Critique du volume manga
Publiée le Mercredi, 22 Février 2023
"Toute formation de jazz est destinée à se séparer un jour !"
Les Dai Miyamoto Number 5 ont réalisé une belle prouesse au festival de rock anglais, si bien que le buzz qu'ils provoquent en Europe continue de plus belle. Et à l'arrivée, cela s'avère plus que payant: non seulement on leur négocie un concert lors du North Sea de Rotterdam, le plus important événement jazz du continent, mais en plus leur popularité grandissante fait qu'ils joueront sur la deuxième plus grande scène du festival ! Il s'agit d'un véritable pari pour les organisateurs, tant le public de ce festival renommé est exigent et paie cher ses places. Et forcément, les sponsors de l'événement émettent des craintes. Les Dai Miyamoto Number 5 n'ont donc pas droit à l'erreur sur place: ils se doivent de saisir leur chance et de tout donner, plus que jamais ! Et pourtant, les pensées de Dai, ce jeune saxophoniste japonais dont l'ascension semble inarrêtable, a déjà l'esprit tournée ailleurs. Il a des envies de nouveaux défis, d'autres horizons où il pourrait exprimer encore plus sa passion et ses talents. L'idée de dissoudre le groupe a germé dans sa tête depuis déjà quelque temps. Et ça, ses trois partenaires, qui voient bien que leur saxo ténor est à un autre niveau qu'eux,en ont déjà eux-mêmes conscience depuis quelques temps...
On le sait bien, puisque Dai est voué à partir explorer un autre continent dans la troisième partie de la saga: la séparation entre notre héros et ses trois partenaires européens est inévitable, et est une chose que Shinichi Ishizuka a soigneusement commencé à faire germer depuis le volume 9. les réactions sont pourtant diverses: Raphël le pressentait, Hannah le comprend, Bruno s'énerve... mais l'inévitable séparation ne signe pas forcément la fin du groupe puisque les trois musiciens peuvent continuer d'exister ensemble, qui plus est renforcés par tout ce qu'ils ont acquis au contact de Dai. Et puis surtout, les futurs adieux ne pourra aucunement effacer tout ce qu'ils ont vécu ensemble, et tout ce qu'ils comptent encore partager avant le moment fatidique. Tout ceci, Ishizuka le met particulièrement bien en scène, surtout quand le quatuor discute de tout ça en marchand dans la nuit, ce qui a aussi quelque chose de très jazzy.
Il va donc de soi que le concert au North Sea sonne comme un point culminant, qui doit cristalliser à la fois le groupe de nos quatre personnages, et peut-être plus encore ce qu'ils ont vécu, ce qu'ils ont éprouvé, ce qu'ils ont prouvé ensemble. Un aspect qui se ressent d'autant plus fortement que le North Sea sera l'occasion pour eux de recroiser nombre de visages qui, à un moment ou à un autre, de façon même anodine, ont eu une importance dans leur parcours et dans la progression européenne de Dai en particulier. Et sur tout ça, le mangaka ne s'y trompe pas en offrant un passage musical qui est forcément parmi les plus forts et particuliers de la saga à ce jour. Contrairement au concert du tome précédent où une grande partie de la mise en scène laissait voir la foule et son ressenti, cette fois-ci Ishizuka se concentre beaucoup plus sur ses quatre musiciens, pour mieux cristalliser leur osmose et leur parcours effectué ensemble. On ressent en continu leur union, leur entente, leur désir d'offrir à quatre un dernier concert d'anthologie, ce qui passe aussi beaucoup par leurs pensées qui montre à quel point, désormais, ils connaissent bien le jeu des autres et se connaissent bien eux-même. Quant à Dai en particulier, il véhicule à merveille son ressenti, ses remerciements envers ses trois partenaires, à travers son saxophone: une nouvelle fois, le jazz est bel et bien ici la musique de l'émotion.
"Quand on s'est rencontrés, on ne se comprenait pas. Et maintenant, on arrive à deviner ce que pensent les autres !"
Mais le mieux est que, dans un esprit assez jazz où l'improvisation est omniprésente, les derniers pas de Dai avec ses trois partenaires, ses trois amis européens, ne s'arrêtera pas au North Sea: de façon plus intimiste, il leur reste un dernier voyage européen à faire, une dernière voie à explorer, ce qui conclura d'excellente façon cette deuxième partie. On attendra alors avec d'autant plus d'impatience la troisième partie de la saga, Blue Giant Explorer, qui amènera Dai aux Etats-Unis (le berceau du jazz), et qui sera lancée en France dès le mois d'avril !
"On peut jouer du jazz quels que soient notre pays, nos origines ou notre genre !"