Critique du volume manga
Publiée le Mardi, 22 Août 2023
Midori en était sûre: en cherchant le bonheur auprès de son conjoint, quitte à se mentir sur les sentiments qu'elle a depuis toujours pour Makimura, elle était sans doute proche d'atteindre son vieux rêve, c'est-à-dire celui de se marier et de fonder une famille, comme la majorité. Mais entre la violence de Tazune, sa manière de lui refiler toutes les tâches du mariage comme si c'était juste une formalité dont il se fiche, et ses propres craintes face à sa grossesse, la jeune femme ne sait plus où elle en est, et se raccroche alors à ses retrouvailles avec Makimura, celle qu'elle a toujours aimée dans le fond.
Makimura, elle, ne peut rester insensible à ce qu'elle ressent: elle qui n'a jamais oublié Midori, elle a un sentiment meilleur au fond de son coeur, ce qui l'aide aussi à supporter certaines réflexions, notamment de sa mère qui lui reproche de ne toujours pas être mariée à quasiment 30 ans, de ne pas lui faire de petits-enfants et de ne pas avoir de "vrai" travail.
Tout simplement, les deux femmes vivent alors leurs retrouvailles comme un véritable espoir et une bouffée d'oxygène face à la vie "normale" que la société semble vouloir leur dicter. Alors quand Komari, l'amie lycéenne de Makimura rencontrée sur internet, lui propose de venir passer quelques jours sur son île natale avec Midori, notre héroïne saisit cette chance.
L'événement essentiel de ce volume est assurément ce petit voyage de trois jours, qui permet à nos deux héroïnes de vivre plein de jolis petits moments ensemble, tout en découvrant plus en détails une jeune fille rafraichissante et accueillante en Komari, Makimura trouvant même son amie du net particulièrement déterminée et courageuse. Seulement, est-ce vraiment le cas ? Komari a elle-même ses secrets, ses problèmes, ses regrets, évidemment liée à son homosexualité qu'elle n'ose pas avouer, au risque de faire du mal au garçon qui a toujours été à ses côtés.
Avec sa narration introspective, son dessin souvent très beau (surtout quand elle met en avant le côté étincelant de ses héroïnes amoureuses dès qu'elles sont ensemble), ou encore sa façon nostalgique de rappeler parfois à la mémoire de nos héroïnes l'époque où elles étaient heureuses ensemble au lycée, et malgré le sentiment que certaines choses vont un peu vite, Battan continue soigneusement de décortiquer le ressenti de ses héroïnes, cette fois-ci accompagnée d'une Komari qui a donc, elle aussi, des choses à transmettre autour d'une idée très nette qui parcourt tout ce tome: la difficulté à sauter le pas quand il le faut, parce qu'on a peur, parce qu'on ne sait pas quel moment saisir pour le faire, ou parce que l'on craint que cela brise une relation. Que ce soit Makimura qui n'ose pas demander à Midori si quelque chose ne va pas au début, Midori qui peine à se confier, Komari qui ne sait pas comment faire son coming out sans blesser son entourage, ou même, dans une moindre mesure, Tazune qui ne sait pas saisir le moment pour s'excuser de l'acte immonde qu'il a fait.
Le prochain tome d'Entre nos mains sera déjà le dernier, et on espère que la dernière ligne droite ne sera pas trop rapide puisque, en l'état actuel des choses, tout boucler en un seul volume semble juste. En attendant de voir ce qu'il en est, il est difficile de ne pas se laisser charmer par le style de Battan, ni de se laisser toucher par la justesse qui se dégage de ses héroïnes.