Critique du volume manga
Publiée le Mercredi, 05 Avril 2023
Voici déjà plusieurs années que le manga félin est devenu l'une des figures de proue du catalogue des éditions Doki-Doki, avec un paquet de titres qui ont su aborder le sujet de manières très variées: Sa Majesté le Chat, Street Fighting Cat, Félin pour l'autre!, Nyankees, La Gameuse et son chat, Chat de yakuza... Et en ce mois d'avril 2023, le nouveau représentant du genre chez l'éditeur est Hachi & Maruru, chats des rues. De son nom original Tsureneko - Maruru to Hachi (dont le titre français est une traduction proche), cette oeuvre a été lancée au Japon en 2021 sur le site Comic Days des éditions Kôdansha et compte actuellement 2 volumes, le 3e opus étant prévu là-bas dès demain 6 avril. Il s'agit de la dernière série en date de Yuri Sonoda, une mangaka jusque-là inédite en France et active dans son pays d'origine depuis quelques années.
Comme son nom le laisse bien deviner, ce manga se centre sur le quotidien de deux chats vivant dans la rue, mais dont le parcours est bien différent. Hachi a toujours été un chat errant, qui a traversé bien des épreuves depuis son enfance, au point d'être devenu un matou aguerri et le félin le plus influent de son quartier, même s'il restait jusque-là solitaire. Un jour, ses pas ont mis face à lui Maruru, un chat domestique qui vivait dans un doux cocon familial parmi les humains qui l'ont adopté mais qui, en poursuivant un oiseau hors de chez lui, à trouvé le moyen de se perdre, en se confrontant dès lors au monde des rues forcément effrayant pour lui. Et si la première rencontre entre ces deux félins n'est pas idéale puisque Hachi envoie d'abord bouler Maruru, les choses vont changer quand Maruru sort Hachi d'une situation aussi embêtante que ridicule. Dès lors, les deux minets vont devenir quasiment inséparables, et Hachi va enseigner à Maruru tous ses tips pour survivre dans les rues... jusqu'à ce que ce dernier retrouver son foyer humain ?
Cette interrogation aurait pu constituer le fil conducteur de la série, et pourtant Yuri Sonoda va l'évacuer dès ce premier volume de manière assez astucieuse, ce qui aura pour effet de cristalliser la nouvelle vie de Maruru en tant que vrai chat des rues. Une vie où il a beaucoup de choses à apprendre auprès de son mentor et nouvel ami Hachi.
Ainsi, tout en installant brièvement toute une petite galerie de "chamarades" secondaires (le petit Calico, la "grande soeur" Ecaille, l'amusant Tad'noeuds...) ou de matous ennemis (en tête Roku, ambitieux boss d'un clan de chats voulant agrandir son territoire), l'un des enjeux principaux du récit est de voir Maruru s'adapter à sa nouvelle vie de chat des rues auprès de Hachi, ce qui permet évidemment d'évoquer tout ce à quoi peuvent être confrontés les félins errants au quotidien: entre la faim, les voitures, les humains les plus méchants, les conflits de territoire entre félins, ou encore la rudesse de l'hiver dehors, la mort peut leur tomber dessus à tout moment, et il faut donc savoir s'en sortir, éventuellement s'entraider entre chats, ou voir sur quels humains on peut compter pour obtenir un peu d'aide. La vie de chat des rues n'est aucunement facile, et c'est une chose que l'autrice parvient à évoquer avec un certain réalisme sans pour autant être trop pesante. Mieux, il y a aussi des choses plus lumineuses dans ce quotidien ardu, comme le réconfort que les matous peuvent apporter à des humains seuls et âgés, ou tout simplement la façon dont Maruru parvient assez vite à ouvrir le coeur de Hachi: le matou solitaire se prend de sympathie pour lui, au point de s'inquiéter et de le chercher quand il ne le voit plus pendant un long moment, ou même de venir en aide à d'autres chats en difficulté alors qu'il ne l'aurait a priori jamais fait avant.
Pour accompagner cette intrigue féline, Yuri Sonoda propose un dessin plutôt efficace. Sous un découpage classique mais toujours clair et des décors plutôt standard mais bien présents et assez immersifs, la mangaka joue surtout sur les designs de ses chats, avec des têtes assez simples et toutes rondes que quelques trames viennent enrichir. L'ensemble est suffisamment expressif et n'est franchement pas déplaisant.
Le nouveau manga félin de Doki-Doki s'annonce donc plutôt bien. Il n'y a rien de bien nouveau ici pour le moment, mais si l'on n'est pas lassé par ce genre de série il faut reconnaître que Yuri Sonoda sait insuffler un côté sympathique à ses chats et qu'elle arrive à présenter, via les péripéties de son duo principal, les difficultés de la survie féline dans les rues, une survie où l'entraide et l'amitié ne seront sans doute pas de trop.
Quant à l'édition française, elle jouit d'un papier assez souple et épais permettant une très bonne qualité d'impression, d'un lettrage soigné du Studio Charon, d'une traduction très convaincante de la part de Pénélope Roullon-Ishihara, et d'une jaquette fidèle à l'originale japonaise.