Critique du volume manga
Publiée le Jeudi, 18 Décembre 2025
KAIJU N°8 étant un des principaux succès de ces dernières années pour les éditions Crunchyroll (qui étaient autrefois les éditions Kazé, et qui redeviendront Kazé l'année prochaine, l'existence du Crunchyroll sur le marché français du manga aura décidément été une belle douille d'un bout à l'autre), il n'y a rien de plus logique que de voir l'éditeur tâcher d'explorer plus en profondeur la licence via ses spin-off. Ainsi, après le très sympathique KAIJU N°8 side B qui avait vraiment de chouettes petits approfondissements à apporter via ses récits annexes, voici qu'arrive, en cette fin d'année 2025, le premier tome de KAIJU N°8 RELAX, un dérivé purement humoristique/parodique qui suit son cours au Japon depuis le mois de juin 2024 sur la plateforme Shônen Jump+ des éditions Shûeisha, et qui a été confiée à Kizuku Watanabe, un auteur assez habitué à ce type de production puisqu'il avait déjà signé la partie scénaristique (si on peut appeler ça comme ça) de Koro Quest, un spin-off d'Assassination Classroom.
Au fil des années, l'histoire nous a déjà souvent enseigné que les spin-off se voulant parodiques de shônen d'action à succès sont souvent de très mauvaises idées, à l'image du gag manga de The Promised Neverland (probablement l'un des pires du genre, parmi ceux sortis en France), de L'Attaque des Titans - Junior High School, ou plus récemment de Demon Slayer - School Days (qui reste toutefois sans doute l'un des plus potables). Avec le premier volume de KAIJU N°8 RELAX, Watanabe tend malheureusement a encore confirmer la malédiction sur ce genre de produit opportuniste et sans grande inspiration, malgré un concept de départ qui a de quoi être fun: suivre les charismatiques membres des forces de défense dans leurs moments de congés, de repos, de détente, ça a de quoi amener des choses assez rigolotes, et c'est bien dans l'espoir de passer d'aussi bons moments qu'eux qu'on les suit quand ils partent en randonnée, quand ils vont à la salle d'arcade et autres joyeusetés. Mais derrière, encore faut-il parvenir à bien exploiter les choses et savoir amener soigneusement son humour, et c'est précisément là que la majorité du volume pèche.
Car le gros problème ici, c'est que le mangaka ne cherche aucunement à bien amener ses gags, que ce soit dans son découpage, son déroulement, sa mise en scène... Watanabe balance des blagues dans tous les sens, frénétiquement, dès qu'un truc lui passe par la tête, et très souvent ça tombe royalement à plat, même si, forcément, quand on balance autant de gags de façon random à chaque page il y en a toujours qui finissent par faire sourire (le plus souvent de nervosité, mais bon). L'humour, que ce soit en mangas, en animes, en films ou dans tout autre forme de divertissement, ça se prépare soigneusement pour exploiter le plein potentiel des éléments humoristiques, et ça ne se résume pas à ce qui est trop souvent fait ici, à savoir lâcher un gag au pif en l'appuyant avec un dessin caricatural/excessif qui semble nous dire "vous voyez, c'est là qu'il faut rire". Et quand on veut être parodique, il faut également prendre en compte les caractéristiques de l'histoire et des personnages de l'oeuvre dont on s'inspire, chose qui est beaucoup trop souvent oubliée dans ces pages.
Heureusement, le naufrage complet est un tant soit peu évité, grâce à plusieurs séquences tantôt courtes tantôt plus longues où le mangaka semble avoir comme des fulgurances d'inspiration. Certains gags font ainsi sourire de façon bien plus naturelle, par exemple car ils sont visuellement moins inutilement hystériques et se placent en contradiction parfaite avec l'image que l'on a du personnage concerné (franchement, Isao Shinomiya en pro de DDR, ça marche bien), tandis que certains chapitres exploitent mieux les personnages en tâchent d'aller suffisamment loin dans le délire, à l'image de toute la séquence concernant la coiffure et les yeux fermés de Hoshina.
A l'arrivée, on a envie de dire que ce premier tome, bien que souvent à côté de la plaque et plus exaspérant que drôle, n'est pas forcément le plus mauvais volet de ce type de productions (en même temps, quand t'as le gag manga de The Promised Neverland qui est passé avant...). Cela reste globalement opportuniste et sans saveur particulière, mais quand Kizuku Watanabe s'applique un peu plus pour mettre en scène ses gags et pour chercher l'inspiration dans les personnages d'origine pour réellement exploiter ce qui fait ce qu'ils sont, ça fonctionne un peu mieux. Laissons alors quand même le bénéfice du doute au machin: qui sait, peut-être que l'auteur a juste besoin de se mettre en selle, et que les tomes suivants seront mieux maîtrisés ?
Côté édition française, en tout cas, il n'y a rien à redire: la jaquette reprend fidèlement l'originale japonaise (y compris son fond orange pétant qui pique les yeux), le papier est souple et assez opaque, l'impression et convaincante, le traducteur de la série-mère Sylvain Chollet est au rendez-vous pour offrir quelque chose de cohérent et de fluide, et le lettrage du studio Mala est propre.
03/12/2025
25/02/2026