Kylooe Vol.2 - Actualité manga

Kylooe Vol.2 : Critiques

Critique du volume manga

Publiée le Vendredi, 20 Mai 2011

Il y a des artistes capables de chambouler tous nos repères. De débarquer, l'air de rien, et de faire chavirer notre coeur en l'espace d'une histoire. Une histoire où s’entremêle rêve et réalité et où une jeune fille tente l'impossible tâche de vivre dans un monde qui n'est pas fait pour elle. C'est ce qu'avait réalisé Little Thunder avec le premier tome de Kylooe. Récit contemplatif et onirique d'une effarante beauté d'où exhalait un savoir-faire en matière de colorisation et de scenarisation qui dépassait l'entendement. Autant dire que ce second opus de la série était attendu au tournant et que l'auteur aurait fort à faire pour remettre le couvert une seconde fois. D'autant plus que cette dernière a choisi de délaisser Lanyue pour s'intéresser à de toutes nouvelles figures. Et pourtant... Et pourtant, il était vain de s’inquiéter car Kylooe revient, étonne, confirme, enchante.

Sanyi est un jeune homme tout ce qu'il y a de plus banal. Il vit dans un petit appartement en compagnie de Xiaohong, sa petite amie. Celle-ci est impulsive, enfantine, cruche à souhait. Tant et si bien que Sanyi se demande pourquoi il reste avec elle. En tout cas, elle est tout le contraire de la fille qu'il aima autrefois. Elle était dans la même classe que lui et elle était plutôt jolie. Mais ses résultats scolaires étaient plutôt médiocres et, du coup, on ne s'intéressait pas à elle. Elle était souvent seule. Il avait décidé de sortir avec elle comme ça, sans éprouver de sentiment particulier. Elle fût son premier et seul amour. Elle s'appelait Fei. Ling Fei. Et il ne l'a plus jamais revue.

Pour celles et ceux qui auront lu le premier volume, ce qui n'est en l’occurrence aucunement obligatoire étant donné l'indépendance totale des deux histoires, les premières pages risquent bien de paraitre fort étranges, hors propos. Où est donc passé le charisme d'une Lanyue, pourquoi donc ne retrouve-t-on pas le merveilleux monde du rêve ? Quel est ce supposé héros un peu simplet qui nous est présenté ? Little Thunder serait-elle passée à côté de son sujet ? Non, pas le moins du monde. Mais, pour s'en convaincre, il faudra aller au bout de la lecture. Car c'est ainsi, cette nouvelle intrigue reprenant le personnage de Kylooe ne pourra pleinement s'apprécier qu'une fois la dernière page tournée. Mais lorsque ce sera chose faite, c'est un nouveau tourbillon d'émotions qui viendra se loger au plus profond de nos entrailles. Enfin, chaque chose en son temps. Nous voila donc à suivre ce Sanyi, ce bonhomme qui raconte à sa copine ses vieilles histoires d'amour. Ou, plutôt, qui s'invente un passé afin de panser ses blessures. Car notre héros n'est pas celui qu'il prétend être, celui qu'il voudrait être. Non, loin de là. Et c'est au détour d'une conversation avec l'un de ses amis qu'il fera ressurgir pour de bon ses souvenirs enfouis. Et nous voila plongé quelque années plus tôt, à l"époque de sa rencontre avec la dénommée Ling Fei.

On y découvre une adolescente intrigante. Une adolescente digne de Lanyue. Une adolescente de chez qui suinte la solitude. Commence alors la relation entre elle et Sanyi. Une relation débutée on ne sait pas trop pourquoi, mais qui a malgré tout vu le jour. Mais aucun d'entre eux ne sait véritablement ce qu'il doit faire. Comment il doit se comporter. Comment dire à l'autre ce qu'il ressent pour lui. La seule chose qu'ils semblent avoir en commun, c'est leur gout prononcé pour la série animée Kylooe qui passe à la télévision. Pour le reste, il traine avec ses copains, elle passe sa vie à peindre. Les silences sont légions, les regards qui en disent longs aussi. Little Thunder démontre une nouvelle fois tout son talent lorsqu'il s'agit de narrer des évènements en utilisant un minimum de dialogues et en basant pratiquement tout sur le ressenti du lecteur. Mais, au final, on en vient à se demander quel intérêt peuvent bien avoir toutes ces petites scénettes d'un amour innocent entre deux jeunes gens incapables de communiquer. Et c'est à ce moment là que le récit commence à gagner en intensité. Que les choses se précipitent et que tout nous apparait plus clairement. Toutes ces futilités dans lesquelles on s'embourbe avant de se rendre compte qu'il est trop tard. Que notre incapacité à prendre les bonnes décisions, notre incapacité à agir, à réagir, n'est que le moteur d'une source inépuisable de regrets et d'amertume. Et nous voila arrivé à la fin. Non, déjà ? Alors que tout semble à peine avoir commencé ? Oui. Ce qu'a ressenti Sanyi lorsqu'il s'est rendu compte qu'il ne reverrait plus Fei, l'auteur nous le fait ressentir à notre tour. Nous voila pris aux tripes, bouleversé par ce qu'il vient de se produire. Sidéré par la magie qui vient de s'opérer à notre insu. Empli de frustration et de peine. Le doute n'est plus permis, Little Thunder possède un génie artistique et narratif qui tient du surnaturel.

Enfin, que dire de l'aspect graphique ? S'il ne nous est plus donné l'occasion de constater tout l'inventivité dont est capable de faire preuve l'auteur à travers un monde chimérique, on ne peut qu'une fois encore s'incliner et contempler l'utilisation remarquable de la couleur. Ce ciel par exemple. Ce ciel rougeoyant. Bon sang, que dire de plus ? Il n'y pas de mots pour décrire une telle perfection.

Il se ment à lui-même, ne veut pas se souvenir. Et voila Kylooe, cette peluche géante et effacée qui vient lui entrouvrir la porte. Doucement, tout doucement. Délicatement. Tout en mélancolie. Une plongée relaxante dans l'enfer du souvenir d'un passé adoré et insaisissable. Ecrin d'un amour qui ne s'explique pas, qui ne se dit pas, qui se vécu avec insouciance et nonchalance. D'un amour à jamais gravé dans la toile. Mais qu'importe car, dans son paisible rêve, chaque instant est une éternité qu'il peut passer en sa compagnie. Au bout du tunnel, du tunnel vert. En sa compagnie, en compagnie de Kylooe, et d'une tasse de thé rouge. Un horizon s'éteint, un soleil se lève. Nous voila de retour dans notre réalité, à nouveau et jamais marqué par cette œuvre éthérée


Critique 1 : L'avis du chroniqueur
Shaedhen
19 20
Note de la rédaction
Note des lecteurs