et sans transparence.