Critique du volume manga
Publiée le Lundi, 12 Août 2024
Chronique 2 :
Fidèles à leurs convictions malgré les sévices endurés, Okszy et Badeni ont à leur tout péri face à l'Inquisition, toutefois en immisçant quand me^me certains troubles en Novak concernant sa propre fille Jolenta. Et tout comme ce fut le cas avec Rafal et leurs autres prédécesseurs, les deux hommes sont loin d'être morts en vain dans leur volonté de transmission de la théorie de l'héliocentrisme: 25 ans années plus tard, la situation semble avoir commencé à changé au gré de certaines inventions comme la poudre à canon. Le monde a démarré d'importantes évolutions, et la religion en fait partie: l'hégémonie de l'Eglise commence à vaciller au fil de certaines divisions internes et de remises en cause, et cet aspect essentiel de l'oeuvre se voit à la fois rapidement et soigneusement abordé par Uoto pour recontextualiser historiquement les choses.
C'est dans ce contexte en pleins changements que l'on apprend l'émergence du Front de libération des hérétiques, qui agit contre l'hégémonie violente de la branche traditionaliste de l'Eglise, et dont l'un des plus importants leaders est un certain Schmitt, un homme se revendiquant certes croyant, mais envers ce qu'il appelle le naturalisme. La première partie du présent volume vise particulièrement à installer ce personnage, à nous faire cerner sa manière de voir la religion et ce en quoi il croit, et à nous faire découvrir ses côtés les plus radicaux puisque, pour lutter contre la branche traditionaliste, lui-même et ses sbires sont prêts à se montrer violents dans leur révolution, par exemple en attaquant tous les postes d'inquisition et en tuant si nécessaire.
C'est après cette première partie que le mangaka offre à ce volume une deuxième phase nous immisçant encore ailleurs, auprès d'un autre personnage : Douraka, jeune fille menant une vie de nomade avec son oncle, et subsistant avec une obsession en tête: sa conviction que pour éloigner sa peur de la mort elle doit devenir la plus riche possible, conviction née d'un drame de son enfance que l'on vous laisse découvrir. Intelligente, sachant raisonner et réfléchir en profondeur, cette nouvelle venue ne manque pas d'un certain charisme à sa façon, tout en ayant en tête des idées d'enrichissement, de productivité et de compétition qui évoquent largement les prémisses du capitalisme. Est-ce un sujet qu'Uoto compte développer encore plus ou une simple toile de fond ? Si le mangaka compte aborder plus profondément la chose, quel sera son avis dessus ? Impossible de le savoir dans l'immédiat.
Ce qui, en revanche, est vite sûr, c'est que les pas de Schmitt et de Douraka sont voués à se croiser, dans une dernière partie de tome qui ne surprend pas sur cette rencontre attendue (ni sur la révélation des dernières pages concernant l'identité de la personne dirigeant le Front, il ne pouvait en être autrement) mais qui déjà, captive dans ce que le mangaka a à y raconter. Si Uoto exploite la confrontation de valeurs de deux personnages a priori incompatibles (Schmitt croit en un autre style de religion plus naturaliste, quand Douraka, elle, ne croit tout simplement pas du tout au moindre dieu), l'existence d'un livre, d'un héritage est néanmoins là pour les faire avancer vers un possible but commun: répandre la vérité héliocentrique face au traditionalisme religieux et à son obscurantisme. Un sujet d'autant mieux maîtrisé par le mangaka qu'il sait très bien en profiter pour exploiter des avancées majeures de l'époque comme l'arrivée de l'imprimerie, et qu'il arrive par la même occasion à aborder des choses intéressantes sur la liberté de l'information entre autres.
Ainsi, quitte à faire pas mal de blabla par moments, Uoto prend le temps de mettre en place le nouveau contexte et les nouveaux personnages de son début d'arc (d'ultime arc ? ), et il effectue la chose de très bonne manière, en maîtrisant son sujet et en étant toujours limpide et passionnant, ce qui nous promet beaucoup pour les deux derniers volumes de la série.
Chronique 1 :
Okszy et Badeni ne sont plus. Néanmoins, leur héritage a subsisté, aussi la religion a commencé à changer avec la naissance du Front de libération des hérétiques, tandis qu'une autre branche s'oppose à la rigueur insensée et aux injustices sociales du courant classique. Le leader du Front de libération, le capitaine Schmitt, est à la recherche d'un ouvrage interdit. Le destin va faire se rencontrer l'ecclésiaste excentrique et Douraka, une jeune nomade qui aspire à la richesse pour sa propre survie...
Nous entamons le troisième arc de l'œuvre fascinante d'Uoto, et probablement le dernier étant donné qu'il ne reste que trois volumes (celui-ci inclut) avant le fin mot de l'histoire. Un climax imminent, donc, ce qui se ressent par le contexte changeant de l'œuvre. 25 années ont passé depuis la fin de l'opus précédent, et nous sentons bien le poids des actions menées par Okszy et Badeni, qui n'ont donc pas trépassé en vain. L'amorce du tome insiste donc sur une société divisée, où différentes approches de la religion se confrontent de manière à ébranler l'équilibre que nous connaissions dans cette retranscription de l'Europe de la fin du Moyen-Âge. L'Inquisition ? Elle est pour l'heure absente, puisque le monopole des luttes violentes revient au Front de libération dont le leader, le capitaine Schmitt, constitue l'un des points de vue de ce nouvel arc. Tous ces changements rendent le début de cette troisième partie absolument passionnant, confirmant l'avancée de l'intrigue, même s'il ne lui reste finalement que peu de temps avant d'atteindre son objectif, à savoir l'expansion de l'héliocentrisme.
Un point final vers lequel le récit se dirige suite à la présentation du deuxième focus clé de l'arc : la jeune Douraka. Un personnage entièrement neuf dans la série, de par son ethnie différente et sa représentation de la naissance du capitalisme dans la société. Un aspect qui, pour l'heure, sert surtout à donner de la complexité en personnage, plus que devenir une nouvelle orientation thématique. Le manga a déjà fort à faire, aussi mieux vaut ne pas multiplier les pistes.
Le cheminement semble alors évident, puisque Schmitt et Douraka sont amenés à se rencontrer pour faire avancer l'intrigue. Uoto manie la chose toujours aussi admirablement qu'à l'accoutumée, embrassant quelques points historiques pertinents (comme la naissance de l'imprimerie) tout en guidant la trame vers l'accomplissement des enjeux. Pour l'heure, on regrette simplement que les deux nouveaux protagonistes n'aient pas le charme d'Okszy et Badeni, mais peut-être n'est-ce qu'une question de temps et que les deux derniers tomes parviendront à les décortiquer suffisamment pour les rendre plus empathiques.
Sans entrer dans la répétition, "Du Mouvement de la Terre" ouvre un nouvel (et ultime ?) arc dont les bases s'avèrent tout à fait intéressantes, aussi bien par l'évolution du contexte historique que par la présentation et la réunion de deux personnages voués à faire bouger les choses et secouer l'Église au plus haut point. Une intrigue rondement menée couplée à une représentation historique variée et bien dosée dans ses idées, ce qui promet deux derniers volumes prenants.