Critique du volume manga
Publiée le Lundi, 02 Septembre 2024
Fin 2020, l'audacieux Chainsaw Man du tout aussi irrévérencieux Tatsuki Fujimoto prenait fin. Ou plutôt, la conclusion est celle de la première partie de l'œuvre, celle autour de la Sécurité publique. Le mangaka n'en a pas terminé avec les aventures de Denji, mais celles-ci se poursuivront environ un an plus tard, et cette fois sur la plateforme Shônen Jump+. Entre-temps, Fujimoto n'est pas resté inactif, loin de là. On imagine qu'il a utilisé ce temps pour réfléchir en amont la deuxième partie de son œuvre phare, mais il a aussi profité de ce temps pour dessiner deux one-shots qui feront de vrais émules sur la toile : Look Back et Adieu Eri. Vraies pépites de narration et d'intensité émotionnelle, les deux ouvrages ont confirmé le talent de leur auteur sur des sentiers différents de ce à quoi il nous a habitués avec ses deux séries. Tatsuki Fujimoto est un auteur polyvalent, intime, et qui ne se bride pas à un unique genre de fiction. La sortie des deux one-shots avant le lancement de la deuxième partie de Chainsaw Man a son importance tant on a l'impression d'avoir découvert une facette plus sensible de l'auteur. Dès lors, on peut s'attendre à tout pour la suite des aventures de l'homme-tronçonneuse.
Une suite dans laquelle Denji n'apparaît pas immédiatement. Un certain temps s'est écoulé depuis la bataille contre Makima, et le garçon a quitté la Sécurité publique. Les démons existent toujours dans ce monde, et la jeune Asa Mitaka va en faire les frais. Lycéenne solitaire et introvertie, elle voit les démons d'un très mauvais œil suite à un drame qui a affecté sa vie. Dans le cadre d'une expérience sociale, le professeur principal de la classe d'Asa propose d'élever un démon-poulet inoffensif, Koképi, en vue de l'abattre trois mois plus tard. Par cette expérience à l'issue inattendue, c'est aussi le cours de la vie d'Asa qui va changer. En parallèle, une véritable adoration de Chainsaw Man au sein de la société s'est créée. Plus surprenant encore pour la jeune fille : il paraîtrait que l'homme-tronçonneur est un élève de son lycée...
L'amorce de la deuxième partie de Chainsaw Man a quelque chose de déroutant à cause de (ou grâce à, selon les points de vue) l'absence de Denji. Tatsuki Fujimoto préfère introduire un autre personnage principal, une héroïne vouée à évoluer aux côtés de Denji quand celui-ci aura fait son retour : Asa. La demoiselle est immédiatement rendue attachante, et son destin se révèle rapidement intéressant puisqu'il y a quelques parallèles à faire avec l'histoire de Denji. C'est autour d'elle que les principaux événements de ce douzième tome vont avoir lieu, prouvant que Tatsuki Fujimoto n'a en rien perdu la main sur son univers.
Car de nouveau, c'est un récit implacable qui se dévoile à nous. La menace des démons n'est jamais bien loin et plane autour du petit groupe de personnages adolescents qu'on se plaît à suivre. Petite différence par rapport à l'arc précédent : ils sont, pour la plupart, totalement démunis de capacités, et ne sont donc pas en mesure de lutter contre les prédateurs de ce monde. Dès lors, la sensation de danger est très présente et va de pair avec quelques moments explosifs délicieusement mis en images. Fujimoto n'a pas perdu la main en ce qui concerne ses talents narratifs sur un manga d'action. Au contraire même, son style paraît plus fin et les erreurs de dessin beaucoup moins nombreuses, comme si la période de répit couplée à la prépublication numérique dans le Shônen Jump+ lui avait beaucoup apporté.
En vérité, il serait difficile de développer davantage sans révéler le déroulement du premier tome de la deuxième partie de Chainsaw Man. Il convient donc de la résumer comme une amorce brillamment menée, d'abord déstabilisante avant de renouer avec les spécificités de l'œuvre, des tons et de son univers, se plaçant à la fois comme un nouveau départ et une suite directe. Car pour comprendre certains points, avoir lu les 11 premiers tomes de Chainsaw Man est une nécessité. On est donc repartis pour une aventure folle, diablement bien narrée et potentiellement riche en surprises. Les questions en nous ne manquent pas au terme de la lecture mais plutôt que d'attendre immédiatement des réponses, on découvrira ce que Tatsuki Fujimoto a à nous proposer avec un certain appétit.