Demande à Modigliani ! Vol.2 - Actualité manga
Demande à Modigliani ! Vol.2 - Manga

Demande à Modigliani ! Vol.2 : Critiques

Modigliani ni Onegai

Critique du volume manga

Publiée le Mardi, 09 Mars 2021

"Toi, l'heureux élu qui, dans un siècle ou dix, viendra explorer notre univers. La musique, les mots sont insuffisants... A toi, je veux transmettre mes sentiments et mes émotions, l'air, la chaleur, le goût, le moment présent, l'universalité. Faire voler en éclat le temps. L'effacer."

Dans une modeste université d'Art de la région du Tohoku, tout le monde est accepté, y compris les imbéciles! Et si Fujimoto, Chiba et Motoyoshi pouvaient éventuellement se considérer eux-même comme tels au départ, le fait est que chacun d'eux trouve se place dans ce domaine artistique, et essaie de trouver sa place, quitte à s'interroger régulièrement sur leur rapport à leur art et à eux-mêmes.

Ainsi Motoyoshi, l'artiste de nihon-ga déjà vu comme un génie bien supérieur aux autres, poursuit-il sa voie, non sans vendre déjà certains de ses travaux et être sollicité pour des expositions ou simplement par ses admirateurs. Le jeune homme apparaît décidément au dessus du lot pour bien du monde... mais lui, qu'en pense-t-il et est-il vraiment si "parfait" ? Son cas permet d'évoquer bien des choses, comme le traumatisme du drame de mars 2011 qui reste encore en lui à tel point qu'il ne peut se résoudre à s'y attaquer dans son art, ou plus généralement la manière dont les gens mettent à part celles et ceux qu'ils voient comme des génies, en pensant parfois même qu'ils/elles n'ont pas besoin de bosser et de faire des efforts.

Chiba, de son côté, progresse encore et encore dans le travail du verre, jusqu'à obtenir la chance de participer à une exposition de l'université en concevant une vaste verrerie ayant pour thème le monde marin... mais comment une telle création sera-t-elle perçue, à l'heure où le drame du tsunami est encore dans de nombreuses mémoires ? Avant d'en arriver à cette création, la progression du jeune étudiant est toutefois encore ponctuée de certaines interrogations, mais ici la mangaka nous invite surtout à replonger jusqu'aux origines de son choix d'avenir, lors d'une année de terminale qui fut assez riche pour lui, notamment grâce à une jeune enseignante stagiaire qui, en seulement trois semaines, lui a ouvert les yeux. Aujourd'hui, s'il n'a pas encore le niveau d'un Motoyoshi, Chiba pense bel et bien avoir trouvé sa véritable passion ainsi que de vrais camarades, et semble s'épanouir toujours plus dans son art.

Et Fujimoto, alors ? Eh bien, il reste sans doute celui qui se tourmente le plus, qui se sent à la traîne par rapport à ses amis... d'autant plus qu'apparemment, sa précieuse camarade Yoshino a été repérée par un garçon d'un autre établissement qui compte exposer avec elle. Le jeune garçon doit peut-être redoubler d'efforts s'il veut que son oeuvre marque les esprits et entre dans l'Histoire, mais ces efforts suffiront-ils ? Les acquis seront-ils suffisants pour se hisser en haut, quand bien même on pense ne pas avoir de talent inné ? Les tourments intérieurs de Fujimoto restent très humains, jusque dans certaines pensées négatives qu'il peut avoir parfois vis-à-vis de ses amis que pourtant il aime beaucoup. Et ses doutes intérieurs ont peut-être aussi été nourris par son passé, par son rapport à son père, qui ne l'a pas forcément toujours soutenu dans ce qu'il souhaitait... Alors, saura-t-il prendre conscience de sa valeur ? La bienveillance de certaines personnes, en tête desquelles ses deux amis et Yoshino, pourrait bien l'aider.

"Un véritable artiste est celui qui va au bout de sa passion et rien d'autre."

Ikue Aizawa continue alors de croquer avec richesse trois jeunes artistes qui, bien que dotés de niveaux différents, s'interrogent voire doutent tous parfois, mais tâchent également tous de vivre leur passion en la consolidant, ce qui les rend on ne peut plus humains. Et cet abord permet à la mangaka d'évoquer aussi des choses plus générales sur l'Art et le rapport que l'on peut avoir avec lui en tant qu'artiste. Il y a des vérités assez concrètes, comme le fait qu'il est difficile de faire de cette passion un métier. Mais aussi des choses moins concrètes, comme le besoin de ressentir que des personnes adhèrent à l'Art que l'on crée, ou le fait que l'imagination artistique peut parfois être influencée par le subconscient ou par des réminiscences du passé. L'autrice aborde aussi quelques petits éléments d'apprentissage comme l'utilité des croquis pour améliorer sa perception artistique ou encore ce qu'est l'"artist statement", puis elle n'hésite pas à offrir, à travers ses personnages, une certaine vision intéressante de l'artiste qui offre son nom à son manga, Modigiliani, et du rapport qu'il pouvait avoir avec son "rival" Picasso. Sans doute Mogiliani, notamment à cause de ses frasques, n'a-t-il pas percé comme Picasso, mais peut-être était-il aussi plus libre ?

"Je suis certain que Modigliani aurait voulu être à la place de Picasso. Et il y a fort à parier que ce dernier voulait être comme Modigliani."

Qui plus est toujours aussi bien porté par le dessin très riche, très personnelle, très hachuré et sans trames d'Aizawa, Demande à Modigliani! ne fait alors que confirmer toutes les qualités artistiques et humaines de son propos au fil de ce deuxième opus.
 
  

Critique 1 : L'avis du chroniqueur
Koiwai
16.25 20
Note de la rédaction
Note des lecteurs