Kaijin Fugeki Vol.1 : Critiques

Kaijin Fugeki

Critique du volume manga

Publiée le Lundi, 16 Juin 2025

Invité d'honneur de Pika Edition en juillet à l'occasion de Japan Expo, Oh! Great est, fort logiquement, très mis à l'honneur par l'éditeur ces semaines-ci. Ainsi, quelques mois après la conclusion plutôt moyenne de son adaptation de Bakemonogatari en France, une triple actualité a lieu autour du célèbre artiste: l'arrivée début juillet d'un artbook conçu par Pika, et le lancement il y a quelques jours de la nouvelle édition d'Air Gear (dite "Unlimited") et, surtout, de sa toute dernière série en date, Kaijin Fugeki - Kindled Spirits, dont il va être question dans ces lignes. Mêlant action, fantasy et comédie, cette oeuvre est prépubliée au Japon depuis le 29 mai 2024 dans le Shônen Magazine des éditions Kôdansha, magazine shônen phare de l'éditeur, dans lequel le mangaka proposa déjà auparavant Air Gear et Bakemonogatari.

Cette série nous plonge dans un futur lointain où, pour s'opposer à l'orgueil et aux destruction de l'espèce humaine, les catastrophe naturelles ne suffisaient plus: celles-ci ont en quelque sorte évolué en devenant désormais ce que l'appelle les Nocturnes, des sortes de catastrophes surnaturelles basées chacune sur un élément ou un phénomène de la nature: soleil, typhon, crue... Mais en étudiant les Nocturnes pour préparer leur défense et leur riposte, les humains ont mis au point tout un système basé sur les fugeki, des chamans maîtrisant l'art des danses kagura afin de puiser l'énergie spectro-magnétique à même de conférer à leurs dieux leurs pouvoirs et ainsi exorciser les forces ennemies. Si l'idée de base est on ne peut plus classique, une certaine saveur pourrait, sur la longueur, se dégager de ce concept lié aux fugeki, dans la mesure où les méthodes de ces guerriers de nouvelle génération puisent dans une forte part de tradition: on pense au retour de certaines croyances ancestrales au sujet des dieux bien sûr, mais aussi à la danse kagura elle-même, très ancien rite artistique shintoïste qui, de par sa pratique ressemblant généralement à une danse théâtrale, permet déjà à Oh! Great de se faire plaisir graphiquement à travers quelques brèves chorégraphies assez stylisées.

C'est donc dans cet univers entremêlant science-fiction et aspects traditionnels que l'on fait la connaissance de nos deux personnages principaux. D'un côté Gao, troisième fils de l'Empereur de l'Empire Britannique, et guerrier pragmatique s'étant récemment exilé au japon sur conseil de sa mère, une combattante expérimentée qui s'est récemment sacrifiée face à la menace pour lui permettre de fuir. Et de l'autre côté Jin, adolescent nippon qui, même s'il passe pour un pervers au lycée où ses jolies camarades de classe aiment le taquiner, n'en reste pas moins, a la capacité d'"absorber" les dieux tutélaires, en tant que pilote de Tatarigatana le sabre du châtiment et via ses imparables danses kagura. Incarnant chacun, en quelque sorte, une vision du monde différente (Gao est un guerrier exilé et à la base plutôt pragmatique, tandis que Jin a une façon de combattre profondément enracinée dans les traditions), ces deux opposés sont pourtant voués à se compléter, et on sent qu'ils se sont déjà apportés beaucoup, en quelques mois, ne serait-ce qu'à travers leur deuil respectif concernant leur mère.

En somme, des bases intéressantes, il y en a assurément, à la fois via le concept initial et à travers ce duo principal. Mais cela suffit-il à faire de ce premier volume une franche réussite en terme de mise en place ? Eh bien, pas si sûr, la faute étant principalement due à un élément: les personnages secondaires, pour l'instant plus vains et insupportables qu'autre chose. Certaines bouilles sont pourtant prometteuses, comme les bicéphales Natsu et Fuyu Misasagi, ou Toto le chat en tant que mascotte. Mais à part ça, il y a surtout de quoi s'agacer face à pas mal de petits délires légèrement fan-service qui prennent trop de place parfois, au point de casser le rythme et l'ambiance: Micaiah qui parle trop de sa nudité sous son uniforme, la "gentille victimisation" de Jin qui est qualifié de pervers pour tout et rien, certains dialogues un peu ubuesques, et surtout les trop nombreuses petites blagues à base de culottes, de seins ou de tampons (si si) entretenues par la clique insipide de camarades de classe de Jin et n'apportant rien hormis du meublage. A l'arrivée, ces différents personnages secondaires amènent certes une certaine vivacité, et Oh! Great oblige ces héroïnes sont jolies tout plein, mais derrière il n'y a aucune personnalité, aucun fond, aucune réelle mise en place les concernant, donc on se fiche un peu de les voir s'agiter dans tous les sens.

Reste, enfin, ce qui a de quoi mettre quasiment tout le monde d'accord (hormis pour les notes de fan-service qui seront à l'appréciation de chacun) : la patte visuelle de l'auteur, toujours aussi fine, toujours aussi stylisée quand il le faut (notamment lors des petits moments de chorégraphie de danse kagura, ou pendant le petit "duel" du tout début entre les deux héros où les angles de vue sont bien pensés), et s'exprimant beaucoup ici par la volonté de l'artiste à entremêler les éléments traditionnels nippons et nombreux de choses plus futuristes/SF (certains gros vaisseaux en tête). Cet entremêlement, ce sont peut-être les Nocturnes qui promettent de le montrer le mieux, tant leurs designs pourraient être inspirés aussi bien des croyances japonaises d'autrefois que de la science-fiction. Affaire à suivre !

Au bout du compte, ce premier tome de Kaijin Fugeki nous intéresse autant qu'il nous laisse sur notre faim. Il y a pas mal de promesses dans l'univers, dans le concept et dans les différentes inspirations, mais pour le moment cela manque de consistance et reste un peu trop vain, notamment car Oh!Great, au lieu d'enrichir véritablement le background pour mieux nous accrocher, préfère déjà se perdre dans des considérations un peu fan-service autour de personnages secondaires qui ont pour l'instant zéro intérêt. Il n'y a plus qu'à espérer que ces maladresses se gommeront, et que l'auteur saura apporter un rythme plus stable à son oeuvre par la suite.

Cette chronique ayant été réalisée à partir d'une épreuve numérique fournie par l'éditeur, on ne donnera pas d'avis sur l'édition ici.


Critique 1 : L'avis du chroniqueur
Koiwai
13.25 20
Note de la rédaction
Note des lecteurs