Critique du volume manga
Publiée le Mercredi, 20 Juin 2018
Après le superbe Our Summer Holiday en juin 2017, il semblerait que les éditions Delcourt/Tonkam souhaitent poursuivre sur des one-shot à l'ambiance estivale, à l'approche de l'été. Ainsi arrive dans nos contrées en ce mois de juin 2018 Hachi gatsu no ghost ("Le fantôme du mois d'août"), un récit rebaptisé chez nous Our Summer Love. Si ce titre en anglais semble très passe-partout, on suppose facilement qu'il a été choisi non seulement pour sa représentation assez fidèle de l'ambiance du manga, mais aussi pour surfer un peu sur le joli succès qu'a connu Our Summer Holiday l'année dernière.
Dessiné de 2016 à début 2017 pour le magazine online Yawaraka Spirits des éditions Shôgakukan, ce récit est la toute première mini-série publiée de Takeru Furumoto, un jeune auteur qui a gagné le Prix du jeune aux Young Magazine Awards 2014. Depuis, il a entamé en 2017 une nouvelle série, Back to the Kaasan, toujours en cours au Japon avec 3 tomes, et à ce jour inédite en France.
Naoto Kiryû est un jeune romancier qui, sous le pseudonyme de Naoto Shiomi, commence à percer. Réglant avec son responsable éditorial son prochain projet de roman, il se voit proposé d'effectuer des repérages sur la petite île de Tanegashima, au sud de l'île de Kyûshu, pendant l'été. Un lieu qu'il ne connaît que trop bien, puisqu'à l'époque du lycée, en suivant ses parents devant régulièrement déménager pour le travail, il y a vécu pendant toute la saison estivale il y a 7 ans. Trois mois inoubliables où il a connu son premier amour, une certaine Mizuki Natsuno, avec qui il a appris à nager et a passé de nombreux bons moments qu'il chérit toujours. Hélas, son séjour sur cette île s'était achevé sur un drame insondable, avec le décès soudain de Mizuki... De retour sur les lieux, Naoto ne tarde pas à apprendre une rumeur, celle de "la fille blanche du phare", un fantôme aux longs cheveux noirs qui apparaîtrait le soir à proximité du phare de la plage de Kumano. Et dans la foulée, il retrouve Akari, la petite soeur de Mizuki qui a bien grandi et est désormais en dernière année de lycée. Entre ses moments passés avec cette dernière et les apparitions du fantôme en qui il reconnaît clairement Mizuki, Naoto se remémore peu à peu ses souvenirs de ces trois mois estivaux inoubliables, trois mois où, quelque part, il est resté coincé pendant tant d'années...
Our Summer Love a pour première qualité son cadre: celui de Tanegashima, une petite île qui existe réellement, qui est réputée pour être l'une des plus belles îles du sud du Japon, et qui est aussi connue pour être la base de lancement des fusées japonaises, un point qui aura d'ailleurs son importance dans l'intrigue. Avec ses décors naturels comme la plage, les grottes ou la mer, ses lieux paisibles comme le phare de la plage de Kumano ou le parc Hase (un parc où les Japonais aiment se rassembler pour observer le lancement des fusées, entre autres), ou ses vues imprenables sur les voutes célestes étoilées loin du brouhaha de la ville par exemple, l'île tient beaucoup du petit paradis d'été, et le mangaka ne l'a évidemment pas choisie par hasard: tout au long de son oeuvre, il s'applique beaucoup à en faire ressortir le charme via des décors souvent issus de photos mais suffisamment bien retravaillés, et renforce encore l'atmosphère de vacances et de moments de vie agréable avec des petits événements comme une kermesse ou un pique-nique de nuit entre villageois. C'est très joli, et on se laisse happer sans le moindre mal par cette ambiance estivale, d'autant que l'auteur ajoute à tout ceci une pointe de charme à travers Mizuki et Akari, deux adolescentes vraiment jolies, dont il sait croquer la beauté sans jamais tomber dans le moindre voyeurisme (tout au plus quelques angles laissant deviner des formes).
C'est donc dans ce cadre que l'on suit une histoire dans le fond très classique finalement, mais oscillant très habilement entre tranche de vie estivale presque contemplative, tragédie du passé, et redécouverte de soi. Pour ça, Furumoto fait le choix d'une construction narrative assez prenante car elle alterne entre la découverte des trois mois du passé via le héros qui se remémore les choses, et les moments de vie dans le présent où il retrouve notamment Akari. Les moments dans le présent permettent de découvrir en Akari une adolescente aussi jolie que fraîche, cachant derrière son petit côté garçon manqué une vraie bonté, où l'on pense aussi deviner certains sentiments pour Naoto et l'impossibilité d'oublier sa grande soeur décédée. Après tout, pour elle aussi, cet été d'il y a 7 ans fut forcément inoubliable... Qu'a-t-elle bien pu ressentir à l'époque, après avoir non seulement perdu sa soeur, mais aussi vu Naoto partir ? Les instants dans le passé permettent de découvrir, petit à petit, comment étaient Naoto à cette époque ainsi que Mizuki, et comment ils ont bâti leur relation le temps de ces trois mois d'été. D'un côté comme de l'autre, on cerne deux adolescents qui étaient plutôt solitaires, évitaient de se mêler aux autres, si bien que Mizuki séchait même quasiment toujours les cours pour plutôt aller nager (on disait d'elle qu'elle ne faisait qu'un avec la mer), mais qui se sont finalement bien trouvés, dès lors que Mizuki a choisi d'apprendre à Naoto à nager en vue d'une compétition. Entre moments d'apprentissage, petits rendez-vous, petits secrets communs (comme lef ait que Naoto écrivait déjà son prmeier roman) et nombreux bons moments passés notamment avec Akari alors enfant, l'auteur nous fait bien comprendre ce que les deux adolescents d'alors se sont apporté l'un l'autre, et régale dans son approche qui ne trahit jamais l'atmosphère délicieuse de son manga, aussi fugace qu'un bel été. Et alors même qu'en filigranes, pourtant, on découvre également petit à petit le drame qui a emporté Mizuki. Pourquoi Naoto voit-il son fantôme près du phare le soir ? Pourquoi à cet endroit ? Pourquoi toujours à 8h du soir ? Que s'est-il passé exactement ? Au-delà de la mort de son premier amour, pour quelle autre raison a-t-il le sentiment de ne pas avoir avancé depuis 7 ans, d'avoir l'impression que tout change sauf lui ? Et au bout du compte, saura-t-il, justement, changer, avancer à nouveau, voir "son temps" reprendre réellement son cours ? Les réponses à ces questions ne traînent pas pour arriver et ne surprennent pas, avec à la clé une ancienne promesse, mais l'ensemble est vraiment joli, et le mangaka soigne jusqu'au bout son scénario en lui apportant une conclusion aboutie, assez poignante sans en faire trop, et apportant juste la pointe d'ouverture qu'il faut.
C'est donc une très jolie trouvaille que nous amènent les éditions Delcourt/Tonkam avec ce one-shot qui, dans une atmosphère d'été agréable très bien rendue, nous offre une histoire aussi classique que belle. Qui plus est, l'édition française est soignée, avec un bel effet brillant sur la jaquette, une bonne qualité de papier et d'impression, et une traduction excellente de Patrick Honnoré (déjà traducteur d'Our Summer Holiday, d'ailleurs).
Dessiné de 2016 à début 2017 pour le magazine online Yawaraka Spirits des éditions Shôgakukan, ce récit est la toute première mini-série publiée de Takeru Furumoto, un jeune auteur qui a gagné le Prix du jeune aux Young Magazine Awards 2014. Depuis, il a entamé en 2017 une nouvelle série, Back to the Kaasan, toujours en cours au Japon avec 3 tomes, et à ce jour inédite en France.
Naoto Kiryû est un jeune romancier qui, sous le pseudonyme de Naoto Shiomi, commence à percer. Réglant avec son responsable éditorial son prochain projet de roman, il se voit proposé d'effectuer des repérages sur la petite île de Tanegashima, au sud de l'île de Kyûshu, pendant l'été. Un lieu qu'il ne connaît que trop bien, puisqu'à l'époque du lycée, en suivant ses parents devant régulièrement déménager pour le travail, il y a vécu pendant toute la saison estivale il y a 7 ans. Trois mois inoubliables où il a connu son premier amour, une certaine Mizuki Natsuno, avec qui il a appris à nager et a passé de nombreux bons moments qu'il chérit toujours. Hélas, son séjour sur cette île s'était achevé sur un drame insondable, avec le décès soudain de Mizuki... De retour sur les lieux, Naoto ne tarde pas à apprendre une rumeur, celle de "la fille blanche du phare", un fantôme aux longs cheveux noirs qui apparaîtrait le soir à proximité du phare de la plage de Kumano. Et dans la foulée, il retrouve Akari, la petite soeur de Mizuki qui a bien grandi et est désormais en dernière année de lycée. Entre ses moments passés avec cette dernière et les apparitions du fantôme en qui il reconnaît clairement Mizuki, Naoto se remémore peu à peu ses souvenirs de ces trois mois estivaux inoubliables, trois mois où, quelque part, il est resté coincé pendant tant d'années...
Our Summer Love a pour première qualité son cadre: celui de Tanegashima, une petite île qui existe réellement, qui est réputée pour être l'une des plus belles îles du sud du Japon, et qui est aussi connue pour être la base de lancement des fusées japonaises, un point qui aura d'ailleurs son importance dans l'intrigue. Avec ses décors naturels comme la plage, les grottes ou la mer, ses lieux paisibles comme le phare de la plage de Kumano ou le parc Hase (un parc où les Japonais aiment se rassembler pour observer le lancement des fusées, entre autres), ou ses vues imprenables sur les voutes célestes étoilées loin du brouhaha de la ville par exemple, l'île tient beaucoup du petit paradis d'été, et le mangaka ne l'a évidemment pas choisie par hasard: tout au long de son oeuvre, il s'applique beaucoup à en faire ressortir le charme via des décors souvent issus de photos mais suffisamment bien retravaillés, et renforce encore l'atmosphère de vacances et de moments de vie agréable avec des petits événements comme une kermesse ou un pique-nique de nuit entre villageois. C'est très joli, et on se laisse happer sans le moindre mal par cette ambiance estivale, d'autant que l'auteur ajoute à tout ceci une pointe de charme à travers Mizuki et Akari, deux adolescentes vraiment jolies, dont il sait croquer la beauté sans jamais tomber dans le moindre voyeurisme (tout au plus quelques angles laissant deviner des formes).
C'est donc dans ce cadre que l'on suit une histoire dans le fond très classique finalement, mais oscillant très habilement entre tranche de vie estivale presque contemplative, tragédie du passé, et redécouverte de soi. Pour ça, Furumoto fait le choix d'une construction narrative assez prenante car elle alterne entre la découverte des trois mois du passé via le héros qui se remémore les choses, et les moments de vie dans le présent où il retrouve notamment Akari. Les moments dans le présent permettent de découvrir en Akari une adolescente aussi jolie que fraîche, cachant derrière son petit côté garçon manqué une vraie bonté, où l'on pense aussi deviner certains sentiments pour Naoto et l'impossibilité d'oublier sa grande soeur décédée. Après tout, pour elle aussi, cet été d'il y a 7 ans fut forcément inoubliable... Qu'a-t-elle bien pu ressentir à l'époque, après avoir non seulement perdu sa soeur, mais aussi vu Naoto partir ? Les instants dans le passé permettent de découvrir, petit à petit, comment étaient Naoto à cette époque ainsi que Mizuki, et comment ils ont bâti leur relation le temps de ces trois mois d'été. D'un côté comme de l'autre, on cerne deux adolescents qui étaient plutôt solitaires, évitaient de se mêler aux autres, si bien que Mizuki séchait même quasiment toujours les cours pour plutôt aller nager (on disait d'elle qu'elle ne faisait qu'un avec la mer), mais qui se sont finalement bien trouvés, dès lors que Mizuki a choisi d'apprendre à Naoto à nager en vue d'une compétition. Entre moments d'apprentissage, petits rendez-vous, petits secrets communs (comme lef ait que Naoto écrivait déjà son prmeier roman) et nombreux bons moments passés notamment avec Akari alors enfant, l'auteur nous fait bien comprendre ce que les deux adolescents d'alors se sont apporté l'un l'autre, et régale dans son approche qui ne trahit jamais l'atmosphère délicieuse de son manga, aussi fugace qu'un bel été. Et alors même qu'en filigranes, pourtant, on découvre également petit à petit le drame qui a emporté Mizuki. Pourquoi Naoto voit-il son fantôme près du phare le soir ? Pourquoi à cet endroit ? Pourquoi toujours à 8h du soir ? Que s'est-il passé exactement ? Au-delà de la mort de son premier amour, pour quelle autre raison a-t-il le sentiment de ne pas avoir avancé depuis 7 ans, d'avoir l'impression que tout change sauf lui ? Et au bout du compte, saura-t-il, justement, changer, avancer à nouveau, voir "son temps" reprendre réellement son cours ? Les réponses à ces questions ne traînent pas pour arriver et ne surprennent pas, avec à la clé une ancienne promesse, mais l'ensemble est vraiment joli, et le mangaka soigne jusqu'au bout son scénario en lui apportant une conclusion aboutie, assez poignante sans en faire trop, et apportant juste la pointe d'ouverture qu'il faut.
C'est donc une très jolie trouvaille que nous amènent les éditions Delcourt/Tonkam avec ce one-shot qui, dans une atmosphère d'été agréable très bien rendue, nous offre une histoire aussi classique que belle. Qui plus est, l'édition française est soignée, avec un bel effet brillant sur la jaquette, une bonne qualité de papier et d'impression, et une traduction excellente de Patrick Honnoré (déjà traducteur d'Our Summer Holiday, d'ailleurs).