Critique du volume manga
Publiée le Lundi, 09 Décembre 2024
Si Meian s'est distingué ces derniers temps avec certains gros lancements de séries-fleuves, citons par exemple OUT ou Be Blues, l'éditeur a aussi enrichi son catalogue avec quelques titres plus discrets. Parmi eux, Kyûki no Adabana, dont la couverture ne manque pas de cachet.
Première série du mangaka Tsugaru Toba, cette série courte en quatre volumes fut publiée entre 2021 et 2022 dans le magazine Shônen Sirius de l'éditeur Kôdansha. Une durée qui paraît donc succincte et qui laisse de facto penser à une annulation par manque de popularité, même si seule l'appréciation de l'histoire pourra nous rendre juges du caractère complet du récit. Depuis, l'artiste a largement su retomber sur ses pattes puisqu'il est au dessin du manga Kakuriyo no Yadomeshi depuis 2023, une adaptation du light novel de Midori Yûma qui a aujourd'hui atteint les 6 volumes. Une série qui, d'ailleurs, aurait particulièrement sa place dans le catalogue de Meian et nous permettrait de retrouver les talents du mangaka sur un autre style et sur une publication plus longue.
Plongé dans un folklore japonais traditionnel, le récit dépeint un monde où les kamis existent. Ces entités, priées par les humains depuis les temps anciens, parsèment le pays sans pouvoir être vues par le commun des mortels. Mais ce n'est pas le cas de Haru Tamaki, un adolescent capable d'interférer avec les kamis et lui-même accompagné de l'une de ces divinités sous la forme d'un petit oiseau en peluche. Alors qu'il croise la route d'un kami délaissé par les humains depuis longtemps, Haru fait la rencontre d'une autre de ces entités, cette fois tombée du ciel sous ses yeux : Kazura. Cette dernière est poursuivie par la souillure, et c'est en lui venant en aide que l'adolescent va chambouler le cours de sa vie...
Avec ce premier volume, "Kyûki no Adabana" joue sur un registre que les amateurs de shônen d'action fantastique connaissent bien. S'il n'est pas question d'exorcisme, le récit propose l'aventure d'un protagoniste dans un folklore très japano typé, non pas avec des yokaïs, mais avec des kamis qui donnent un univers inspiré du shintoïsme. En somme, le jeune Haru doit évoluer dans un monde d'entités surnaturelles, tandis que le scénario nous fait comprendre que lui-même n'est pas un garçon ordinaire. Ce type de périple dans un monde construit de folklores et de croyances n'a rien de nouveau, ce qui n'empêche pas ce premier volume d'être globalement très appréciable.
En premier lieu, c'est pour la patte de Tsugaru Toba qu'on adhère complètement à l'aventure proposée. Son trait est dense et d'une maîtrise hallucinante pour une toute première série, tandis que ses planches, en plus d'être dynamiques et souvent inspirées, sont magnifiées par les jeux de noir et de blanc du mangaka. Artistiquement, ce premier tome est particulièrement poussé. Ce qui, rappelons-le, n'est que la première série professionnellement publiée de l'auteur. Que la courte durée du manga soit liée à son manque de popularité ou non, on comprend que Kôdansha ait rapidement tenu à confier un autre projet à l'artiste. Et c'est pour cette même raison qu'on aimerait voir l'auteur être soutenu par les éditions Meian à l'avenir.
Côté scénario, si ce début de récit reste dans certains écueils, le tout se suit avec un réel plaisir et un sentiment de curiosité qui persiste jusqu'au bout. Car derrière des péripéties classiques en apparence, Tsugaro Toba sait entretenir nos attentes en plantant quelques mystères liés à son héros, en développant un univers qui apparaît déjà foisonnant, et en donnant vie à quelques personnes qui sortent du lot. C'est tout particulièrement Kazura, la kami principale de l'intrigue, qui s'accapare toute notre sympathie grâce à son histoire touchante et à sa force de conviction bien présente. Si ces quelques éléments narratifs semblent trop légers pour donner lieu à une grande histoire, surtout quand on sait que la série est achevée en quatre volumes, on est tentés de pousser notre curiosité jusqu'au bout afin de voir ce que Tsugaru Toba a pu faire de son scénario en si peu de temps.
Rien de révolutionnaire dans le récit de ce premier tome de "Kyûki no Adabana" qui se suit pourtant avec plaisir. Plus encore, cette première démonstration de la part de son auteur est immersive, et celui-ci démontre un talent graphique indéniable. Il y a donc largement de quoi vouloir tenter l'aventure jusqu'au bout.