Critique du volume manga
Publiée le Jeudi, 27 Octobre 2011
Tous les acteurs sont à présent réunis au laboratoire de Mimasaka, pour les ultimes révélations, qui occuperont tout de même l'ensemble du volume, portées par les interminables blablas de Kyôgokudo, plus que jamais analyste pertinent. Et comme dans le précédent volume, c'est justement ce qui déçoit le plus dans cette série: ce personnage d'une incroyable pertinence, que l'on croirait omniscient tant il est capable de dévoiler la vérité et d'appuyer ses raisonnements en se basant sur... rien du tout, finalement. Et en somme, il paraît donc difficile d'y croire, tant les nombreuses informations semblent sortir un peu de nulle part.
Les faiblesses de la série, à présent évidentes, ne s'arrêtent pas là, puisque malgré la grande linéarité de ces révélations sur l'intrigue se découpant en plusieurs actes, les lecteurs les moins attentifs devront beaucoup s'accrocher pour comprendre toutes les explications de Kyôgokudo, et même en restant scotché par l'oeuvre, on risque fort de passer au-dessus de nombreux éléments et références à la limite du compréhensible. Est-ce la faute à l'auteur du roman lui-même ? A Aki Shimizu qui a été incapable de bien tout faire ressortir ? A l'édition de Soleil Manga, dépourvue de notes de compréhension qui auraient pu être utiles et parsemée d'erreurs ? Sur ce dernier point, il faut bien avouer que les nombreuses fautes d'orthographe, la traduction pas toujours claire et, surtout, la confusion dans les noms des personnages par moments (Sekiguchi/Toriguchi au détour d'une page, Yôko/Kanako sur une autre) ont de quoi déstabiliser un récit où la traductrice elle-même ne semble pas avoir tout compris.
Pour en revenir à l'omniscience de Kyôgokudo, on regrette également que celle-ci mette de côté la majorité des protagonistes secondaires, dont on a l'impression qu'ils ne servent globalement à rien hormis au détour d'une ou deux pages, qu'il s'agisse de Sekiguchi, de Toriguchi, d'Enokizu, ou même de l'inspecteur Kiba, lui qui était si intéressant au départ. Au fil de tergiversations dont on ne comprend réellement que les grandes lignes (ce qui, ironiquement, suffit pour comprendre la conclusion de l'histoire... Le récit aurait-il été inutilement complexifié par des éléments finalement anecdotiques ? Il faut croire), le seul Kyôgokudo a le beau rôle de percer à jour les différents actes d'une tragédie devenant petit à petit de plus en plus morbide, malsaine, glauque, atteignant des sommets dans ce domaine via les révélations sur Yôko et Mimasaka. On a le sentiment d'avoir une oeuvre osée, allant au bout de ses idées dérangeantes, et dans ce cadre, le trait d'Aki Shimizu fait des merveilles, malgré une narration trop basique, sans grosse ampleur sur cette fin.
On reste un peu circonspect face à la conclusion du Coffre aux esprits. Après un début de série envoûtant et très intrigant, qui laissait volontiers le lecteur se régaler en émettant toutes sortes d'hypothèses, la suite ne fait que balancer de manière linéaire un nombre incalculable de révélations, en se basant sur des théories qui ont régulièrement un arrière-goût d'inutile, et via un seul protagoniste qui, de par ses blablas incessants et peu clairs, tend à alourdir l'oeuvre tout en reléguant au statut de figurants des personnages qui s'annonçaient pourtant complexes au départ (Kiba...).
Très maladroite, l'oeuvre est pourtant loin d'être mauvaise, s'avère même assez unique en son genre et globalement captivante pour ceux qui ont vraiment accroché et pourraient avoir envie de relire d'une traite toute la série pour tenter de comprendre un peu mieux certaines choses (préparez un doliprane, au cas où). Cela, on le doit principalement à une intrigue qui n'a pas peur d'aller loin, et au trait délicieux de Shimizu.
Le Coffre aux esprits a tout d'une série casse-gueule en France, et malgré les problèmes de traduction, on remerciera les éditions Soleil pour les nombreuses pages couleurs, et surtout pour avoir pris le risque de la publier dans leur politique de suivi de Shimizu. A présent, malgré les risques, on ne peut qu'espérer voir débarquer Kyoukotsu no Yume, adaptation du troisième roman de la saga de Natsuhiko Kyogoku (le Coffre aux esprits était une adaptation du deuxième roman).