Critique du volume manga
Publiée le Vendredi, 18 Mai 2012
Après Princesse Pivoine en 2010 et le Secret de la Grue Blanche en 2011, la jeune et talentueuse Ein Lee revient avec un troisième album illustré aux éditions nobi nobi!, toujours dans la collection Soleil Flottant, mais cette fois-ci avec une nouvelle scénariste : Samantha Bailly, jeune écrivain touche à tout, principalement connue pour la saga de fantasy primée Au-delà de l'Oraison.
Ce nouvel album s'inspire d'un conte japonais bien connu, celui de Hachikazuki Hime (la Princesse au bol), personnage que l'on a déjà pu croiser à plusieurs reprises dans l'univers du manga (elle est notamment un personnage-clé de l'excellent Moonlight Act). La jeune princesse Haruka a tout pour être heureuse : née dans la famille aimante du Seigneur Sanetaka Fujiwara, elle découvre les arts traditionnels, comme la musique au koto. Mais sa vie bascule à ses treize ans, lorsque sa mère, mourante, l'affuble d'un grand bol lui recouvrant le visage tout en priant la déesse de la miséricorde Kannon, avant de rendre son dernier soupir.
Prise alors dans une mystérieuse malédiction l'empêchant de retirer le bol, Haruka voit son père dépité face à ce destin cruel, puis se remarier un peu à contrecoeur, sur conseil de ses proches, à une femme acariâtre qui va s'arranger pour la faire expulser de la demeure. Désormais seule, dénigrée par tous à cause de ce bol la déformant, la princesse pense au suicide, mais le bol ne l'entend pas ainsi. La jeune fille erre, jusqu'à ce qu'un Seigneur la prenne en pitié et la recueille en sa demeure. Haruka, devenue servante, ne tarde pas à rencontrer un beau prince, la quatrième fils du Seigneur, qui ne la dénigre pas et finit par tomber amoureux d'elle au fil de leurs conversations... Mais la mère du prince acceptera-t-elle seulement qu'une servante bizarre fréquente son fils ?
Ce qui frappe à la lecture de cette histoire de 36 pages, c'est l'habile gestion des différents événements de la vie de la Princesse Haruka, des plus douloureux aux plus heureux. Il faut bien avouer que tout commence mal pour la pauvre jeune fille, victime d'une malédiction, délaissée de tous à cause de cela, si bien qu'on la prend vite en pitié et qu'on s'attache facilement à elle. Les textes, un peu plus conséquents que sur certains autres albums et découpés en petits paragraphes, racontent l'histoire de manière claire, logique, et se montrent donc tout à fait adaptés aux enfants, d'autant que leur police et leur couleur ne jurent jamais avec les illustrations d'Ein Lee. Celles-ci, toujours aussi sublimes, s'avèrent très nuancées, portées par de jolis jeux de lumière, et sont capables d'être chaleureuses quand il le faut, et sombres sans en faire trop lors des moments plus tristes.
On suit donc cette histoire habilement conçue jusqu'à sa conclusion laissant entrevoir une jolie morale, la malédiction du bol n'ayant été là que pour assurer à la Princesse un amour véritable, qui irait au-delà des apparences.
Du côté de l'édition, nobi nobi! rend une nouvelle fois une copie parfaite : en plus des textes bien intégrés aux dessins, on soulignera l'excellente qualité d'impression, ainsi que la galerie de croquis à la fin de l'album et, surtout, les explications sur le conte original, sur le message de l'oeuvre, sur l'influence de divinités comme Kannon.
Raconté avec clarté et fluidité, porté par les illustrations toujours aussi superbes d'Ein Lee, proposant un joli message, La Princesse au bol enchanté est une nouvelle réussite pour l'éditeur, et devrait sans problème ravir les jeunes filles et autres amateurs de jolis contes.