Carole and Tuesday Vol.1 - Actualité manga
Carole and Tuesday Vol.1 - Manga

Carole and Tuesday Vol.1 : Critiques

Carole & Tuesday

Critique du volume manga

Publiée le Mercredi, 17 Février 2021

Il arrive parfois que les éditions nobi nobi!, label jeunesse de Pika Edition depuis quelques années désormais, surprennent en proposant des oeuvres que l'on n'imaginait pas forcément dans leur catalogue, et c'est particulièrement le cas avec leur nouvelle série de février: Carole & Tuesday. A l'origine, cette oeuvre est une (excellente) série animée de musique et de science-fiction en 24 épisodes qui est disponible en France sur Netflix depuis 2019, et qui a été réalisée par le grand Shinichirô Watanabe (Cowboy Bebop, Samurai Champloo, Kids on the Slope, Space Dandy, Terror in Resonance...). Dans la foulée, une adaptation manga (celle dont il est question ici) est lancée au Japon dès 2019 dans le magazine Young Ace des éditions Kadokawa et est confiée à Morito Yamataka, mangaka jusqu'à présent inédit en France mais qui, dans son pays, avait auparavant dessiné de 2016 à 2018 la série de kendo en 4 tomes Kenki, Saku. Achevée en été 2020 après 3 volumes, la version manga de Carole Tuesday adapte unique la première moitié de l'anime, correspondant à une première saison de 12 épisodes. Et à vrai dire, au vu des sujets plus profonds et plus actuels évoqués dans la saison 2, on regretterait presque que cette dernière n'ait pas eu droit, elle aussi, à son manga...

Carole & Tuesday nous plonge sur la planète Mars, devenue habitable depuis un demi-siècle, et où l'humanité a déjà bien entamé sa migration vers la planète Mars en y reconstruisant sa civilisation.
Le 11 avril de l'an 49 de l'ère martienne, une jeune fille de bonne famille de 17 ans nommée Tuesday se précipite, avec pour seuls bagages une petite valise et sa guitare Gibson, dans la gare d'Herschel pour choper in extremis le dernier train de 23h54. Sa destination ? La grande ville d'Alba, la cité où tout semble possible, et où elle rêve de vivre son rêve musical en perçant.
A peu près dans le même temps, dans les bas fonds d'Alba, une certaine Carole, adolescente de 17 ans elle aussi, se fait virer d'un énième petit boulot mais n'en fait pas grand cas: elle est habituée, car voici des années que cette orpheline, initialement née sur Terre avant d'être réfugiée sur Mars, grandit quasiment seule dans son quartier, en ayant appris à survivre par ses propres moyens face à cette jungle urbaine où la loi du plus fort semble dominer. Mais Carole a néanmoins une passion qu'elle entretient soigneusement dans ce contexte: son clavier, avec lequel elle aime régulièrement jouer.
Ces deux jeunes filles, que tout semble opposer, n'avaient a priori rien pour se rencontrer. Et pourtant, le miracle va avoir lieu. Un miracle qui risque bien de les emmener très loin, au point de changer bien des choses, et pas uniquement pour elles...

Une fois n'est pas coutume, commençons plutôt par aborder la principale limite de cette version manga: sa rapidité. Adapter 12 épisodes de 25 minutes d'un anime en seulement 3 tomes de manga, c'est court voire très court, et Morito Yamataka n'a donc pas vraiment le temps de s'attarder sur certains détails. Ainsi, la version manga apparaîtra forcément beaucoup moins complète que l'anime pour celles et ceux ayant vu ce dernier. Quant aux personne n'ayant pas vu l'anime, elles ressentiront sans nul doute, elles aussi, des éléments un peu précipités, ne serait-ce que la présentation du cadre sur Mars qui est assez limitée, ou tout simplement les premières étapes musicales de nos deux héroïnes qui arrivent si vite qu'elles peuvent parfois paraître un peu faciles, presque comme si tout leur tombait presque directement dans les mains.

Et pourtant, concrètement, le mangaka fait les bons choix dans ce qu'il retient de l'univers de l'anime.

Cela passe en premier lieu par les dessins, avec un découpage toujours clair et bénéficiant même de quelques jolies petites envolées pour montrer le lien musical fort qui se crée entre les deux jeunes filles, des décors futuristes qui sont certes dépourvus des petits détails de l'anime mais qui sont très fidèles, et un trait qui reprend très fidèlement et avec l'expressivité qu'il faut les designs originaux de l'anime malgré quelques rares inégalités (entre autres, Carole a parfois un cou trop long, dès la première page en couleur, mais rien de dramatique). Finalement, le principal manque de cette version manga est, évidemment, qu'il ne peut pas nous faire écouter les chansons de Carole et Tuesday, ces chansons étant souvent superbes dans l'anime... mais le mangaka parvient à compenser en partie en cristallisant très bien autre chose dans sa mise en scène des brefs instants musicaux: l'union et l'osmose qui existent entre les deux héroïnes.

Mais il faut également souligner les qualités dans l'abord des personnages et de leur background. Les premiers personnages secondaires sont vite et bien posés, entre le DJ Ertegun apparaissant déjà délicieusement narcissique, le jeune Roddy qui travaille pour lui mais qui flashe déjà sur le jeu de nos héroïnes, la diva Crystal dont les deux jeunes filles sont fans comme beaucoup d'autres et qui ressent déjà quelque chose en elles, ou surtout Gus Goldman, un manager d'artistes devenu aujourd'hui has been dans l'industrie de la musique, notamment car il déteste la musique créée par des intelligences artificielles. Mais ce sont évidemment Carole et Tuesday qui attirent le plus l'attention, et dont on ressent bien les parcours certes assez différents (l'une est une fille de famille aisée dont la mère a des ambitions politiques, l'autre une orpheline réfugiée sur Mars et ayant grandi dans les bas-fonds) et pourtant communs par certains points vouées à les réunir: une certaine solitude dans leur quotidien, et leur passion pour la musique.

Le binôme fonctionne alors très bien, se complète joliment, tout en donnant même lieu à quelques instants d'humour, et c'est avec plaisir que l'on suit leurs premiers pas (quand bien même ils sont faciles pour l'instant) vers l'industrie de la musique. Concert de rue, repérage par un manager certes has been mais volontaire et aux méthodes pas toujours parfaites, première participation à un festival... Bien que rapide, l'immersion dans ces coulisses est plutôt prenante, d'autant plus que l'oeuvre se permet aussi un regard un peu plus critique sur cette industrie. On retiendra par exemple le côté très business du festival, où la qualité même de la chanson semble peu importer tant que le public est diverti. Mais surtout, le récit installe déjà un sujet voué à prendre encore de l'importance par la suite, à savoir l'aspect aseptisé de productions musicale (et d'autres productions culturelles) entièrement conçues par des intelligences artificielles, bien calibrées (et trafiquées dans les voix) pour plaire à la masse, mais éventuellement dépourvues d'émotions. Dans ce monde futuriste où tout est ainsi, Carole et Tuesday débarquent avec simplement une guitare, un clavier, leurs voix à l'unisson et leurs textes... Leurs chansons susciteront-elles l'émotion et montreront-elles une vraie âme dans cette société musicale aseptisée ? Celles et ceux les ayant repérées sont déjà convaincus que oui.

"Je veux chanter ce que je ressens."

Même si elle est forcément moins complète que l'anime d'origine et un peu rapide, cette version manga démarre donc très bien, grâce à toute l'application de Morito Yamataka, le mangaka effectuant les choix d'adaptation les plus logiques et les plus clairs, tout en proposant une copie visuelle franchement soignée. C'est donc avec plaisir que l'on (re)découvrira sur support papier le parcours des attachantes Carole et Tuesday... ou, tout du moins, la première moitié de leurs aventures, puisque le manga se limitera à la saison 1.

Cette chronique ayant été faite à partir d'une épreuve numérique fournie par l'éditeur, pas d'avis sur l'édition.
  

Critique 1 : L'avis du chroniqueur
Koiwai
15 20
Note de la rédaction